L'âme éthique du consommateur : épisode 3/3 du podcast L’économie, une science immorale ?

En mars 2020 a été lancée une campagne de boycott contre Zara et plus de 80 marques dont les produits sont fabriqués dans des usines chinoises où les Ouïghours sont réduits au travail forcé.
En mars 2020 a été lancée une campagne de boycott contre Zara et plus de 80 marques dont les produits sont fabriqués dans des usines chinoises où les Ouïghours sont réduits au travail forcé. ©AFP - LOIC VENANCE
En mars 2020 a été lancée une campagne de boycott contre Zara et plus de 80 marques dont les produits sont fabriqués dans des usines chinoises où les Ouïghours sont réduits au travail forcé. ©AFP - LOIC VENANCE
En mars 2020 a été lancée une campagne de boycott contre Zara et plus de 80 marques dont les produits sont fabriqués dans des usines chinoises où les Ouïghours sont réduits au travail forcé. ©AFP - LOIC VENANCE
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Le boycott contre les marques qui s’approvisionnent en Chine dans des usines où les Ouïghours sont réduits au travail forcé est un nouveau symptôme de la prise de conscience par le consommateur des conséquences sociales, environnementales et politiques de son acte d’achat.

Avec
  • Bernard Ruffieux Professeur à l’université Grenoble INP Génie Industriel et membre du laboratoire GAEL, spécialiste en économie comportementale et des techniques expérimentales
  • Benoît Heilbrunn Professeur de marketing à l’ESCP Business School.

En mars 2020, une campagne de boycott est lancée contre Nike, Apple, et plus de 80 autres marques dont les produits sont fabriqués dans la province du Xinjiang, dans des usines où les Ouïghours, minorité musulmane chinoise, sont réduits au travail forcé. Beaucoup de grandes marques ont décidé en 2020 et début 2021 de ne plus s’approvisionner en coton du Xinjiang. La Chine a donc répondu à son tour, un an plus tard, en mars 2021, par une campagne de boycott contre ces géants de la mode. Face à l’ampleur exceptionnelle de ce boycott, les marques sont prises en étau entre leur crédibilité dans le monde occidental et l’importance du marché chinois pour leurs ventes.

La morale consommatoire est toujours au carrefour d'initiatives individuelles et d'initiatives collectives : c'est pour cette raison que la dimension politique et militante doit passer cette intersection. - Benoit Heilbrunn

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Comment expliquer que les consommateurs se soucient, aujourd’hui plus que jamais, des conditions de production des produits qu’ils achètent ? L’acte de consommation est initialement un acte purement égoïste au sens économique : c’est un arbitrage rationnel entre le prix du bien ou du service et ses qualités et le montant disponible à dépenser de l’argent afin que ce dernier satisfasse ses désirs personnels.

On n'a jamais eu autant de diversité de l'offre donc la question de la morale a une acuité particulière aujourd'hui. D'autant plus qu'elle n'a jamais été aussi présente dans la différenciation des produits. [...] Ce qui nous intéresse en tant qu'économistes, c'est la valeur de cette dimension morale offerte par le producteur. - Bernard Ruffieux

Pourtant, pour des raisons environnementales, sociales et politiques, la montée en puissance des considérations écologiques et sociales constitue l’un des faits marquants de ces trois dernières décennies dans la sphère économique en général, et plus particulièrement dans le domaine de la consommation. Et la crise du Covid a accéléré, comme beaucoup de tendances déjà sous-jacentes, cette prise de conscience environnementale.

Les pouvoirs publics, par l’incitation et la coercition, et les entreprises, ont évidemment un rôle à jouer dans les évolutions “morales” des conditions de production, mais la pression de la demande de morale par le consommateur est un des leviers les plus efficaces également. L’engouement que l’on observe depuis une trentaine d’années pour une consommation plus responsable, donc plus “morale”, de la part des consommateurs, constitue-t-il un véritable bouleversement ? Pour en parler, nous avons fait appel à Bernard Ruffieux, professeur à l’université Grenoble INP Géni Industriel et membre du laboratoire GAEL et Benoit Heilbrunn, professeur de marketing à l’ESCP Business School.

Entendez-vous l'éco ?
58 min

Références sonores

Références musicales

  • "Lost in the Supermarket" - The Clash
  • "Géranium" - Odezenne

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