Julian Assange, la Némésis de l’Amérique : épisode • 4/4 du podcast Prisonniers politiques

Un manifestant déguisé en Statue de la Liberté tient une pancarte en soutien à Julian Assange devant la Cour Royale de Justice à Londres, le 11 août 2021.
Un manifestant déguisé en Statue de la Liberté tient une pancarte en soutien à Julian Assange devant la Cour Royale de Justice à Londres, le 11 août 2021. ©AFP - JUSTIN TALLIS
Un manifestant déguisé en Statue de la Liberté tient une pancarte en soutien à Julian Assange devant la Cour Royale de Justice à Londres, le 11 août 2021. ©AFP - JUSTIN TALLIS
Un manifestant déguisé en Statue de la Liberté tient une pancarte en soutien à Julian Assange devant la Cour Royale de Justice à Londres, le 11 août 2021. ©AFP - JUSTIN TALLIS
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Julian Assange, fondateur de Wikileaks, est traqué depuis plus d’une décennie par les Etats-Unis, où il encourt une peine de 175 ans de prison pour espionnage.

Avec
  • Amaelle Guiton Journaliste à Libération, spécialiste des enjeux numériques.
  • Jean-Philippe Foegle Doctorant en droit public, spécialiste de l'encadrement juridique des lanceurs d'alerte, coordinateur de la Maison des lanceurs d’alerte
  • Julien Nocetti Enseignant-chercheur à l'Académie militaire de Saint-Cyr, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri) et directeur de la chaire Risque cyber à la Rennes School of Business

Icône de la liberté d’expression persécutée pour certains, dangereux terroriste high-tech pour d’autres, le fondateur de Wikileaks s’est rendu célèbre en 2010 en publiant plusieurs centaines de milliers de documents diplomatiques américains classés secret-défense. Cela lui a valu la colère de l’administration américaine, qui ne s’est toujours pas apaisée depuis.

S’il a pu échapper aux poursuites américaines en trouvant asile sept années durant à l’ambassade d’Equateur de Londres, Julian Assange a perdu son statut de réfugié politique en 2019 et vit depuis en détention à la prison de Belmarsh, en Grande-Bretagne, en attendant une potentielle extradition aux Etats-Unis.

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Si le cas de Julian Assange questionne les frontières ténues entre droit à l’information et raison d’Etat ainsi que la latitude à accorder à ces lanceurs d’alerte qui évoluent en zone grise, il révèle aussi des lignes de fracture géopolitiques.

De la Russie aux USA, comment les Etats ont-ils accueilli l’émergence d’un contre-pouvoir de l’ampleur de Wikileaks ? Comment ce média subversif a-t-il parfois servi leurs intérêts ? Comment ont-ils reconsidéré leur rapport au secret-défense, aux journalistes et aux activistes ? Qu’ont fait les lanceurs d’alerte à nos démocraties ?

Une inculpation sur la base d’une loi sur l’espionnage pour l’obtention, la détention et la divulgation d’informations secret-défense peut toucher n’importe quel média. Ainsi, de grands médias qui ont pu être extrêmement critiques de Wikileaks disent aujourd’hui qu’il ne faut pas qu’Assange soit extradé, car c’est un précédent en matière de liberté de la presse. Amaelle Guiton 

Quand les fuites sont le principal moyen par lequel les citoyens sont informés, cela signifie souvent que la protection des lanceurs d’alerte n’est pas suffisante. Jean-Philippe Foegle

Florian Delorme reçoit Amaelle Guiton, journaliste spécialiste des enjeux numériques pour Libération, et Jean-Philippe Foegle, doctorant en droit public à l’université de Nanterre, chargé de plaidoyer à la Maison des lanceurs d’alerte et auteur d’une thèse sur l’encadrement juridique de ce statut.

Seconde partie : le focus du jour

Quand les fuites de données modèlent la cyberstratégie russe

Ecran du Service ukrainien de sécurité à Kiev le 6 mars 2019 lors d’un exercice de cybersécurité UE-Ukraine avant les présidentielles ukrainiennes.
Ecran du Service ukrainien de sécurité à Kiev le 6 mars 2019 lors d’un exercice de cybersécurité UE-Ukraine avant les présidentielles ukrainiennes.
© AFP - Sergei SUPINSKY

Dès les révélations de Wikileaks dans les années 2010, Julian Assange est soupçonné d’être un agent à la solde de la Russie. Depuis, si aucun lien direct n’a été établi entre le fondateur de Wikileaks et le Kremlin, la panique occidentale générée par ces révélations a fait des fuites de données un levier majeur de la stratégie informationnelle russe. Comment l’épisode des Wikileaks a-t-il modelé la cyber stratégie russe et quelle bataille symbolique se joue dans le cyber espace ? D’Edward Snowden à Julian Assange, comment les lanceurs d’alerte peuvent-ils être utilisés par le Kremlin ? 

Les exploitations les plus massives de la part Russie se sont faites dans l’étranger proche, car il y a une connaissance beaucoup plus étroite des failles, que ce soit en Ukraine, en Biélorussie ou dans le Caucase. Julien Nocetti

Avec Julien Nocetti, chercheur au centre GEODE (Géopolitique de la datasphère, Université Paris 8), professeur à Saint-Cyr Coetquidan, directeur de la chaire Cybersécurité à Rennes School of Business. 

Références sonores

  • Extrait de « Collateral Murders », une vidéo filmée depuis un hélicoptère Apache qui montre les bavures de l’armée américaine engagée en Irak en 2007. Elle a été transmise par Chelsea Manning à Wikileaks en 2010 (Le Point, 2016)
  • En mars 2015, Julian Assange affirmait dans une interview donnée à la RTS que Wikileaks s’apparentait à une révolution comparable à celle de l’imprimerie au temps de la Réforme (RTS, interviewé par Darius Rochebin, 16 mars 2015)
  • En décembre 2010, Joe Biden, alors vice-président des Etats-Unis, qualifiait Julian Assange de “terroriste high-tech” (ABC News Australia, 19 décembre 2010)
  • En septembre 2020, lors d’une manifestation en soutien à Julian Assange devant le tribunal de Westminster à Londres, Kristinn Hrafnsson, rédacteur en chef actuel de Wikileaks, s’exprimait sur la liberté d’expression fortement compromise selon lui dans le monde (Arte reportage, 30 juin 2021)
  • Lors d’un débat télévisé avec Donald Trump pendant la campagne des présidentielles de 2016, Hillary Clinton dénonçait le biais russophile de Wikileaks (CNBC, 20 octobre 2016) 

Références musicales

  • « New Seeds » de Boards of Canada (Label : Warp)
  • « Free Julian Assange » de Francisco Herrera and Dennis Bernstein (Label : Autoproduit)

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