

Dans quelle mesure le souvenir de Nelson Mandela peut-il expliquer la pérennité de l'ANC, régulièrement décriée mais jamais détrônée dans les urnes ? Au-delà de la politique politicienne, comment la mémoire de Madiba est-elle perçue aujourd’hui par les citoyens sud-africains ?
- Nestor Bidadanure intellectuel franco-burundais, Docteur en philosophie, écrivain et journaliste.
- Achille Mbembe Enseignant d’histoire et de sciences politiques à l’université sud-africaine Witwatersrand de Johannesburg
- Marianne Séverin Experte de l’Afrique du Sud au laboratoire Les Afriques dans le Monde (LAM) à Sciences Po Bordeaux
Une émission présentée par Mélanie Chalandon.
Cyril Ramaphosa était âgé de 37 ans ce 11 février 1990. C’est lui qui tenait le micro de Nelson Mandela au balcon de l’Hôtel de Ville du Cap, pour sa première allocution publique depuis sa libération, après vingt-sept années d’emprisonnement.
Trente ans plus tard, celui qui fut un temps le dauphin du grand homme est revenu marcher dans les pas de son illustre prédécesseur, devenant à son tour président de la nation arc-en-ciel.
Mais c’est un pays abimé par des années de corruption, l’aggravation des inégalités et la persistance de profondes divisions dont il a pris les rênes en 2018. Près de trois décennies après la fin de l’apartheid, les discriminations n’ont pas disparu, la xénophobie à l’égard des travailleurs immigrés venant s’ajouter aux anciennes plaies du racisme.
Tandis que les derniers compagnons de Mandela s’éteignent les uns après les autres, la mémoire de leur lutte devient moins évidente à transmettre.
Elle reste pourtant précieuse non seulement pour le pays, mais pour le monde entier - Mandela étant probablement, de toutes les figures que nous avons étudiées cette semaine, celle dont l’héritage est le plus universel.
La proximité que Cyril Ramaphosa avait dans sa jeunesse avec Nelson Mandela lui permettra-t-elle de renouer avec les valeurs qui étaient au coeur des combats de son mentor ?
Alors que l'ANC (Congrès national africain), parti historique, est empêtré depuis des années dans des scandales de corruption, est-ce encore l’aura de Mandela qui explique la pérennité de cette formation politique, régulièrement décriée en place publique mais jamais détrônée dans les urnes ?
Si elle demeure un modèle pour les dirigeants actuels, la figure de Mandela n’est-elle pas aussi un poids pour ses successeurs, condamnés à être jugés à l’aune de ce mythe indépassable ?
Une discussion en compagnie d'Achille Mbembe, philosophe, politologue et historien, professeur à l’université du Witwatersrand de Johannesburg, et de Marianne Séverin, politologue, chercheuse associée au laboratoire des "Afriques dans le Monde" (LAM) de Sciences Po Bordeaux.
Cyril Ramaphosa ne revendique pas l'héritage de Nelson Mandela comme l'aurait fait Jacob Zuma, mais il essaie dans ses actes de suivre les pas de Madiba en parlant d'union dans la population sud-africaine, en essayant d'apaiser les tensions au sein de son pays et au sein de l'ANC. Marianne Séverin
La mémoire de Nelson Mandela, en Afrique du Sud, ne se comprend aujourd'hui qu'en contre-reflet de celle de Winnie, son ex-épouse, qui représente un imaginaire politique très différent : plus décisif, plus radical, plus impliqué. Achille Mbembe
La demande de changement n'a pas disparu en Afrique du Sud. Elle est là, et elle dépasse le compromis postcolonial dans lequel l'ANC semble se satisfaire - une discours complaisant, lénifiant, de réconciliation, mais sans la justice. Achille Mbembe
On s'est aperçu que, depuis le début des années 2010, l'ANC s'est transformée en parti néo-colonial. On est passés d'un système où lorsqu'on est pour l'ANC, c'est pour défendre des idéaux, à une ANC où des groupes rivaux s'affrontent, et qui est fortement touchée par la corruption. Marianne Séverin
Seconde partie - le focus du jour
La « méthode Mandela » à l’étranger : un jeu gagnant au Burundi ?
Nelson Mandela n’effectue qu’un seul mandat à la tête de l’Afrique du Sud, invoquant l’âge comme facteur décisif dans ce choix – il rend d’ailleurs public son souhait de partir à la retraite et de se retirer dans son village natal de Qunu, au Transkei. Une retraite qu’il repousse finalement de quelques mois pour prendre fin 1999 les fonctions de médiateur dans la mise en place des accords de paix inter-burundais d’Arusha. Une intervention qui n’est pas anodine, tant idéologiquement que méthodologiquement, dans son approche de la paix sur le continent africain.
Avec Nestor Bidadanure, intellectuel franco-burundais, docteur en philosophie, écrivain et journaliste. Auteur du livre N’éteignez pas la lumière (éditions Naïve, 2014), livre de réflexion sur la pensée de Nelson Mandela.

Références sonores
- Extrait du discours de Nelson Mandela lors de sa libération de prison le 11 février 1990 (Libération)
- Extrait du discours de Cyril Ramaphosa au balcon de l’Hôtel de Ville du Cap, pour commémorer le discours historique de Neslon Mandela de 1990 (Twitter, 11 février 2020)
- Extrait du discours d’investiture à la présidence de l’Afrique du Sud de Neslon Mandela, le 27 avril 1994 (Libération)
Références musicales
- « Cultural Unity » du groupe sud-africain Black Motion (Label : Ocha records)
- Jerusalema, composée et écrite en zoulou par Nomcebo Zikode et produite par le dj sud-africain Master KG.
L'équipe
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