Risque-t-on un gouvernement des juges ?

France Culture
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Avec
  • Nicolas Leron Président du think tank EuroCité et du site de critiques Nonfiction, chercheur associé au Centre d'études européennes de Sciences Po
  • Anne-Marie Le Pourhiet Juriste, spécialiste de droit constitutionnel, professeur de droit public à l'université de Rennes 1
  • Denys de Béchillon Professeur de droit à l’Université de Pau Membre du think tank le club des juristes Ancien membre du comité Balladur (2007) sur la révision de la Constitution

Le gouvernement des juges ? On y entend sans peine une expression « repoussoir », l’idéal démocratique s’incarnant pour la plupart des esprit dans l’élection au suffrage universel. Pourquoi un gouvernement ou un Parlement légitimes démocratiquement se verraient opposer des décisions de la part de juges qui, eux, ne sont pas des élus du peuple ?

Mais le pouvoir des juges peut représenter un espoir pour ceux qui voient dans des lois actuelles ou dans leurs applications, des limites, des injustices ou des sources d’inégalités ! Exemple ? Presque plus personne ne l’ignore c’est à la QPC, question prioritaire de constitutionalité et donc à une décision des Juges du conseil constitutionnel que l’on doit en partie le fait que la Garde à vue vienne d’être réformée– réforme qui a fait la quasi unanimité politique

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Petite piqûre de rappel depuis le 1er mars de 2010 la QPC permet à tout justiciable de contester la constitutionnalité d’une loi devant le Conseil constitutionnel

Et on observe que le Conseil constitutionnel est très sollicité : 458 demandes depuis l’institution de la QPC le 1er Mars 2010…

Doit-on y voir un des aspects de la judiciarisation de la vie publique ?

Il y a 3 jours concernant le mariage homosexuel le Conseil rappelait « qu’il n’avait pas à se substituer au législateur dans les choix de société, mais qu’il se contente de s’assurer que ce dernier, en faisant son œuvre, ne porte pas atteinte aux droits et libertés garanties par la Constitution. »

Donc un gouvernement des juges nous n’y sommes pas encore, c'est le Conseil constitutionnel qui nous le garantit ! Mais on peut tout de même s’interroger sur le nombre de saisines des hautes instances, pour des motifs très très divers qui concernent le droit social, électoral, commercial, des affaires de pensions, de propriété, de familles...

Et les citoyens et leurs avocats se tournent de plus en plus vers des instances supra nationales comme la Cours européenne de Justice ou la Cour européenne des droits de l'homme.

Alors au regard de ces demandes peut on penser qu’il y a une tentation de la société, un risque présent ou futur de voir le pouvoir politique limité par des juges non élus au suffrage universel ?

Et si les juges avaient davantage de pouvoir quelle légitimité pourrait-il invoquer et quelles limites un État démocratique devrait-il leur fixer ?

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