La désintégration du glacier de l'Apocalypse

Glacier en Antarctique
Glacier en Antarctique ©AFP - Johan ORDONEZ / AFP
Glacier en Antarctique ©AFP - Johan ORDONEZ / AFP
Glacier en Antarctique ©AFP - Johan ORDONEZ / AFP
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120 km de large, 600 km de long et 3 km de profondeur... et des conséquences potentiellement désastreuses.

Il est un monstre froid nécessaire, un géant que les scientifiques s’inquiètent de voir rapetisser, tant sa fonte aurait des conséquences irréversibles. Sa taille ? 120 km de large, 600 km de long et 3 km de profondeur. Thwaites, que l’on appelle aussi glacier de l’Apocalypse, se loge à l’ouest de l’Antarctique à l’entrée d’une chaîne de vallées creusées au-dessous du niveau de la mer. Il est donc pareil à un bouchon de glace : s’il cède, ce sont tous les glaciers de cette zone géographique qui pourraient s’effondrer à leur tour.

Et Maintenant ? Le glacier de l’Apocalypse menace de se désintégrer. Risquant d’emporter avec lui, dans un effet domino diluvien, des morceaux entiers du territoire qu’il protège encore. Et d’entraîner, à terme, une hausse du niveau de la mer… de trois mètres. Lydie Lescarmontier, glaciologue et éducatrice au changement climatique à l’Office for Climate Education, autrice de La Voix des pôles, paru l’an passé aux éditions Flammarion, met en lumière la principale singularité de ce glacier : Thwaites est un glacier émissaire.

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Depuis des années, trente ou quarante ans, même, les glaciologues sont aux aguets. Et alertent à échéance régulière. Car les travaux démontrent que la ligne de fond, c’est-à-dire la surface sur laquelle le glacier repose, recule peu à peu. Lydie Lescarmontier nous décrit la nature du phénomène observé en Antarctique. Un phénomène différent cependant de ce qui a cours au Groenland.

Récemment, les observations par satellites ont permis d’identifier de nouvelles fractures, impressionnantes, et d’autres en formation. Les uns après les autres, des icebergs se détachent et font reculer la limite du glacier. Menaçant dans les années qui viennent son intégrité même, et tous ceux qu’il retient par l’effet bouchon. Selon la glaciologue Catherine Ritz :

Ce glacier est devenu le plus gros enjeu de l’Antarctique à l’échelle de quelques siècles.

Lydie Lescarmontier évoque les conséquences concrètes de sa désintégration probable.

Le glacier de l’Apocalypse pose une ultime question. Celui du discours de la peur ; de sa pertinence, de sa propension au désengagement, de ses résonances politiques. Car face à l’Apocalypse ou aux prophéties redoutables, face aux géants submersibles, nous ne pouvons rien. Or les scientifiques, le rapport du GIEC paru lundi 28 février, nous rappellent qu’il existe un chemin de crête, ardu, risqué, coûteux, potentiellement injuste : celui de la réduction des émissions, conjuguée à l’adaptation. Le glacier de Thwaites est en passe de se désintégrer : voilà le fait, la réalité. Mais l’Apocalypse, elle, n’existe pas et n’existera jamais. Il faut désormais s’en souvenir… pour agir.

Le Journal des idées
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