Loin de l’image de non-violence auquel l’associent les Occidentaux, le bouddhisme prend dans certains pays d’Asie du Sud-Est le visage d’une religion hégémonique hostile aux autres cultes.Comment le discours de haine porté par les nationalistes bouddhistes s’articule-t-il avec la religion ?
- Eric Paul Meyer Historien, chercheur au CNRS, spécialiste du Sri Lanka
- Bénédicte Brac de la Perrière Ethnologue, spécialiste de la Birmanie, chercheuse au CNRS – CASE (Centre Asie du Sud-Est).
- Barbet Schroeder Cinéaste
Loin de l’image de non-violence et d’ouverture auquel l’associent presque toujours les Occidentaux, le bouddhisme prend dans certains pays d’Asie du Sud-Est le visage d’une religion hégémonique hostile aux autres cultes.
C’est le cas en Birmanie, où les rohingyas musulmans sont depuis longues années victimes de persécutions, mais aussi au Sri Lanka, où le nationaliste Gotabaya Rajapaksa, frère de l’ancien dirigeant Mahinda Rajapaksa, a remporté les élections en novembre dernier, s’appuyant notamment sur les discours de moines radicaux.
De Rangoun à Colombo, la même rhétorique est à l’œuvre : le bouddhisme serait menacé, et ses adeptes comme les dirigeants des pays où il est majoritaire ont le devoir de le protéger, s’il le faut par la violence.
Ce discours a servi différents combats à travers l’histoire, de la lutte pour l’indépendance de la Birmanie dans la première moitié du XXe siècle, à la guerre civile contre les séparatistes Tamouls au Sri Lanka au tournant du XXIe.
Mais aujourd’hui, dans un pays comme dans l’autre, c’est contre les musulmans qu’il se tourne prioritairement.
Au Sri Lanka, le nationalisme bouddhiste est d’ailleurs monté en puissance depuis l’attentat djihadiste perpétré en avril dernier contre des églises chrétiennes et des hôtels de luxe.
Alimentant une psychose très proche de celle du « grand remplacement » développée par l’extrême-droite européenne, les bouddhistes radicaux poussent à l’adoption de lois, notamment matrimoniales, visant à éviter le développement démographique de l’islam dans la région.
Comment le discours de haine porté par les nationalistes birmans et sri-lankais s’articule-t-il avec les principes de non-violence professés par le bouddhisme ?
Pourquoi cible-t-il en particulier les musulmans ? Dans quelle mesure s’inscrit-t-il au sein d’un ensemble plus large de tensions interconfessionnelles, dans ces pays multiethniques ?
Les séparatistes tamouls n'étaient pas du tout animés par un esprit religieux.Eric Paul Meyer
Wirathu fait partie d'une génération de moine qui a cherché les voies d'une plus grande autonomie dans un contexte où l'ordre religieux avait été verrouillé et contrôlé**. Bénédicte Brac de la Perrière**
Le Vénérable W
Wirathu appelait son anti-islamisme du nationalisme. Barbet Schroeder
Extraits sonores :
- Gala Aththe Gnanasara et Dilanthe Withanage, membres de l’organisation srilankaise extrémiste et xénophobe « Bodu Bala Sena » (Extrait de reportage + micro trottoir diffusé dans l’émission « Quotidien », 15 mai 2019)
- En Birmanie, Thaw Parka, un porte-parole du Ma Ba Tha, mouvement de moines boudhistes extrémistes « les terroristes posent des bombes partout dans le monde… nous craignons qu’ils ne détruisent notre héritage ethnique » (CNN, 17 novembre 2017)
- Le 02 avril 2012, au siège de la Ligue nationale pour la démocratie, Aung San Suu Kyi fait son premier discours après les élections parlementaires de Birmanie.
- Le 28 janvier 1947 Aung San, général leader nationaliste de Burma, confère avec les membres du cabinet londonien à Downing Street en vue de l'indépendance de la Birmanie (Archive INA, 28 janvier 1947)
- Extrait film « Le Vénérable » de Barbet Shroeder (2017)
Extrait musical :
- Musique de fin : « A Yaw-eu Nui Ga » du chanteur et guitariste birman Tsa Le (autoproduit)
Une émission préparée par Margaux Leridon.
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