Extrait de "Les contes du whisky" de Jean Ray

Fûts de whisky
Fûts de whisky ©Getty - F.J. Jimenez
Fûts de whisky ©Getty - F.J. Jimenez
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Chez Jean Ray, la terreur est au bout de la rue. Le brouillard aux vapeurs d’alcools forts fait tanguer le quidam, marin en goguette ou simple bourgeois.

Le recueil Les Contes du whisky connaît dès sa parution un formidable engouement, aussi bien critique que public. Deux mois après sa sortie, l’ouvrage s’est déjà vendu à quinze mille exemplaires, et Gérard Harry, critique littéraire du Figaro voit en Jean Ray un « Edgar Poe belge », formule que reprendra Maurice Renard. Il est vrai que Jean Ray se situe dans la lignée du maître américain de l’étrange, mais ses nouvelles témoignent d’un réalisme cru. Jean Ray écrit dans la langue des marins, à la fois âpre et poétique. Celle des docks, des tavernes et maisons de passe. Chez lui, la terreur est au bout de la rue. Le brouillard aux vapeurs d’alcools forts, fait tanguer le quidam, marin en goguette ou simple bourgeois. Un pas de côté et il chavire dans un autre plan d’existence. Quantité de récits en témoignent, que pêche l’écrivain à la taverne du Site enchanteur. Dans l’atmosphère enfumée de tabac fort, quand coulent le genièvre ou l’or tiède du whisky, au bruit d’un verre qui se casse avec un rire de fille, les langues se délient en français et néerlandais. Agrippé au comptoir comme à la barre d’un vaisseau, on évoque les « douloureuses amies des ports », ces filles de rien qui sont tout, et le « mouvement de vie dans l’ombre » qui s’empare d’un promeneur solitaire ou de l’équipage d’un clipper.
Lire ou écouter Jean Ray, c’est l’assurance de partir dans l’ailleurs qui n’est jamais bien loin, sans garantie d’en revenir.
Choix des textes : Xavier Mauméjean Réalisation : Etienne Vallès Conseillère littéraire : Caroline Ouazana
Petite femme aimée au parfum de verveine    Irish Whisky  Textes dits par : Gérard Giroudon, Nicolas Raccah, Jean-Christophe Lebert, Lionnel Astier Prise de son et mixage : Cédric Chatelus
Assistance technique et montage : Martin Delafosse, Victoria Aspert
Assistante à la réalisation : Laure-Hélène Planchet   Jean Ray, de son vrai nom Raymond de Kremer, naît le 8 juillet 1887 à Gand, ville qu’il ne quittera pratiquement jamais. Dès 1904, il publie poèmes et nouvelles en néerlandais. Cinq ans plus tard apparaît pour la première fois la signature de Jean Ray, en tant que parolier de livret pour théâtre. Il faudra attendre 1913 pour le voir écrire ses premiers textes en français. En 1919, Jean Ray fait paraître dans Ciné ses deux premiers récits fantastiques : « La vengeance » et « Le Gardien du cimetière », qui annoncent Les Contes du whisky. L’écrivain se consacre désormais entièrement à l’écriture, et collabore comme polygraphe à nombre de rubriques du Journal de Gand. En 1925, paraît à La Renaissance du Livre, Les Contes du whisky, ouvrage qui l’impose d’entrée comme un maître du fantastique. Le 8 mars 1926, l’écrivain est condamné pour fraude à dix ans de prison. Il en accomplira trois avant d’être libéré. L’auteur diversifie ses noms de plume et signe John Flanders. À partir de 1931 vont s’enchaîner les chefs-d’œuvre : des recueils, tels La Croisière des ombres, Le Grand Nocturne (1942), Les Cercles de l’épouvante (1943), Les Derniers Contes de Canterbury (1944), Le Carrousel des maléfices (1964) et Les Contes noirs du golf (1964), mais aussi des romans comme le célèbre Malpertuis (1943) et La Cité de l’indicible peur (1943). Sans compter, en parallèle, la reprise sous pseudonyme, puis la réinvention, d’Harry Dickson, « le Sherlock Holmes américain ». Jean Ray meurt à Gand, le 17 septembre 1964.

Les contes du whisky est publié chez Alma Éditeur (2016).

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