La contestation à gauche - Le rôle des Etats-Unis dans la guerre civile iraquienne

France Culture
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La contestation à gauche

Depuis plusieurs semaines, l’exécutif fait face à un mouvement de contestation au sein de sa majorité parlementaire. Début avril, 87 députés socialistes avaient signé un texte bientôt rebaptisé « Appel des 100 ». Ce manifeste est hostile à la politique de l’offre menée par François Hollande. Il réclame l’établissement d’un « contrat de majorité » et fixe « les conditions de la confiance » entre les parlementaires et le gouvernement dirigé par Manuel Valls. 41 députés socialistes se sont abstenus le 29 avril lors d’un vote consultatif sur le pacte de responsabilité. Les représentants de l’aile gauche du Parti socialiste menacent désormais de ne pas voter le projet de loi de finances rectificative qui sera présenté demain à l’Assemblée. Ce texte est une première mise en œuvre du pacte de responsabilité. Il prévoit notamment six milliards et demi d’euros d’allègements de charges pour les entreprises. Le Premier ministre a cherché à rallier les députés frondeurs à sa politique. Il a déclaré que « la gauche [pourrait] disparaître » d’ici à 2017 si l’action du gouvernement était entravée. Le premier secrétaire du parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, a fait part de sa volonté d’infléchir la ligne gouvernementale. Il a évoqué la possible création d’un « nouveau parti socialiste » qui pourrait s’allier avec le Front de Gauche et les écologistes. Ces derniers sont de plus en plus critique vis-à-vis de l’exécutif et cherchent à former « une alternative politique à gauche ».

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Face aux critiques, l’exécutif joue la fermeté. Manuel Valls a annoncé que les deux textes contestés au Parlement seraient défendus par le gouvernement. François Hollande, en déplacement à Andorre vendredi 13 juin, a condamné la grève dure que les employés de la SNCF ont entamé, mercredi 11 juin, à l’initiative des syndicats CGT et SUD rail. Les cheminots s’opposent au projet de réforme ferroviaire du gouvernement, dont l’examen par l’Assemblée a débuté mardi 17 juin. Ce texte prévoit une fusion de la SNCF et de RFF, dans le but de préparer le secteur à l’ouverture à la concurrence européenne. La mobilisation, qui stigmatise la « dérive libérale » de l’exécutif, a sérieusement perturbé la vie quotidienne du pays.

De leur côté, les intermittents du spectacle protestent contre l’accord paritaire signé le 22 mars dernier qui réforme leur régime d’assurance chômage. De nombreux spectacles et manifestations culturelles ont été annulés et une journée de mobilisation a été organisée dans de nombreuses villes lundi 16 juin. Ce mouvement fait planer la menace de l’annulation sur les grands festivals de l’été. Le Premier Ministre a cherché jeudi à apaiser les intermittents. Il a déclaré que l’Etat compenserait le différé d’indemnisation, qui est la mesure la plus contestée. Il a aussi déclaré qu’il « allait falloir inventer les conditions d’une nouvelle donne pour l’intermittence. »

Le rôle des Etats-Unis dans la guerre civile iraquienne

Vendredi 6 juin, les troupes armées djihadistes de l’État islamique en Iraq et au Levant (EIIL), ont lancé une grande offensive dans le nord du territoire irakien. Cette milice fondamentaliste sunnite a conquis Mossoul, la deuxième ville du pays, et contrôle désormais une large partie du territoire irakien. Elle était aux portes de Bagdad vendredi 13 juin.

L’EIIL ou Da’ish, son acronyme arabe, a été créée en 2004, à la suite de l’intervention militaire des Etats-Unis en Iraq. Elle était à l’origine la branche iraquienne d’Al-Qaida, mais elle est devenue autonome. Elle n’obéit plus qu’à son chef Abou-Bakar al Baghdadi dont même les dirigeants d’Al Qaida ont condamné l’extrême violence. Da’ish veut constituer un Etat sunnite réunissant l’Iraq et la Syrie. Elle rejette l’autorité centrale de Bagdad, aux mains de la majorité chiite depuis la chute du dictateur sunnite Saddam Hussein. Da’ish a mené depuis 2004 d’innombrables attaques et attentats contre la communauté chiite. Depuis le retrait des troupes américaines en 2011, les tensions entre Bagdad et les miliciens sunnites sont au plus fort. Elles ont atteint leur paroxysme ces derniers jours. Les djihadistes ont déjà affirmé avoir exécuté 1.700 prisonniers de l’armée iraquienne. Les miliciens alimentent un climat de terreur dans les territoires qu’ils occupent. L’ayatollah chiite Ali al-Sistani a appelé de son côté le peuple iraquien à prendre les armes. Le pays est de nouveau en guerre civile.

Ce mercredi, le Premier ministre iraquien Nouri al-Maliki a demandé l’aide militaire des Etats-Unis. L’intervention américaine de 2003 avait profondément déstabilisé le pays. Le retrait de 2011 l’a laissé dans un état de fragilité manifeste. Barack Obama a témoigné au Premier ministre irakien un soutien prudent. Le Président américain incite son homologue à former un gouvernement d'union nationale qui réunirait chiites, sunnites et kurdes. C’est à ces conditions seulement que Washington pourrait intervenir contre Da’ish. Pour autant, l’armée étatsunienne a déployé des navires de guerre dans le Golfe persique. Jeudi, Barack Obama disait envisager d’envoyer 300 conseillers militaires à Bagdad et se tenir « prêt » à une action ciblée.

Le conflit bouleverse les équilibres géopolitiques dans la région. Une alliance entre les États-Unis et l'Iran pour trouver une solution à la crise apparaît probable. Téhéran, qui craint de voir un puissant allié chiite s’effondrer, souhaite se rapprocher de Washington. Cette alliance inquiète l’Arabie Saoudite et les autres monarchies sunnites du Golfe. La Syrie de Bachar al-Assad a quant à elle proposé son aide à Bagdad.

Invités

Michaela WIEGEL, correspondante à Paris de la Frankfurter Allgemeine Zeitung

Jean-Louis BOURLANGES, professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris

Marc-Olivier PADIS, directeur de la rédaction de la revue Esprit

Thierry PECH, directeur général de la Fondation Terra Nova

Brèves

Florian ILLIES, 1913. L'été du siècle (S. Fischer, 2012)

Daniel DEFERT,* Une vie politique * (Seuil, avril 2014)

Lev DODINE, Gaudeamus , spectacle de théâtre. Présenté dans le cadre du festival Lev Dodin 2014, du 22 au 25 mai à Paris.

Sandrine VOIZOT, L'après-crise en 60 leçons (Michalon, avril 2014)

Jean-Dominique GIULIANI, Pourquoi et comment l'Europe restera le coeur du Monde, Petit traité d'optimiste (Lignes de repères, avril 2014)

Moi, Auguste, Empereur de Rome, exposition au Grand Palais à Paris (du 19 Mars 2014 au 13 Juillet 2014)