L’autorité bienveillante de Kurt Masur

France Culture
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par Etienne Menu

Kurt Masur en 2009
Kurt Masur en 2009

Le chef d’orchestre allemand Kurt Masur est mort samedi dernier à Greenwich, près de New York. Une triste nouvelle dont on tâchera tout de même de se consoler en écoutant l’élan vital qu’il offrait, au hasard, à cet allegro moderato du concerto en ré majeur, opus 35, de Tchaikovsky, interprété par l’Orchestre National de France en 2013. Âgé de 88 ans, Masur avait ainsi encore récemment conduit des orchestres, dans son style habituel, c’est à dire sans baguette et avec une fermeté que sa haute stature pouvait rendre bienveillante. Ici, chez Radio France, l’Allemand était particulièrement apprécié et respecté pour avoir conduit l’ONF, l’une des quatre formations musicales de la Maison ronde, entre 2002 et 2008. Il restera d’ailleurs directeur musical honoraire de l’orchestre après son départ officiel. Les dernières années d’une carrière qui prit son envol presque un demi-siècle plus tôt en RDA, à Leipzig.

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On vient ici d’entendre ici l’adagio de la huitième symphonie pour cordes de Felix Mendelssohn, dans une version avec vents qui date de 1972. Le compositeur romantique, un de ceux que Masur admirait le plus, se trouvait justement avoir dirigé l’orchestre du Gewandhaus de Leipzig entre 1835 et sa mort en 1847. Aussi, quand il prit ses fonctions dans ce même Gewandhaus à partir de 1970, Masur décida de faire restaurer la demeure de son illustre prédécesseur. Se heurtant d’abord à la réticence des pouvoirs locaux, il parvint à force de persévérance à faire accepter l’idée. Et aujourd’hui, l’endroit est devenu un musée.

Fruhling, le printemps, c’est le titre d’un des derniers lied de Richard Strauss, ici chanté en 1983 par Jessye Norman, accompagnée de l’orchestre du Gewandhaus, encore lui. L’idée de printemps, qu’il soit de Prague ou arabe, occupe une place essentielle dans la carrière de Masur. Loyal vis-à-vis du gouvernement de la RDA jusqu’à la fin des années 80, celui qui fut un tout jeune soldat de la Wermacht en 1944, accueille alors dans les locaux mêmes de sa salle de concert les premiers contestataires de sa ville. Il réussit même à empêcher les autorités de réprimer une manifestation de 70 000 Leipziger en octobre 1989. Et on rappelle que c’est lui qui dirigea la Cinquième Symphonie de Beethoven lors des festivités entourant la réunification de l’Allemagne en 1990. Sa façon de diriger, que ses musiciens qualifient de puissante mais jamais dure, toujours résonante et chaleureuse, reflète fort bien cet esprit humaniste qui a guidé sa vie.

Extraits diffusés

TCHAIKOVSKY – Concerto en ré majeur, allegro moderato, Orchestre National de France – Naïve, 2013

MENDELSSOHN – Symphonie n°8 pour orchestre à cordes avec vents, adagio, Leipzig Gewandhausorchester – Berlin Classics, 1972

STRAUSS – Fruhling, lied, Jessye Norman, Leipzig Gewandhausorchester – Decca, 1983

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