Les mesures prises contre le Covid-19 impliquent des choix aux conséquences sanitaires, économiques, sociales et psychologiques. Les économistes participent donc au débat : quelles sont les décisions à prendre selon eux et les conséquences qu'elles auraient ?
- Serge Blondel Economiste spécialiste du risque et professeur à l’Université d’Angers
- Camille Landais Professeur d’économie à la London School of economics and political science, spécialiste des inégalités
- Christian Gollier Economiste de l’incertain et directeur de l’Ecole d’économie de Toulouse
A bientôt un an du premier confinement de mars dernier, les questions qui entourent la gestion de la crise sanitaire se font plus pressantes tandis que la pression épidémique augmente. Alors que le gouvernement annonce tout faire pour éviter un confinement global, les restrictions supplémentaires se multiplient au niveau local. Alors que Nice et Dunkerque sont déjà confinés le week-end, toute la région parisienne, le Rhône, les Bouches-du-Rhône et une partie des Hauts-de-France et du Grand Est sont en « surveillance accrue » pour décider de la suite des mesures à prendre, a annoncé jeudi le Premier ministre.
Cette stratégie de riposte graduelle, qui préfère la réaction à l’anticipation, vaut au gouvernement des critiques d’attentisme de la part de médecins, de l’opposition politique et d’économistes, alors qu’une partie de l’Europe est déjà confinée depuis plusieurs semaines et que la France a décidé de ne pas suivre ce chemin au même moment. Les voix s’élèvent contre la stratégie de stop-and-go du gouvernement, usante, et selon certains peu efficace et peut-être plus coûteuse en vies et en argent.
La confiance, les mécanismes institutionnels, la logistique ont de l’importance, certes, mais c’est surtout une question d’expérience. En Europe, globalement, les pays n’ont pas réussi à éradiquer le Covid aussi bien que les pays asiatiques, en dépit de structures institutionnelles et de niveaux de confiance très variés. La vraie différence entre l’Europe et l’Asie, c’est que le Covid-19 est pour eux une piqure de rappel du SRAS, et il y a depuis plus longtemps dans les pays asiatiques un éveil sur ces questions de pandémie, ce qui leur a permis de réagir beaucoup plus vite. – Camille Landais
Selon certains économistes, la stratégie zéro Covid, qui consiste à adopter un confinement initial très strict, amenant le nombre de cas Covid-19 à un chiffre très faible, puis à « tester, tracer, isoler » le petit nombre de cas qui réapparaîtraient, a montré son efficacité sanitaire mais aussi économique. De nombreux pays asiatiques et océaniques ont fait ce choix, et le secteur des services y est reparti en croissance positive alors qu’il est toujours en récession en Europe.
Le Zéro Covid, on l’a tenté le printemps dernier, et on n’était pas loin d’y arriver. Il nous a manqué la suite : une fois qu’on avait réduit massivement le taux de prévalence du virus dans la société française au mois de mai, il aurait fallu mettre en œuvre, comme les pays asiatiques, une stratégie de traçage, de dépistage et d’isolement des cas positifs pour éradiquer complètement le virus. Sachant qu'en Europe nous sommes dans une économie très ouverte, avec une mobilité des personnes très forte. – Christian Gollier
On est très loin d’une stratégie Zéro Covid. Par contre, pour éradiquer le virus, il faut des mesures simples et compréhensibles. Je pense que le principe « une place sur deux » devrait être appliqué partout où les gens se côtoient. Donc on durcirait les mesures dans les lycées, les collèges et les transports qui sont très remplis, et en parallèle on relâcherait la pression dans les universités, les salles de spectacles, les restaurants, les bars et les stations de ski. – Serge Blondel
Faut-il ou non reconfiner ? Serait-il possible de mettre en place des politiques zéro Covid en Europe ? Pour en parler, nous avons fait appel à Christian Gollier, économiste de l’incertain et directeur de l’Ecole d’économie de Toulouse, Camille Landais, économiste et professeur associé à la London School of Economics and Political Science et Serge Blondel, économiste spécialiste du risque et professeur à l’Université d’Angers.
Références sonores
- Le Premier ministre Jean Castex le 26 novembre sur les mesures sanitaires de stop and go (Le Figaro)
- Jean Francois Casabonne Maonnave, représentant de la France à Taïwan, sur la stratégie Zéro Covid de Taïwan (9 septembre 2020, Public Sénat)
- Sir Patrick Vallance, chef du conseil scientifique britannique, défend la stratégie britannique d’immunité de groupe le 13 mars 2020 (SkyNews)
- Le premier adjoint de la ville, Emmanuel Grégoire, propose un confinement de trois semaines dans la capitale (25 février 2021, LCI)
- L’épidémiologiste Antoine Flahault dans « Le temps du débat » (9 février 2021, France Culture)
Références musicales
- « Funky Confinement » – François Feldman
- « Ohio » – Lea Porcelain
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