

La Côte d'Ivoire accueille de nombreux migrants, 2,6 millions étaient recensés en 2020 par l'Organisation internationale pour les migrations. Si le pays a longtemps eu une politique favorable à l'immigration, le phénomène est aussi source de tensions et de repli identitaire.
- Jacqueline Derens Autrice, ancienne militante contre l'apartheid
- Fabio Viti anthropologue, professeur à l’Université Aix-Marseille et enseignant chercheur à l’Institut des Mondes Africains
- Florent Gohourou docteur en Géographie de l’Université de Poitiers et enseignant-chercheur à l’Université Jean Lorougnon Guédé en Côte d'Ivoire. Chercheur associé au laboratoire Migrinter du CNRS à Poitiers.
C’est une donnée qu’il est important de rappeler, lorsque l'on s’intéresse aux migrations africaines : si beaucoup d’hommes et de femmes décident de quitter leur pays natal pour chercher meilleure situation à l’étranger c’est sur le continent africain – et non en Europe - que l’immense majorité des migrants décide de s’exiler. La Côte d’Ivoire, en Afrique de l’Ouest, fait partie de ces destinations privilégiées. Grâce à ses activités portuaires, industrielles et surtout son secteur agricole très développé, le pays a toujours été particulièrement attractif. Entre 10 et 25% de la population est étrangère en Côte d’Ivoire, selon les chiffres de l’ONU ou du gouvernement ivoirien. Ils sont originaires du Mali, de la Guinée, du Sénégal mais surtout du Burkina Faso.
Si les Ivoiriens se reconnaissent dans une tradition d’accueil et d’hospitalité, l’immigration est aussi source de tensions, voire de repli identitaire. Alors que les effets des crises politiques et économiques de ces dix dernières années se font encore sentir, le choix de l’ouverture à l’immigration ne semble plus si évident pour les Ivoiriens.
Quel a été le rôle de l’immigration dans la construction de la nation ivoirienne ? Comment est-on passé d’une politique ouvertement favorable à l’installation des étrangers à des phénomènes de rejets, voire de xénophobie ? Est-ce bientôt la fin de l’eldorado ivoirien pour les immigrés ouest-africains ?
Il y a eu des phénomènes de rejets précoces. Dès 1958, avant même l’indépendance, il y a eu une véritable chasse à l’étranger à Abdijan, on a pu évaluer 20 000 expulsions ou rapatriements car ils étaient accusés de monopoliser les professions au sein de l’administration coloniale. Fabio Viti
La Côte d’Ivoire a mis en place une politique migratoire d’ouverture de 1960 à 1975. L’État avait donné de nombreux droits aux étrangers tels que l’accès à la terre, la possibilité de travailler pour la fonction publique ou bien de participer aux élections. Dès 1970, le pays met en place l’identification des étrangers et l’instauration de la carte de séjour. C’est à partir de 1975 que l’on va assister à une politique plus restrictive, avec l’ivoirisation des cadres, en réservant des emplois pour les nationaux. Florent Gohourou
Seconde partie - le focus du jour
Afrique du Sud : une montée de la xénophobie
En septembre 2019, des manifestations contre les travailleurs étrangers donnent lieu à des émeutes xénophobes en Afrique du Sud. Ce pays est la deuxième puissance économique d’Afrique, ses nombreuses mines attirent la main d’œuvre. Mais depuis ces dernières années, l’Afrique du Sud connaît également une montée de la haine à l'encontre des migrants, agressions, casses de commerces, meurtres… En quoi ce pays, vu comme une terre riche et accueillante, devient un milieu hostile pour les migrants ? Quelle politique est pratiquée par le gouvernement ? Que reste-t-il des valeurs de l’ANC de Nelson Mandela ?
35% de la population sud-africaine est au chômage, selon les chiffres officiels. C'est sans compter tous ceux qui ont abandonnés. Tous ces jeunes qui sortent de l’école et qui ne travaillent pas, toutes ces femmes qui cherchent des petits boulots. Il y a donc 10 à 12 millions de pauvres en Afrique du Sud. Alors, lorsque des populations pauvres arrivent pour travailler, cela crée des tensions. Jacqueline Derens
Une émission préparée par Mélanie Chalandon et Albane Barrau.
Références sonores
- En janvier 2016, le président burkinabé Roch Marc Christian Kabore donnait à entendre sa vision des relations avec la Côte d’Ivoire. (Africa 24, 03 janvier 2016)
- Mamadou Sanogo, président de la Communauté des Burkinabés de Côte d’Ivoire, explique au micro de la BBC combien les Burkinabés se sont impliqués dans différents domaines de l’économie ivoirienne. (BBC, 26 septembre 2019)
- Suite à la polémique concernant la notion d’ivoirité, Jean-Louis Billon, secrétaire exécutif chargé de la communication du PDCI affirmait en juin 2019 qu’il n’y avait ni ivoirité ni xénophobie en Côte d’Ivoire. (TV Monde, 11 juin 2019)
- En mai 2019 via la télévision de son parti, Henri Konan Bédié exprimait sa méfiance à l’égard des étrangers venus travailler dans la culture du cacao. (PDCI TV, 05 mai 2019)
- Alvan Akujinwa et Blessing Okwuouenye, tous deux commerçants nigérians, décrivent les scènes de violences qu’ils ont eu à subir à Pretoria et se demandent si un retour au Nigéria ne serait pas souhaitable. (TV5 Monde, 03 octobre 2019)
Références musicales
- « Mirage » de M. A. Beat ! (Label : Black Milk Music)
- « On dit quoi » du groupe Yodé et Siro (Label : UMG)
L'équipe
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