Inflation des salaires, bulle spéculative du marché des transferts et dépendance aux droits télévisuels : la pandémie accélère une crise qui refuse de dire son nom depuis plusieurs années dans le milieu du football international. Le business model du football est-il capable de se remettre en cause ?
- Pierre Rondeau économiste français, spécialiste de l'économie du sport et de l'économie du football, co-directeur de l'Observatoire Sport et Société à la Fondation Jean Jaurès, professeur à la Sports Management School et chroniqueur à Slate
- Wladimir Andreff Professeur honoraire à l'Université Paris 1, Président du Conseil scientifique de l'Observatoire de l'économie du sport
- Matthieu Llorca Maître de conférences en économie à l’université de Bourgogne Franche-Comté, Laboratoire d’économie de Dijon (LEDi).
Une émission présentée par Mélanie Chalandon.
Jamais, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, le milieu du football n'avait connu un tel bouleversement. Après l'interruption brutale des championnats du printemps, puis la reprise d'une partie des compétitions, la situation reste incertaine et surtout inédite. Des matchs à huis clos sans supporters, des rencontres susceptibles d'être reportées à tout moment en cas de joueurs malades.
Un vent de panique souffle sur la planète football. Car si la pandémie cause des dégâts, elle accélère également une autre crise qui refuse de dire son nom depuis plusieurs années : celle de l'inflation des salaires, de la bulle spéculative du marché des transferts et de l'hyper-dépendance aux droits télévisuels. Certains clubs sont aujourd’hui au bord de la faillite, à l’instar de l’équipe lilloise revendue cette semaine à un fond d’investissement.
Début décembre, Mediapro, la société qui détenait les droits de diffusion des ligues 1 et 2 du championnat français s'est déclarée dans l’incapacité de payer. Un fiasco qui révèle aux yeux du monde les failles d'un système toujours plus avide de rentrées d'argent mais incapable de tenir ses comptes à l’équilibre.
L’économie du football est déconnectée du réel, ce n’est pas nouveau, mais pour la première fois, peut-être, ses acteurs sont en train d’en prendre conscience.
Alors quel avenir pour le football professionnel en Europe ? La crise sera-t-elle propice aux remises en question et à la réforme d’un modèle plus fragile qu’on ne le pensait ? Faut-il instaurer davantage de régulation ? Voir même des mécanismes de solidarité entre petits et grands clubs ?
Une discussion en compagnie de Wladimir Andreff, professeur émérite à l'Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, président du Conseil scientifique de l'Observatoire de l'économie du sport, et de Pierre Rondeau, économiste, spécialiste de l'économie du sport et de l'économie du football, co-directeur de l'Observatoire Sport et Société à la Fondation Jean Jaurès, professeur à la Sports Management School.
Toutes les crises qui s'accumulent aujourd'hui ne font que rajouter des handicaps aux clubs de football, déjà lourdement atteints par des problèmes de gestion comptable, de pérennité comptable. La question est de savoir si demain, lorsque la crise sanitaire s'arrêtera, il y aura toujours des investisseurs auprès des clubs inquiétés. Pierre Rondeau
Il faut moderniser non seulement le football européen, mais aussi ses régulations, comme le fair-play financier. Mais les régulateurs sont sous une pression extrêmement forte de ce que je qualifie d'oligopole des plus grands clubs de football européens. Ces quelques clubs raflent toutes les mises, toutes les victoires. Ils provoquent, en Europe, un déséquilibre compétitif mais également économique. Wladimir Andreff
Seconde partie - le focus du jour
La Chine, nouvel eldorado du foot mondial ?
Si la Chine est réputée pour ses redoutables joueurs de tennis de table et ses gymnastes, Xi Jinping, supporter inconditionnel de Manchester United, a décidé de faire de son pays une grande Nation du football à l’horizon 2030, caressant le rêve d'un jour remporter la Coupe du Monde.
Ce volontarisme politique a donné lieu à des investissements massifs dans le domaine, mais il semblerait pourtant que dans un contexte de guerre économique avec les Etats-Unis, de retour en force du protectionnisme, et de pandémie mondiale, le football chinois atteigne l’âge de raison. Comment expliquer ce revirement brutal de la stratégie de développement du football en Chine ?
Avec Matthieu Llorca, maître de conférences en économie à l’université de Bourgogne Franche-Comté, Laboratoire d’économie de Dijon (LEDi).
Il y a eu un changement de trajectoire en Chine, concernant les investissements, notamment dans le secteur du football. On lutte désormais contre les sorties de capitaux - jugées irrationnelles, spéculatives - pour se concentrer sur des opérations d'investissements stratégiques dans des chantiers infrastructurels. Matthieu Llorca
Une émission préparée par Lucas Lazo.
Références sonores
- Gianni Infantino, Président de la FIFA « health comes first » - Reuters, 10 avril 2020
- Aleksander Ceferin, président de l’UEFA – Associated Press, 17 mars 2020
- Christophe Galtier, entraîneur du LOSC - Conférence de presse d'avant-match,12 décembre 2020
- Aleksander Ceferin, président de l’UEFA - AFP, 14 août 2020
- Xi Jinping - France 24 « Football : l'empire chinois contre-attaque », 14 juillet 2017
Références musicales
- « Sabrosa », des Beastie Boys (label : Capitol)
- « Can 2002 » de Neba Solo (label : Believe Music)
L'équipe
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