500 Yézidis, victimes des pires atrocités en Syrie et en Irak, ont été accueillis en France en un an. 100 femmes veuves et leurs enfants ont été installées aux quatre coins de l'hexagone. Rencontres dans trois villages de Bourgogne avec ces rescapés des griffes de Daech.
- Julien Boucher Directeur général de l'Ofpra
- Clémence Bectarte Avocate, coordinatrice du groupe d'action judiciaire de la FIDH et co-présidente de la coalition française pour la CPI
"Chaque famille yézidie peut rapporter la même histoire, l'une plus horrible que l'autre, du fait du génocide". Cette phrase extraite du discours de la lauréate du Prix Nobel de la Paix 2018 Nadia Murad , elle-même Yézidie et ancienne captive de Daech, résume le triste sort de cette petite communauté ancestrale du Moyen-Orient. Pratiquant une religion monothéiste qui rappelle celle de l'Iran antique, ce peuple kurdophone est persécuté depuis la nuit des temps et victime des pires atrocités en ce début de XXIe siècle. Meurtres, viols, trafic d'êtres humains, esclavage sexuel, crimes, nettoyage ethnique et religieux, exils, exode, indéniablement les Yézidis ont subi une politique de destruction. Principalement installés dans le Sinjar, dans le Nord de l'Irak, ils étaient protégés par la Constitution avant que leurs vies ne basculent avec l'arrivée de l'organisation Etat islamique. Pour Daech, les Yézidis sont des hérétiques et les enfants ont été convertis de force et enrôlés, les femmes réduites à l'esclavage sexuel, les hommes exécutés. Sur les 600 000 Yézidis recensés en Irak, 5 000 à 10 000 auraient été tués, ceux qui le pouvaient se sont enfui, la plupart vivent dans des camps de réfugiés dans des conditions de vie précaires.
Fin 2018, Nadia Murad obtenait d’Emmanuel Macron la promesse que la France accueille 100 femmes yézidies avec leurs enfants. L'engagement auprès de cette minorité religieuse victime de génocide en Irak et en Syrie a été honoré. En un an, et par groupes de 20 femmes, les 100 mono-familles ont été sorties du Moyen-Orient et accueillies et installées aux quatre coins de la France.
Malgré la peur et l'horreur, et sans comprendre pourquoi le simple fait d'être Yézidi est devenu synonyme de persécutions, les rescapés des griffes de Daech et de ses appuis, certains de ces réfugiés commencent à doucement relever la tête.
16 mères et leurs 67 enfants ont d'abord été installées en région parisienne. Quelques mois après la fin du califat de l'organisation Etat islamique en Syrie, le 10 mai 2019, la France noue un partenariat avec l'OIM (Organisation internationale pour les migrations) sur l'hospitalité de 100 mères yézidies et leurs enfants, originaires du Sinjar.
Au début de l'année 2019, après d'autres phases d'accueil, le Quai d'Orsay a demandé à la Communauté de Taizé, communauté religieuse historiquement engagée aux côtés des minorités persécutées, si elle pouvait recevoir deux familles yézidies. Et, en août 2019, deux veuves et leurs sept enfants sont arrivées dans le village de Saône-et-Loire. Les maris ont été assassinés en Irak par Daech, il y a cinq ans.
Frère David et frère Charles Eugène les entourent : "Nous avons aménagé une grande maison que nous avons dans le village, en la divisant en deux logements pour chacune des familles. Il y a un grand jardin pour les enfants. Pour eux, ça va bien, tous les enfants sont scolarisés, les 4 ados vont à Cluny, à 10 km. Et maintenant ils se débrouillent bien en français".
Des associations comme le Pont contribuent à l’adaptation des nouveaux villageois. Les mères sont épaulées par des bénévoles et des assistantes sociales pour les rendez-vous médicaux, les démarches administratives ou leur déplacement. Les deux femmes suivent un cours de français, trois fois par semaine.
Du Mont Sinjar à Mâcon, l’exil des Yézidis. Un "Grand Reportage" de Nadine Epstain.
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