L'île de Ceylan : épisode 4/5 du podcast Pages arrachées à Nicolas Bouvier.

Carte de Ceylan
Carte de Ceylan ©Getty - Found Image Holdings Inc
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Mars 1955. Nicolas Bouvier arrive à Ceylan. Il vient de traverser seul l’Inde du nord au sud en trois mois, depuis Kaboul jusqu’à Madurai. Thierry Vernet et lui se sont séparés en Afghanistan. Ils doivent se retrouver dans le sud de l’Ile, à Galle, où Thierry doit se marier avec Floristella.

Choix de textes Laurent Martin
Réalisation Michel Sidoroff
Conseillère littéraire Emmanuelle Chevrière

« En 1953, ses vingt ans à peine révolus, Nicolas Bouvier prit la route. Il avait un compagnon, le peintre Thierry Vernet, qu’il devait rejoindre à Belgrade, et un improbable véhicule, une minuscule Fiat Topolino dont il apprendra à démonter et remonter les six mille pièces. Tous deux allaient s’enfoncer vers l’Est, toujours plus avant, traversant la Yougoslavie, la Macédoine, l’Iran, l’Afghanistan. Thierry Vernet le quitta à ce moment. (…) Bouvier continuera seul le voyage : l’Inde, Ceylan, où il sombra dans la maladie et les hallucinations et le Japon qu’il aima au point de s’y implanter durablement et d’y retourner deux fois.
Etre nomade : une occupation rare à l’époque, réservée à quelques malheureux, et pas trop bien considérée. Quand il partit, Nicolas Bouvier quittait l’université, Genève et la Suisse, un territoire exigu et le carcan familial. Il quittait un milieu de bourgeois aisés, un père érudit, silencieux, dépressif, avec lequel, l’âge adulte venu, il s’entendit bien, une mère très cultivée, un peu raide, directive, qui elle ne le comprenait pas, une gouvernante prussienne terrifiante et sadique qui régentait la maison de ses grands-parents maternels, les belles demeures de l’été posées sur de longues pelouses, le cercle des connaissances célèbres, écrivains et musiciens, amis de son grand-père, qui était compositeur d’opéras, ou familiers de la bibliothèque où officiait son père. Il quittait une vie close, un peu surannée, marquée par la pruderie et la méfiance du corps, par l’influence judéo-chrétienne que l’expérience de l’Asie contribuera à effacer. Il partait loin des « alibis et des malédictions natales », d’un moralisme paralysant et d’une prudence dangereuse. Une fuite positive vers des choses dont il avait besoin. Et parce qu’il était prêt, ces choses se présentèrent à lui.
Il avait le crâne bourré de ses lectures d’enfant, en tête desquelles venaient Stevenson, Jack London, James Oliver Curwood, Alexandre Dumas ou Jules Verne, auteurs qui avaient inscrit en lui « l’impatience du monde ». Pas d’autres armes. Il s’en allait sans esprit de retour. La route. L’espace comme une drogue, l’immensité qui le saoulait de bonheur. Sans ce déplacement géographique, sans cet élan donné par le plaisir, sans cette liberté d’aller et venir, à laquelle correspondait une liberté intérieure, il n’aurait, dit-il, pas écrit. »
Christine Jordis

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Extraits d’une préface à l’œuvre de Nicolas Bouvier (Quarto, Gallimard)

De ces voyages sont nés des livres : L’Usage du monde, Chronique japonaise, Le Poisson-Scorpion, et des textes. C’est cette écriture que nous avons voulu faire entendre à travers ce feuilleton. Une écriture affranchie de toutes contraintes hormis celle de s’émerveiller.
Textes de Nicolas Bouvier extraits de L’Usage du monde, éditions La Découverte ; Routes et déroutes, éditions Métropolis ; Le Poisson-Scorpion,(Ceylan) aux éditions Gallimard ; Chroniques japonaises, (japon) aux éditions Payot-Rivage ; correspondance entre Nicolas Bouvier et Thierry Vernet aux éditions Zoé sous le titre Correspondance des routes croisées et Réflexions sur l’espace et l’écriture avec l’aimable autorisation d’Eliane Bouvier.

Avec Igor Mendjinsky, Arnaud Bedouet et Sarah Capony
Prise de son, montage et mixage Jehan Richard Dufour et Pierre Henry
Assistant à la réalisation Guy Peyramaure