Aires Marines Protégées : les ambitions européennes contrariées : épisode 2/4 du podcast Océans : un monde à protéger

Un bateau quitte Saint Nazaire pour pécher dans l'océan Atlantique
Un bateau quitte Saint Nazaire pour pécher dans l'océan Atlantique ©AFP - LOIC VENANCE / AFP
Un bateau quitte Saint Nazaire pour pécher dans l'océan Atlantique ©AFP - LOIC VENANCE / AFP
Un bateau quitte Saint Nazaire pour pécher dans l'océan Atlantique ©AFP - LOIC VENANCE / AFP
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L'Union européenne développe un programme ambitieux de protection de ses océans, notamment avec l'objectif de protection d'au moins 30% des eaux européennes d'ici à 2030. La création d'Aires Marines Protégées est-elle suffisante pour y parvenir ?

Avec
  • Joachim Claudet Directeur de recherche CNRS au Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (CRIOBE)
  • Annie Cudennec Professeure de droit public et agrégée des universités à l’Université de Bretagne Occidentale
  • Pierre-Yves Le Meur Anthropologue, directeur de recherche à l'Institut de Recherche pour le Développement (IRD)

En 2021, l’Union Européenne lançait sa mission “Restaurer nos mers et océans pour 2030”. L’objectif : protéger 30 % des plus de 11 millions de km2 de mers de l'Union Européenne en 2030. Une stratégie qui s’inscrit dans une volonté de longue date, puisque dès 1992, le réseau Natura 2000 - un réseau de protection des espèces et des milieux naturels - , l’un des tout premiers instruments de la politique européenne en matière d’environnement, était lancé.

Une politique qui se veut exemplaire par rapport au reste du monde mais qui n’est pas exempte de contradictions : le 3 mai 2022, le Parlement européen a rejeté un amendement qui voulait interdire la pêche au chalut - particulièrement invasive - dans toutes les aires marines protégées.

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Alors, à quoi servent vraiment ces "Aires Marines Protégées” ? Comment rendre effective cette protection afin qu’elle ne reste pas au stade de voeu pieu ? Comment concilier les activités d’exploitation et de protection ?

Florian Delorme reçoit Annie Cudennec, professeure de droit public et agrégée des universités, à l’Université de Bretagne Occidentale et Joachim Claudet, directeur de recherche CNRS au CRIOBE (Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement).

"Pour garantir la durabilité de nos activités maritimes, il faudrait que l’intégralité de nos pratiques dans les océans soit durable et que des zones soient réservées pour la protection de la diversité. Or il se passe plutôt l’inverse : dans les aires maritimes protégées, on chercher à faire du développement durable, et on y fait très rarement de la conservation de la biodiversité" explique Joachim Claudet.

"Il existe un fond européen dédié aux affaires maritimes et à la pêche, le FEAMP, qui finance des actions devant intégrer les exigences de la préservation de l’environnement. Mais des études ont montré que les actions du FEAMP ne sont pas suffisamment axées vers la conservation des ressources biologiques. Sur ce sujet, l’Union Européenne dispose d'une marge de progression encore très importante" analyse Annie Cudennec.

Le focus du jour

Le Rahui, une gestion traditionnelle des aires marines

Tahiti, Polynésie française en 2021
Tahiti, Polynésie française en 2021
© AFP - Ludovic Marin

Cap vers la Polynésie, où le Rahui, un dispositif ancien de gestion de l’océan refait surface. Une façon de veiller à l’environnement tout en assumant sa souveraineté. De quel régime juridique relève les territoires polynésiens ? Quels peuvent être les effets pervers de la protection par aires ? Comment une mise en commun peut-elle conduire à un accaparement ?

Avec Pierre-Yves Lemeur, anthropologue, directeur de recherche à l'IRD (Institut de Recherche pour le Développement).

"Le Rahui n’est pas simplement un dispositif de protection de l’environnement, mais également une affirmation souveraine de la personne ou de l’autorité qui décrète un Rahui sur un espace donné. C’est un dispositif tout aussi environnemental que politique" observe Pierres-Yves Lemeur*.*

Références sonores

  • Loïc Fournier, pêcheur à bord d’un des derniers chalutiers de Boulogne, le Pax Dei, explique combien il est difficile de devoir rejetter à la mer les poissons pris dans le chalut et non-autorisé par l’Union européenne, tel le bar (France 3 Bretagne, 11 décembre 2017)
  • L'eurodéputée belge Caroline Roose appelle ses collègues à voter pour l’interdiction du chalutage de fond dans les aires marines protégées (Twitter, 03 mai 2022)
  • Pierre Karleskind, président de la commission de la pêche au Parlement européen a déposé un amendement pour que l'interdiction de la pêche au chalut de fond ne s’applique que dans les aires marines strictement protégées (France Inter, 12 mai 2022)
  • Emanuel Gonçalves, coordinateur scientifique de la Fondation Oceano Azul à l'origine d’un projet concernant la réserve naturelle des îles Selvagens dans l’archipel de Madère, explique la spécificité de cette protection totale (Euronews, 05 décembre 2021)
  • En octobre 1994, le directeur régional de l’Environnement pour la Corse Philippe Sénégas expliquait quelles étaient les modalités pour le déploiement de la zone Natura 2000 près d’Ajaccio (Archive INA, 12 octobre 1994)
  • Zelma, conseillère municipale de la localité de Rapa en Polynésie française parle de l’importance du Rahui dans l’écosystème de la région (Pew Polynésie française, 08 septembre 2015)

Référence musicale

  • « Slowlight » de Christian Löffler (Label : Ki records)

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