Deuxième entretien de Laure Adler avec l'écrivaine Annie Ernaux qui se déploie autour de son écriture depuis son premier roman publié en 1974 en dehors de tout genre littéraire. Elle y parle de mémoire, de langage, de souvenirs, d'authenticité et de proximité.
- Annie Ernaux Écrivaine, prix Nobel de littérature en 2022
Deuxième temps de la discussion entre Laure Adler et Annie Ernaux qui tente de définir son univers littéraire. Sa littérature serait celle du "compagnonnage".
Annie Ernaux, une écriture de mémoire et de proximité
L'écrivaine se souvient de l'urgence et de la grande solitude au moment de l'écriture des Armoires vides paru en 1974 et pour lequel Annie Ernaux reçoit de nombreux messages de lecteurs : "ce que vous décrivez, je l'ai vécu" , "votre livre j'aurais pu l'écrire"… Une "proximité" avec ses lecteurs qui la réjouit.
Elle refuse le terme d'autofiction et se situe "en dehors de genres littéraires", son souci premier étant de "trouver une forme" pour ce qu'elle à dire en fonction de ses expériences de vie. Trouver une forme qui convient à ce qu'elle ressent, une forme unique pour raconter une vie, la sienne, en dehors de tout modèle. Il n'y a pas de fiction dans ses livres, seulement de "l'authenticité".
Il y a "des mots qui étoilent et qui permettent d'aller plus avant" . Ces mots lui font "revivre une époque" dans sa dimension sociale et historique, à travers des images, des souvenirs et un langage, comme dans son livre Les années, un travail peut-être proche de l'ethnologie. "L'écriture est un activateur de mémoire", considère-t-elle et aussi une lutte contre ce sentiment que "tout va disparaître".
"Si on peut parler de mémoire collective, c'est toujours à partir d'une mémoire personnelle." (Annie Ernaux)
Annie Ernaux, une revanche à prendre
Ecrivaine de l'intime et du collectif, Annie Ernaux s'exprime ensuite sur Pierre Bourdieu. Elle, née dans une famille modeste, a échappé à la reproduction sociale, mais voit toujours partout "la domination" . Habitante de Cergy-Pontoise, une Ville Nouvelle dont elle parle avec tendresse, Annie Ernaux est restée fidèle à ses principes et à ses origines. Non par déterminisme, mais par choix.
Elle évoque encore le drame de son avortement clandestin relaté dans L'Évènement, Mai 68, le désir féminin à travers son livre Passion simple… Et enfin son amour pour sa mère à laquelle elle a consacré un livre Je ne suis pas sortie de ma nuit.
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