Face à la plus importante récession subie par l’économie française depuis la Seconde Guerre mondiale, les 100 milliards d’euros du Plan de relance seront-ils suffisants ? Quelles seront les mesures économiques et sociales à mettre en place en priorité pour accélérer la sortie de crise ?
- Xavier Ragot Economiste et président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE)
- Mathilde Lemoine Economiste et cheffe économiste du groupe Edmond de Rothschild
En 2020, l’économie française a subi sa plus grosse récession depuis la Seconde Guerre mondiale : le PIB français a diminué de 8,3% l’année dernière, selon une première estimation publiée fin janvier par l’INSEE. Le tableau n’est pas complètement noir cependant : la récession est moins brutale que prévue, puisque l’INSEE avait prévu une chute de 9%. Si les pires estimations ne se sont pas concrétisées, c’est parce que l’économie a mieux résisté au deuxième confinement qu’au premier : la perte d’activité a été bien plus modérée, et inférieure de « seulement » 5% au dernier trimestre par rapport à son niveau de 2019 (contre une baisse de 32% au printemps).
La résilience est donc déjà en train de se construire, et cela peut expliquer la décision du Gouvernement de ne pas déclarer, à ce jour, un troisième confinement qui pourrait entraîner une perte d'activité entre 10% et 18% selon le degré de contrainte appliqué, d'après une évaluation du ministère de l'Economie. L’objectif affiché par le Gouvernement est de ne pas ralentir la croissance de 2021 et d’envisager une sortie de crise. Fin janvier, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) avait cependant appelé à doubler le Plan actuel de relance de 100 milliards d’euros, qu’il juge insuffisant pour retrouver un niveau d’activité d’avant la crise en 2022 et « préparer la France de 2030 », comme le souhaiterait le Gouvernement.
La réponse à l’urgence et la préparation de l’après-crise ne sont pas incompatibles. L’urgent, c’est d’éviter un effondrement de l’économie, et c’est justement en l’évitant qu’on prépare le futur. L’État a imposé les mesures sanitaires, et il doit en contrepartie aider ceux qui sont le plus touchés par ces mesures. Les plans de relance engagés jusqu’à présent ne sont pour l’instant pas assez ambitieux pour garantir une croissance de moyen terme. – Mathilde Lemoine
Plusieurs débats économiques jalonneront la sortie de crise. L’annulation de la dette n’en est pas vraiment un, et il faudra plutôt se concentrer sur la relance de la consommation, le déblocage de l’épargne et le choix d’une fiscalité qui répondra à la fois à la nécessité de relance de l’économie et à la compensation d'une augmentation très forte des dépenses publiques due à la crise.
Le débat sur l’annulation de la dette est un faux débat. Les taux n’ont jamais été aussi bas : l’État s’endette à taux négatif et doit donc rembourser de moins en moins, parce qu’il y a de plus en plus d’épargne. La dette augmente mais ça coûte de moins en moins cher au contribuable. La question cruciale, c’est celle du taux d’intérêt, et non de la charge de la dette. – Xavier Ragot
Comment préparer la sortie de crise sanitaire, économique et sociale ? Pour en parler, nous avons fait appel à Xavier Ragot, économiste et président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), Mathilde Lemoine, économiste et cheffe économiste du groupe Edmond de Rothschild et Dominique Méda, sociologue et philosophe, professeure à l’Université Paris Dauphine.
On a beaucoup parlé de la crise sanitaire, mais il ne faut pas oublier la crise écologique à venir. Regardez la situation au Texas : une des manifestations de la crise écologique fait tout exploser. Le tour de force qu’il faut réussir à mener c’est de penser le court terme et le long terme en même temps : il faut penser l’après maintenant. Il faudra aider les gens qui auront perdu leur emploi, bien sûr, mais aussi la reconstruction des entreprises dont on aura besoin, notamment celles qui nous mettrons sur le chemin de la reconversion écologique. – Dominique Méda
Références sonores :
- Témoignages lors d’une manifestation pour la défense des services publics le 4 février 2021 (Le Parisien)
- François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, sur la « dette Covid » (2021, BFMTV)
- Bruno Le Maire sur le plan de relance et ce qu'il apporte au secteur industriel (2021, France Bleu Bourgogne)
Références musicales :
- « Les temps difficiles » - Léo Ferré
- « Some Sunny Day » - Lael Neale
Pour aller plus loin :
- Un bilan de la récession de l'économie française dans Le Monde
- Combien coûterait un troisième confinement ? Un article du Parisien sur la facture laissée par les mesures sanitaires, en incluant de nombreuses variables.
- Les prévisions du FMI sur la croissance mondiale en 2021
- Quelle forme doit prendre le redémarrage de l'économie française ? : une chronique dans Alternatives Economiques
- Quelles seront les mesures économiques à prendre pour sortir de la crise ? : un article d'opinion d'Olivier Klein, directeur général de la BRED, dans Les Echos
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