Retour sur le compagnonnage professionnel et personnel des sociologues Michel et Monique Pinçon-Charlot. De leur thèse commune à leurs ouvrages à 4 mains, ils n'ont cessé de parler de la dégradation sociale en s'intéressant notamment aux catégories les plus riches de la population.
- Michel Pinçon sociologue
- Monique Pinçon-Charlot Sociologue
On a appris ce mercredi 28 septembre la mort lundi dernier à Paris du sociologue Michel Pinçon, à l'âge de 80 ans. Nous vous proposons à cette occasion de réentendre cet entretien Hors-champs de 2014, sur son parcours, qu'il avait accordé avec sa femme Monique Pinçon-Charlot.
Entre travail et amour, une vie à deux au cours de laquelle Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon ne se quittent que rarement : voilà comment le couple de sociologues se décrit, et Monique Pinçon-Charlot rappelle à ce titre le début de leurs travaux ensemble. "On a défendu notre maîtrise tous les deux à égalité. (...) Ça ne s'est pas trop mal passé. On a trouvé que c'était bien. On a ressenti à ce moment-là l'importance de la solidarité dans le travail, parce que la sociologie, écrire et tout ça, c'est quand même très anxiogène. On a du coup gardé en mémoire cette expérience positive."
Le couple étudie notamment les différences entre classes sociales et les luttes qu'elles engendrent. En parlant de l'évolution de ces dynamiques au fil des années, avec un tournant notable dans les années 80, Michel Pinçon explique : "Il y avait une lutte de classes respectueuse de l'adversaire parce que l'adversaire, c'était celui qui travaillait et qui faisait tourner la machine dans l'entreprise. Et puis c'était le patron qui connaissait le métier et savait ce que faisaient les ouvriers. (...) Le changement, c'est qu'on passe d'un patronat qui est un patronat industriel qui connaît son boulot à un patronat immatériel qui est loin, qui n'en a rien à faire, de la cité, de la fonderie et de l'estampage. Il n'en a rien à faire de ce qu'on fait dans l'entreprise."
Concernant la distinction qui se fait de moins en moins voir entre les classes, Monique Pinçon-Charlot souligne la place visiblement trop importante à ses yeux de l'individualisme. "Les classes moyennes et les classes populaires sont marquées par un individualisme ; un individualisme d'ailleurs, qui est télécommandé par en haut. Mais, dans la France d'aujourd'hui, il ne reste qu'une seule classe au sens marxiste du terme, c’est-à-dire une classe en soi, avec des conditions objectives dans les modes de vie, dans les moyens de se reproduire, et une classe pour soi, c’est-à-dire parfaitement consciente de ses intérêts et mobilisée sur tous les fronts et dans tous les instants pour défendre ses intérêts. Donc on a le collectivisme tout en haut et tout le reste. L'individualisme qui prédomine."
Après avoir occupé des postes de direction de recherches au CNRS, le couple a approfondi ses travaux personnels, notamment dans le domaine de la politique, comme le rappelle Monique Pinçon-Charlot : "Notre champ d'investigation s'est élargi lorsque nous sommes partis à la retraite du CNRS, parce que ç'aurait été un peu compliqué au CNRS. Nous avons par la suite intégré le champ politique et le champ médiatique dans la transversalité de la classe dominante qui était notre objet. Et c'est à partir de ce moment-là que nous avons publié tout de suite 'Le Président des riches. Enquête sur l'oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy'".
Cet échange est à écouter dans son intégralité en cliquant sur le haut de la page.
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