- François Terré
- Hélène Franco
- Jérôme Frantz
- Emmanuel Rosenfeld
Les discours du Président de la République et de la Garde des Sceaux ont le mérite de ne pas être ambigus. Tous deux veulent lutter contre un «risque pénal excessif » qui affecterait le monde des affaires. Quand Nicolas Sarkozy rend visite aux patrons, fin août (puis qu'une semaine après, il célèbre le Bicentenaire du Code du Commerce) le chef de l'Etat rappelle combien il souhaite rendre aux Français le goût d'entreprendre. Mais comment cela est-il possible si « la moindre erreur de gestion conduit en prison ? » s'indigne le locataire de l'Elysée. Et de s'en prendre à la « guerre judiciaire sans merci » qui découragerait les bonnes volontés patronales. De son côté Rachida Dati s'inquiète de ces risques de sanction pénale qui « pèsent » - dit-elle- sur « l'attractivité économique de la France - et sont un frein à son développement ». Le 4 octobre la Ministre de la Justice installe donc un groupe de travail chargé de réfléchir à un toilettage du droit pénal des affaires. En pleine tourmente EADS - alors que des soupçons de délits d'initiés se précisent - en plein scandale de l'UIMM - (il ne s'agit certes pas d'une entreprise mais d'une association patronale, il n'empêche que les millions d'euros versés laissent planer bien des doutes) cette volonté gouvernementale de limiter les risques judiciaires susceptibles de s'abattre sur la tête du patronat fait beaucoup jaser. Magistrats, avocats, chefs d'entreprise, s'emparent de la future réforme. Qui pour dénoncer un droit des affaires effectivement trop touffu qui toucherait d'une façon identique le responsable d'une petite PME et le capitaine d'une énorme industrie. Faisant un tri sommaire entre les patrons-voyous/ et des gestionnaires imprudents mais de bonne foi. Pour ces défenseurs d'une réforme, la justice civile serait plus efficace et rapide. Elle devrait suffire à sanctionner les contrevenants. D'autre en revanche rappellent que les patrons français sont « bien rarement » inquiétés. En 2005 sur les plus de 600 000 condamnations prononcées au pénal : 0,5% seulement auraient concerné des litiges commerciaux. Il est également exceptionnel de retrouver, chez nous, un patron en prison. A l'inverse des Etats-Unis où un scandale comme Enron condamne l'ancien numéro 2 à passer 24 ans derrière les barreaux. Trop sévères pour les uns, trop laxiste pour les autres peut-être faut-il effectivement réformer le droit pénal des affaires. Mais de quel côté le curseur doit-il pencher ? Peut-on alléger raisonnablement les risques pesant sur le patronat - quand le gouvernement prône la tolérance zéro à propos les petits délinquants et instaure des peines planchers automatiques, qui peuvent envoyer un voleur de pommes durablement à l'ombre ?
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