Peur sur le marché de l'emploi : épisode • 2/3 du podcast Nouvelle économie des migrations

Depuis l’afflux sans précédent de plus d’un million de migrants arrivés en Europe en 2015, fuyant pour la plupart la guerre et l’insécurité, les arrivées ont diminué de manière continue.
Depuis l’afflux sans précédent de plus d’un million de migrants arrivés en Europe en 2015, fuyant pour la plupart la guerre et l’insécurité, les arrivées ont diminué de manière continue. ©Getty - Tom Stoddart Archive
Depuis l’afflux sans précédent de plus d’un million de migrants arrivés en Europe en 2015, fuyant pour la plupart la guerre et l’insécurité, les arrivées ont diminué de manière continue. ©Getty - Tom Stoddart Archive
Depuis l’afflux sans précédent de plus d’un million de migrants arrivés en Europe en 2015, fuyant pour la plupart la guerre et l’insécurité, les arrivées ont diminué de manière continue. ©Getty - Tom Stoddart Archive
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L'impact de l'immigration sur le marché du travail est certainement, selon notre invitée Esther Duflo, la question qui pèse aujourd'hui le plus sur la vie politique des pays développés. Pour les économistes, c'est aussi un sujet de recherche qui fait débat depuis des dizaines d'années.

Avec
  • Esther Duflo Économiste franco-américaine et professeure, prix Nobel d'économie 2019

A Mayence, en Allemagne, les fondateurs de BioNTech, Ugur Sahin et Özlem Türeci, sont devenus des célébrités mondiales le 9 novembre 2020 en annonçant avoir mis au point le tout premier vaccin mondial contre le Covid-19, en partenariat avec le groupe pharmaceutique Pfizer. Les deux fondateurs sont des enfants d’immigrés turcs, une des minorités qui fait pourtant encore l’objet de beaucoup de rejet et de racisme en Allemagne, où l’immigration est importante.

Un des grands fantasmes vis-à-vis de la migration, c’est que tout le monde est en mouvement perpétuel, et en particulier que s’il n’y avait pas de barrières très imperméables entre les pays, tout le monde voudrait venir dans nos pays riches. En réalité, même dans des espaces comme celui de l'Union Européenne où les mouvements de population sont complètement libres, ils sont finalement très faibles. – Esther Duflo

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Le deuxième fantasme, qui est lié au premier, est que la raison principale pour laquelle les gens partiraient de chez eux c’est qu’ils seraient attirés par des conditions de vie, des salaires meilleurs dans d’autres pays, alors qu’en réalité c’est un motif de migration extrêmement minoritaire. Ce qui entraîne de grands mouvements de gens d’un coup, c’est une énorme crise. – Esther Duflo

Dans un contexte d’augmentation du chômage due à la crise sanitaire devenue crise économique, et au phénomène plus ancien de lente progression des salaires, les populations des pays développés ont pu montrer ces dernières décennies une certaine hostilité vis-à-vis de l’immigration : celle-ci est régulièrement accusée de détruire l’emploi des autochtones ou de pousser leurs salaires à la baisse. Cette hostilité s’est manifestée à travers des mouvements populistes, élus au pouvoir ou devenus principaux partis d’opposition.

Mais la question de l’influence de l’immigration sur le marché du travail du pays d’accueil est également éminemment économique. Le sens commun a l’habitude de faire un raccourci entre l’arrivée d’immigrés qui prendraient les emplois des autochtones du pays d’accueil et qui, en acceptant des salaires plus bas, feraient pression à la baisse sur le salaire moyen du pays. Au contraire, même si la question ne fait pas consensus, la plupart des économistes du travail et des migrations s’entendent pour dire que l’impact de l’immigration sur les opportunités d’emplois et les salaires des travailleurs autochtones est très modeste. 

Le débat est devenu beaucoup trop émotionnel. Tout le monde s’accorde pour dire intuitivement que l’immigration a un coût pour nous mais qu’on doit soit l’accepter parce qu’on est généreux, si on est plutôt à gauche, soit ne pas l’accepter pour protéger notre pays si on est plus à droite. En fait, une fois qu’on se rend compte que, d’une part, le monde entier ne se presse pas à nos portes pour nous envahir et, d’autre part, que même si d’autres migrants venaient, ça ne porterait pas préjudice à nos économies, alors on pourrait avoir une attitude beaucoup plus sereine vis-à-vis de la migration. - Esther Duflo

Quand on parle d’immigration dans le débat public, on en parle comme d’une immigration souvent économique, mais l’est-elle vraiment si souvent ? Quel est l’impact de l’immigration sur les emplois et les salaires des autochtones ? Qui est en concurrence avec qui ? Pour en parler, nous avons fait appel à Esther Duflo, économiste, Prix Nobel d'économie en 2019 et professeur en économie du développement au MIT.

La Bulle économique
4 min

Références sonores

Références musicales

  • « Nés trop loin » - Charlélie Couture
  • « Smashing Pumpkins » - Purple Blood

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