De Bali à Marawi, l'autre front du djihad : épisode • 4/4 du podcast Vingt ans de guerre contre le terrorisme

Une unité anti-bombe indonésienne et la police anti-terroriste de la Brigade Mobile se tient sur les lieux de l'attentat de la cathédrale de Makassar, le 28 mars 2021.
Une unité anti-bombe indonésienne et la police anti-terroriste de la Brigade Mobile se tient sur les lieux de l'attentat de la cathédrale de Makassar, le 28 mars 2021. ©AFP - IRVAN ABDULLAH
Une unité anti-bombe indonésienne et la police anti-terroriste de la Brigade Mobile se tient sur les lieux de l'attentat de la cathédrale de Makassar, le 28 mars 2021. ©AFP - IRVAN ABDULLAH
Une unité anti-bombe indonésienne et la police anti-terroriste de la Brigade Mobile se tient sur les lieux de l'attentat de la cathédrale de Makassar, le 28 mars 2021. ©AFP - IRVAN ABDULLAH
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Depuis l’attentat de Bali en 2002, l’Indonésie, jusqu’ici présentée comme un modèle de cohabitation entre les religions, entre sur la carte du terrorisme islamique. Depuis 20 ans, que s'est-il passé en Indonésie ? Quels sont les liens entre les mouvements islamistes indonésiens et le djihad global ?

Avec
  • Juliette Loesch Chercheuse sur les questions de sécurité et de défense en Asie du Sud-Est
  • Philippe Migaux Maître de conférences à Sciences Po, chercheur spécialiste de l’islam en Asie du Sud Est.
  • Rémy Madinier Chercheur au CNRS et à l’Institut d’Asie Orientale de l’ENS Lyon

En mars dernier, l’Indonésie était frappée par le terrorisme islamiste, avec l’attaque de la cathédrale de Makassar, où l’on déplore une vingtaine de blessés. Mais cette attaque n’est pas une première pour l’Indonésie : en octobre 2002, l'île touristique de Bali était le théâtre d’un attentat faisant plus de 200 morts, dont une majorité d’étrangers. Cet événement dramatique est le plus meurtrier de l’histoire du pays et a placé brutalement l’Indonésie sur la carte du djihad global. 

Jusqu’à cette attaque, l’Indonésie était présentée comme un modèle de cohabitation entre les religions. Organisée un an, un mois et un jour pile après le 11 septembre 2001, l’attentat de Bali fait écho à la tragédie qui avait secoué les Etats-Unis. Le président américain George Bush fait même de la région le second front de sa « guerre contre la terreur ».

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En vingt ans, comment l’Indonésie, troisième démocratie au monde et premier pays musulman, a géré l’émergence de l’islamisme radical et du terrorisme ? Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Et comment leurs racines plongent-elles dans l’histoire du pays ?

Entretien avec Rémy Madinier, chercheur au CNRS et à l’Institut d’Asie Orientale de l’ENS Lyon et Philippe Migaux, maître de conférences à Sciences Po, chercheur spécialiste de l’islam en Asie du Sud Est.

Le second attentat de Bali, en octobre 2005, touche des touristes indonésiens et notamment des javanais musulmans. A ce moment, l’opinion va basculer peu à peu et le travail du Densus 88, l’unité antiterroriste de la police indonésienne, va être grandement facilité par d’innombrables dénonciations. Cette unité arrive à démanteler des cellules terroristes avant qu’elles ne passent à l’action, il ne se passe pas un mois ou une semaine sans qu’une cellule ne soit démantelée. Philippe Migaux

A la fin des années 90, la décentralisation va entraîner une série de violences. Au départ ce n’est pas confessionnel, cela se joue sur l’attribution d’une mine d’or à un district plutôt qu’un autre. C’est à partir de 1999, avec l’arrivée de milices islamistes comme les Laskar Jihad, qui viennent depuis Java et sont composées d’anciens d’Afghanistan, qu’une ligne confessionnelle va s’établir dans les conflits. Rémy Madinier

Seconde partie - le focus du jour

Philippines, un djihadisme économique plus qu’idéologique

Les Philippines étaient au centre de l'attention en 2017, lorsque les groupes islamistes ayant prêté allégeance à Daesh prennent la ville de Marawi sur l'île de Mindanao dans le but de fonder leur califat. A la suite de cinq mois de combat, les forces étatiques sont parvenues à gagner la bataille contre les djihadistes. Un siège réussi pour les terroristes, notamment grâce aux nombreux jeunes qui ont rejoint les rangs de l’État islamique, souvent plus pour des raisons de précarité que d’idéologie.

Que représente la menace de l’État Islamique actuellement aux Philippines ? Quelles sont les raisons qui poussent les jeunes à la radicalisation ? Quelle politique est mise en place pour lutter contre le djihadisme ?

Une conversation avec Juliette Loesch, chercheuse sur les questions de sécurité et de défense en Asie du Sud-Est. 

Les facteurs de recrutements sont matériels mais également sociaux et familiaux. Le système dans lequel se développe ces groupes terroristes est familial, voire tribal, donc les injonctions à participer aux activités économiques, illicites ou illégales, du clan favorise l’endoctrinement et le recrutement des groupes terroristes. Il y a également un regain d’idéologie religieuse depuis 2015. Juliette Loesch

Décombres de la principale zone de combat de la ville de Marawi, dans le sud de l'île de Mindanao, le 1er avril 2018.
Décombres de la principale zone de combat de la ville de Marawi, dans le sud de l'île de Mindanao, le 1er avril 2018.
© AFP - TED ALJIBE

Une émission préparée par Lucas Lazo et Albane Barrau. 

Références sonores

  • Extrait  de la déclaration de Merdysiam, chef de la Police de Sulawesi du Sud,  peu après l’attentat devant la cathédrale de Makassar en mars dernier (France 24, 28 mars 2021)
  • Témoignage d’un habitant de Makassar qui a aidé une victime de l’attentat (AFP, 28 mars 2021)
  • Extrait de la conférence de presse de Listyo Sigit Prabowo, chef de la police  nationale, dans lequel il revient sur les deux auteurs de l’attentat  suicide de Makassar et les suspects arrêtés par la suite (AFP via l’INA,  29 mars 2021)
  • Témoignage  de deux touristes australiens peu après l’attentat de Bali qui a fait 182 morts et 132 blessés en octobre 202 (France 2, 13 octobre 2002)
  • Témoignage d’un ancien combattant de Daesh dans la région de Marawi aux Philippines qui revient sur les lieux des combats (Extrait du  documentaire « Philippine, les repentis de Marawi » de Gaël Mocaer diffusé sur Arte, 27 septembre 2019)

Références musicales 

  • « Walden 2 » de Pantha du Prince (Label : Kompakt)
  • « Badik » par le collectif indonésien T O D qui réinterprète des chants traditionnels indonésiens

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