

Ces "nouvelles cathédrales" de l'art se tournent de plus en plus vers leurs publics. Jusqu'à les faire voter pour décider d'une salle ou leur donner des entrées au supermarché. Enquête avant la nuit européenne des musées de ce samedi. En particulier au Louvre-Lens et avec vos nombreux témoignages.
- Marie Lavandier Directrice du Louvre-Lens
Visiter un musée (ou un monument) est de loin l'activité culturelle par excellence, d'après les Français interrogés par le Crédoc et le ministère de la Culture (détail ci-dessous). Et nul doute qu'ils seront une nouvelle fois des centaines de milliers à profiter de la Nuit européenne des musées de ce samedi, dans 1 300 lieux en France. Ces établissements ont beaucoup évolué depuis notamment une loi de 2002 qui impose un service des publics et depuis un développement des formations en médiation. En janvier 2015, les professionnels évoquaient un âge adulte de la médiation. En voici certains exemples, à travers un reportage au Louvre-Lens et vos témoignages.
Philippe, retraité globalement enchanté par nos musées
Un grand sourire. A sa sortie de l'exposition temporaire sur les frères Le Nain, Philippe se dit avant tout ravi de sa troisième visite au Louvre-Lens. "C'est un très beau musée, moderne mais convivial, ni trop grand ni trop petit, avec des expositions largement aérées qui ne nous donnent pas mal à la tête et qui nous apprennent beaucoup. Je vais régulièrement aux musées et je les aime.", confie ce voisin venu de Sailly-sur-la-Lys. Une vraie déclaration d'amour, nuancée toutefois par son expérience outre-Atlantique : "Les musées en France sont en général beaux et les expositions temporaires remarquables, même si moins vivants que beaucoup de musées américains."
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"Il n'y a pas de visiteur type, mais des publics"
Chargée d'études au ministère de la Culture, Anne Jonchery connaît très bien LES publics actuels des musées et leurs attentes. 44% des Français ont visité au moins un musée ou une exposition ces douze derniers mois, d'après le Crédoc. Contre 37% en 2008, selon le ministère. Même si les visites ont subi une baisse historique de 6% en 2015, à cause avant tout des attentats. Celle qui a travaillé pendant six ans au département de la politique des publics de la direction générale des patrimoines nous reçoit avec sur son bureau les Chiffres clés, Statistiques de la culture et de la communication 2017, qui viennent juste de paraître. Elle décrit les différents types de visiteurs, comme ces "retraités, qui découvrent les musées et qui du coup sont extrêmement satisfaits, parce que c'est un peu la bonne surprise. Ce n'était pas une pratique qu'ils avaient avant et ils sont beaucoup moins critiques que les jeunes."
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Jordan, 21 ans, veut interagir avec les oeuvres
Etudiant en BTS tourisme, Jordan sort lui de sa deuxième visite du Louvre-Lens. Déjà lors de sa découverte, peu après l'ouverture, avec des amis, il avait apprécié sa modernité. "Même si cela restait trop musée à mon goût : trop formel. On pose des oeuvres et on fait une visite." Le jeune homme reconnaît tout de même les efforts de ce nouveau rendez-vous lancé fin 2012. En particulier des installations visuelles et sonores qui font du visiteur un acteur. "On peut interagir avec les oeuvres et cela apporte du dynamisme au musée. Ça rend tout de suite la visite plus vivante. On apprend mieux et on a envie de savoir et de continuer à savoir."
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Les jeunes de 18-25 ans qu'Anne Jonchery, du ministère, décrit justement comme les plus exigeants d'après les études. Ils sont trois fois plus nombreux dans la quarantaine de musées nationaux relevant de la rue de Valois depuis une mesure de gratuité instaurée en 2009. Et leur fidélité et leurs habitudes de maîtriser plusieurs outils multimédia renforcent très souvent leurs critiques. Des critiques constructives issues aussi depuis quelques années des réseaux sociaux et de la communauté très active des muséo geeks. Avec des professionnels et des amateurs réunis dans des Museomix pour concevoir des musées plus vivants !

A LIRE ET ECOUTER Musées : quelle médiation pour les jeunes ? ("Pixel", reportage participatif, de mai 2015)
Aurore, maîtresse ès "Impromptus"
Le Louvre-Lens, qui peine à redynamiser l'ex territoire minier et inquiète par son coût de fonctionnement (selon Les Echos), déploie pourtant quantité de médiations, grâce à 15 médiateurs. Musée pour les bébés (entre 9 et 18 mois) avec des partenariats avec les crèches, visites guidées de la réserve, expériences avec des robots pour faire découvrir l'endroit à des prisonniers ou à des personnes hospitalisées ou chasse aux Pokémons ! Et Aurore Rouffelaers, guide conférencière, raconte le principe des "Impromptus" et des visites flash. Ou comment regrouper à une heure donnée les amateurs autour d'une oeuvre, distinguée par un macaron. Histoire de la présenter en une dizaine de minutes : "de petites pastilles, des capsules, pour donner des clés". Les visites flash permettent, elles, d'avoir une très rapide vue d'ensemble gratuite des expositions temporaires payantes.
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On ne peut pas remplacer la médiation humaine par une machine. Ça, moi, je n'ai aucune inquiétude. Parce que la machine, vous pouvez lui poser toutes les questions que vous voulez, elle vous répondra toujours la même chose ! (rires) Nous, on va proposer justement des analyses, et il y a parfois même des questions sur le fonctionnement même du musée. La machine, vous pouvez toujours lui demander...
Aller chercher des visiteurs dans les centres commerciaux
"Une des questions que l'on s'est posé, c'est : où sont les gens qui ne viennent pas au musée ?" Pour Marie Lavandier, nommée il y a un an à la tête de ce "Louvre autrement", ces personnes sont très, trop nombreuses. Une des réponses a été d'aller les toucher dans les centres commerciaux ! En particulier dans une galerie marchande d'Auchan à Noyelles Godault pendant les vacances d’hiver de 2015. Un quart des billets offerts aux visiteurs venus expérimenter les ateliers sur l’art de l’Egypte ancienne dans cet environnement inédit ont été utilisés dans les jours qui ont suivi.
Une installation du musée dans la galerie commerciale qui dure une dizaine de jours
6 min
Tout récemment, pour aller au plus près de potentiels visiteurs, le Louvre a aussi lancé #leLouvrechezvous
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Et fin 2016, pour la première fois en France, le public a pu voter pour choisir les oeuvres à exposer au musée des Beaux-Arts de Rouen. Une exposition dite 100% démocratique baptisée la chambre des visiteurs.
Une expérience qu'évoque Jacqueline Eidelman. Conservatrice générale du patrimoine, elle a signé un rapport sur les musées du XXIe siècle remis à la ministre Audrey Azoulay en mars dernier. Elle répond à Isabelle Souquet :
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A LIRE Comment les musées sont devenus de "nouvelles cathédrales" (Entretien avec le spécialiste en muséologie Paul Rasse)
En quête de nos regards sur les toiles
Ikonikat. C'est le nom d'une application testée en ce moment même au Louvre-Lens pour étudier nos réactions face à des oeuvres de l'exposition "Le Mystère Le Nain". Le CNRS propose des tablettes numériques aux visiteurs qui dessinent, entourent, soulignent, ce qu'ils voient. Avec deux questions identiques posées pour sept toiles : quelle est la première chose qui attire votre regard ? Et qu'est-ce qui vous semble important dans ce tableau ? Le sociologue Mathias Blanc, qui pilote ce projet, explique qu'il s'agit d'en savoir plus sur nos comportements, mais aussi de pouvoir adapter le discours muséal aux différents publics.
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Aucun établissement n'a refusé de mettre en place ce dispositif, et à mi parcours Mathias Blanc en tire déjà quelques enseignements. Des regards de profanes ont pu fournir des clés aux experts, en particulier sur "La réunion musicale", d'Antoine Le Nain. Cette oeuvre est perçue principalement par des couples d'un certain âge et des jeunes filles avec leur mère comme une scène de noces ou de fiançailles, et absolument pas comme une réunion musicale.

Autre enseignement : la différence de perception des oeuvres par les adultes comparée à celle des enfants. Et "il y a plus de cas où les lectures des toiles proposées par les enfants sont celles qui vont ensuite orienter les lectures suivantes pour les parents, que l'inverse."
Vos réactions sur les réseaux sociaux
Vous avez été très nombreux à réagir à nos questions. Amateurs d'art, mais aussi musées. Comme le musée (des Antiques) Saint-Raymond, à Toulouse, qui a nous longuement expliqué ses 'visites pour ceux qui n'aiment pas les musées".
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