

Elections européennes obligent, les médias devront se soumettre aux règles édictées par le CSA afin de rendre compte de la pluralité des idées politiques. Des règles de plus en plus complexes à mettre en œuvre. Où placer le curseur entre contrainte médiatique et contrainte démocratique ?
Michèle Léridon (membre du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, présidente du groupe de travail "Droits et libertés, pluralisme et déontologie", journaliste, ancienne directrice de l'Information de l'AFP), Alexis Lévrier (maître de conférences à l'Université de Reims, et chercheur associé au Celsa, spécialiste de l’histoire du journalisme.), Catherine Nayl (Directrice de l'information de France Inter).
Ils n’étaient pas invités mais ils ont réussi à forcer l’entrée. Benoit Hamon, Florian Philippot et François Asselineau ont finalement débattu jeudi dernier sur France 2 et France Inter, avec neuf autres têtes de listes des prochaines élections européennes. Saisi en référé, le tribunal administratif de Paris leur avait donné raison quelques jours plus tôt, au nom du respect du pluralisme.
Cette décision (contestée ensuite par le Conseil d’Etat) crée un précédent. Elle autorise désormais n’importe quelle formation politique à se tourner vers les tribunaux, si celle-ci estime qu’elle n’est pas traitée médiatiquement de manière équitable. Les juges pourraient ainsi finir par se substituer à l’instance de régulation de l’audiovisuel, le CSA, lequel est pourtant là pour faire respecter les règles du pluralisme.
A vrai dire, la question n’est pas nouvelle.
Elle se pose à chaque période électorale désormais : comment faire en sorte que les candidats soient traités de manière à ce qu’ils aient des chances identiques le jour du scrutin, tout en tenant compte du poids politique de chacun ? Une quadrature du cercle d’autant plus difficile à aborder que les médias font l’objet d’une défiance de plus en plus forte, du fait de leurs liens avérés ou supposés avec le pouvoir politique.
"Faut-il imposer le pluralisme aux médias ?"
Vidéos :
Michèle Léridon :
La règle d’or, c’est l’équité. On ne parle pas d’égalité pure dans le sens où il faut quand même tenir compte de la représentativité de chaque groupement et de chaque personnalité.
Alexis Lévrier :
A chaque élection, il y a un fantasme qui est utilisé par les leaders de l’opposition qui consiste à dire que les médias publics sont aux ordres du pouvoir.
Catherine Nayl :
Même si nous devons être sur le respect du pluralisme - nous avons tous des cahiers des charges et des chartes que nous avons signés, des engagements auprès du CSA -, moi j’estime que l’on a aussi un devoir par rapport aux gens qui nous écoutent : celui de faire notre travail le plus clairement pour leur apporter un certain nombre de réponses à des idées.
Liens :
- À l’issue de la réflexion engagée après les élections de 2017, le CSA a adopté de nouvelles règles. Elles sont appliquées depuis le 1er janvier 2018.
- Débat des européennes sur France 2 : peut-on vraiment débattre à douze ?, Marianne, 04/09/2019.
- « Hamon et les autres sur France 2 : les coulisses d'un bras de fer », par Manuel Vicuña, Arrêt sur images, 03/04/2019 (article payant).
- Twitter a refusé une pub du gouvernement français, afin de respecter la loi « relative à la manipulation de l’information », Le Monde, 02/04/2019.
- "Temps de parole : dans les secrets du CSA", enquête de Marie-Amélie Lombard-Latune, Le Figaro, 29/03/2017.
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