

Trois jours après la sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris, Joe Biden - qui a promis de le réintégrer dès le début de son mandat - est élu. Mais derrière ce volontarisme, que propose-t-il concrètement pour amorcer la transition écologique du premier producteur d'hydrocarbures au monde ?
- Maya Kandel Historienne, spécialiste de la politique étrangère américaine, et chercheuse associée à l'Université Sorbonne Nouvelle Paris 3
- Gelareh Yvard-Djahansouz professeure d’histoire et de civilisation américaine à l'Université d'Angers
- Sophie Méritet maîtresse de conférences en sciences économiques à l'Université Paris-Dauphine, chercheuse au Centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières (CGEMP).
Le 4 novembre 2020, le candidat Joe Biden twittait : “Aujourd’hui, l'administration Trump quitte officiellement l’accord de Paris sur le Climat. Et dans exactement 77 jours, une administration Biden le rejoindra.”
Ce jour-là, la procédure de sortie de l’accord de Paris engagée par Trump, promesse de 2016, s’achevait. Le 7 novembre, Joe Biden est élu 46e Président des Etats-Unis, et annonce que dès son investiture en janvier, le pays rejoindra de nouveau l’accord, redonnant du souffle à la coopération mondiale pour maintenir l’élévation de la température globale en dessous des deux degrés, ce qui impliquerait pour les Etats-Unis de diminuer de 28% ses émissions de gaz à effets de serre d’ici 2025.
Dès son élection, Joe Biden se place en défenseur de l’environnement, notamment en nommant John Kerry au poste inédit de “représentant spécial des Etats-Unis pour le climat” : un choix très symbolique, puisque c’est lui-même qui a signé en 2015 cet accord. Par ce choix, il semble que Biden veuille replacer les Etats-Unis comme leaders dans la prise en compte des questions environnementales. Dans sa politique intérieure, son “Plan pour une révolution de l’énergie propre et pour une justice environnementale” prévoit un budget de 1700 milliards de dollars sur 10 ans, pour atteindre le 0 émissions de gaz à effets de serre en 2050.
Cette politique aurait l’ambition de compenser l’hostilité de Donald Trump aux réglementations environnementales, son climato-scepticisme, sa défense du charbon et des énergies fossiles. Sur ce dernier point, Joe Biden reste pourtant ambigu : en effet, difficile pour les Etats-Unis, premier producteur de pétrole au monde, de mener une politique contre les énergies fossiles. Sans compter que le secteur compte 10 millions d’emplois dans le pays.
En plus de cela, l’action du nouveau Président est pour l’instant suspendue aux élections qui se tiendront en janvier en Géorgie, et qui détermineront la couleur politique du Sénat : s’il reste Républicain, les décisions du nouveau Président, notamment en matière environnementale, se trouveront entravées.
Dans ce contexte, quelle peut être la marge de manœuvre de Biden et Kerry pour appliquer leur programme environnemental ambitieux ? Dans quelle mesure le détricotage par Trump de la politique climatique et sa promotion des énergies fossiles sont-ils rattrapables à court terme ? La présence de John Kerry est-elle une garantie suffisante pour rassurer les partenaires internationaux dans l’accord de Paris, alors que le pays est si inconstant sur ces questions ?
Une discussion en compagnie de Maya Kandel, historienne des Etats-Unis, chercheuse à l'Université Sorbonne Nouvelle, et de Sophie Méritet, maîtresse de conférences en sciences économiques à l'Université Paris-Dauphine.
Joe Biden a d'ores et déjà annoncé que John Kerry aurait une place au sein du Conseil de Sécurité de la Maison Blanche - l'organe central qui détermine les grandes orientations de la politique étrangère des Etats Unis et qui harmonise l'action de toutes les différentes agences gouvernementales. C'est une manière d'impliquer le climat dans toutes les grandes questions exécutives. Maya Kandel
La mère des batailles écologiques, aux Etats-Unis, c'est le désinvestissement des énergies fossiles. Joe Biden veut faire une transition progressive des industries des hydrocarbures vers les énergies renouvelables, mais ne peut pas, aujourd'hui, se passer du gaz et du pétrole. Sophie Méritet
Seconde partie - le focus du jour
Le Green Party américain, un obstacle à une politique environnementale ?
Dans les années 1980, alors que le Président républicain Ronald Reagan tente de revenir sur nombre de réglementations environnementales, un groupe veut prendre le contre-pied des traditionnelles associations de militants écologistes, en portant des revendications écologistes et socialistes lors des scrutins des présidentielles.
Bien qu’il ne comptabilise que très peu de pourcentage de voix (moins de 1%), son poids se fait ressentir dans certaines élections. Notamment, lors de l’élection de 2000, qui opposait George Bush à Al Gore, défenseur de l’environnement, le Green Party, représenté par Ralph Nader, remporte 0,7% des voix - mais il fait surtout basculer le scrutin en Floride, Etat où s’est jouée l’élection. Retour sur la création de ce parti pour comprendre comment il a pu influencer la politique américaine.
Avec Gelareh Djahansouz-Yvard, professeure d’histoire et de civilisation américaine à l'Université d'Angers, spécialiste de l’histoire du mouvement écologique américain, de l’écologie et de l’écologisme aux Etats-Unis.

Références sonores
- Le 1er juin 2017, Donald Trump annonçait le retrait des Etats-Unis de l’Accord de Paris sur le climat (France 3, 1er juin 2017)
- Extrait d’un clip de campagne de Joe Biden dans lequel il affirme que l’une des premières choses qu’il fera une fois élu sera de rejoindre l’Accord de Paris
- John Kerry à propos de sa nomination au poste de représentant spécial pour le climat (Compte Twitter de John Kerry, 24 novembre 2020)
- Dans l’ouest du Texas, la crise touche durement l’industrie pétrolifère. On entend successivement Mark C. Carr, producteur de pétrole et président de la Republic Oil & Gas company, puis Craig Stoker, membre de la banque alimentaire West Texas Food Bank (Extrait du reportage de C dans l’air, 11 novembre 2020)
- Extrait de la présentation du programme du Green Party par son représentant aux dernières élections présidentielles, Howie Hawkins (Washington Journal, 24 octobre 2020)
Références musicales
- « Zaman (Original Mix) » de BiGz & Soire Feat. Haris Kate (Label : Wind Horse records)
- « Green is blue » de Neil Young (Label : Reprise records)
L'équipe
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