De Chère Eugénie à Ton Lucien pour la Vie…

**De Nathalie Sabah et Charlotte Roux **

A la technique : - Prise de son : Georges Tho, Jean-Louis Deloncle, Delphine Baudet - Mixage : Benjamin Vignal

Deux lectures successives des lettres que mon arrière grand-père, Lucien, a envoyées à sa femme Eugénie et leur fils, de Drancy datées du 1er septembre 1941 au 10 septembre 1942, veille de sa déportation vers Auschwitz (par le convoi n°32). Deux lectures espacées de dix ans, si différemment interprétées, au gré des projections personnelles du moment…

Depuis qu’on ma donné une copie des lettres de mon arrière grand-père, je sais toujours où elles sont. Dans

un dossier noir à couverture très épaisse, molletonnée. Je sais les endroits successifs qu’elles ont occupé dans les lieux où je suis passée, toujours protégées, toujours accessibles.

Et que j’ai lues, donc, deux fois seulement. La première fois j’ai rencontré un arrière grand-père inconnu dont on m’avait très peu parlé, dont j’ignorais tout, si ce n’est qu’il était mort en déportation. Dans ces lettres il m’a paru digne et passif, cherchant à protéger sa Chère Eugénie. A la seconde lecture j’ai entendu ses angoisses, ses tentatives désespérées pour s’en sortir, son aspiration à vivre (ses lettres - je ne m’en suis rendu compte qu’à la seconde lecture - étaient signées : Ton Lucien pour la Vie). J’ai également compris le poids qu’avaient pris ces lettres testament pleines de ce conseil qu’il nous léguait implicitement en enjoignant par exemple à son fils de se rendre indispensable.

C’est sa voix que j’ai envie de faire entendre, et c’est peut-être aussi à lui que je souhaite m’adresser aujourd’hui pour lui expliquer doucement que, bien qu’il me soit nécessaire de m’affranchir de ses conseils pour avancer, la mélodie de sa prose particulière sonne encore à mes oreilles, m’accompagne, et enrichit ma peinture de manière diverse au gré de mes interprétations successives...

C'est en compagnie de Daniel Kenigsberg , avec qui je découvre les lettres et les toiles et d'Henri Borlant , avec qui j'échange sur cette période inconnue : celle que mon arrière grand-père a passée à Auschwitz, que je suis les traces des derniers moments de mon arrière-grand père.

Les extraits de lettre sont lus par** Juliette Plumecoq-Mech** et Daniel Kenigsberg