Le sexe et la cité, autour de la série “The Deuce”

The Deuce
The Deuce - HBO
The Deuce - HBO
The Deuce - HBO
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La série "The Deuce", trois saisons, est sortie ces dernières années sur HBO sous l'égide du grand David Simon, le réalisateur de "The Wire". Culture séries revient sur les épisodes de "The Deuce".

Avec
  • Emilie Notéris Ecrivaine
  • Raphaël Nieuwjaer Critique de cinéma. Fondateur de la revue Débordements.
  • Tanguy Dufournet Sociologue. Enseignant-chercheur à l'université de Reims Champagne-Ardenne et à l'université Lumière-Lyon 2.
  • Olivier Joyard Critique et réalisateur

The Deuce, c'est la 42e rue dans le quartier de Times Square. Si on visite New York aujourd'hui, on a du mal à imaginer qu'elle a pu ressembler à ce quartier arpenté dans la série par des malfrats, des prostituées, des proxénètes et des mafieux ; une Babylone, un lieu de luxure et de crime. Dans un des épisodes, un personnage parle de "Taj Mahal de la pissotière", et c'est sans doute une belle image pour décrire The Deuce

L'histoire se passe entre 1971 et 1985, principalement la nuit, autour d'un personnage qui s'appelle Vincent, interprété par James Franco, il est barman. Il vit la nuit, il rencontre la faune locale, les prostituées et leurs macs, dont l'activité se trouve bouleversée par l'arrivée notamment de salons de massage. Des mafieux italiens qui lui confient de plus en plus de responsabilités, des flics plus ou moins corrompus, un avocat engagé, un adjoint à la mairie zélé. Parmi les personnages les plus saillants, il y a Frankie, le frère jumeau flambeur de Vincent, Abby, qui est une étudiante au départ qui lâche la fac pour le monde de la nuit. Candy, cette prostituée indépendante qui se passionne pour le cinéma porno et qui devient réalisatrice. Lori, tout juste débarquée d'une Amérique profonde et qui tombe dans les griffes d'un mac.

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L'industrie du sexe comme trame narrative 

C'est peut-être moins une série-monde que "The wire" qui avait un thème social à chaque saison presque une cartographie. Plus on regarde les séries de David Simon, plus on comprend son système. (...) C'est un auteur en colère. Il veut rentrer dans la chair du social. Olivier Joyard

Il est évident que David Simon a construit ses séries pour ouvrir dans l'espace public américain certaines discussions. (...) Il y a toujours un point de tension chez Simon qui me semble être incarné par le personnage de la journaliste Sandra Washington : elle essaye de récolter la parole des prostituées dans la rue et ,en même temps, de restituer cette parole dans le mouvement de fond c'est-à-dire la gentrification de New York dans les années 70'. (...) Si ces séries sont réussies, c'est que David Simon arrive toujours à tenir ces deux dimensions-là : la partie humaine qui passe par les personnages mémorables auxquels on s'attache et l'inscription de ces trajectoires dans les structures sociales. Raphaël Nieuwjaer

Concernant The Deuce on peut parler d'un mélodrame industriel qui se focalise sur l'industrie du sexe ; c'est la trame narrative première. Puis, il y a en toile de fond : la gentrification de New-York, l'épidémie de sida. Emilie Notéris

Le personnage de Candy - Eileen Merrell, jouée par  Maggie Gyllenhaal
Le personnage de Candy - Eileen Merrell, jouée par Maggie Gyllenhaal
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Les représentation de l'érotisme

La pornographie des années 70' travaillait encore les images, les représentations. (...) La pornographie est une caisse de résonance de la société. Dès lors qu'arrivent les années-sida, cette inquiétude va traverser l'industrie pornographique. Et cette mise en image de la sexualité montre comment les relations sexuelles même se transforment dans la société contemporaine. Tanguy Dufournet

The Deuce
The Deuce
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Pour aller plus loin

Débordements, revue en ligne de cinéma

Le travail pornographique gay : aliénation et jouissance, sociologie située du travail (homo-)sexuel des corps par Tanguy Dufournet

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