Le bilan de l'intervention militaire française au Sahel est problématique. Le dilemme paraît impossible à trancher : faut-il rester au risque de s’enliser pour des années, comme les américains en Afghanistan ? Ou faut-il se retirer, au risque de laisser le champ libre au djihadistes ?
- Monique Canto-Sperber Philosophe, directrice de recherche au CNRS, ancienne directrice de l’ENS et ancienne présidente de l'université Paris sciences et lettres (PSL), auteure de plusieurs ouvrages de philosophie antique et philosophie morale contemporaine
- Pascal Perrineau Politologue et professeur des Universités à Sciences Po, ancien directeur du CEVIPOF
- Bertrand Badie Politiste, spécialiste des relations internationales
- Christine Ockrent Journaliste et productrice de l'émission "Affaires étrangères" sur France Culture
Emmanuel Macron a manifestement le goût du contre-pied. Il y a 15 jours, contre tous les pronostics, il décidait de ne pas reconfiner le pays. Mardi dernier, au terme d’une réunion du G5 Sahel à laquelle il participait en visioconférence avec les présidents du Mali, de Centrafrique, de Mauritanie, du Niger et du Burkina-Faso, il a annoncé – là encore contre bien des prédictions – qu’il n’y aurait pas d’allègement de la force Barkhane au Mali. Du moins dans l’immédiat.
Mais ces deux contre-pieds sont de nature très différente : au plan sanitaire, il s’agit d’un choix, audacieux ou imprudent, l’avenir le dira. Au plan militaire, le statu quo annoncé témoigne, au contraire, de l’extrême difficulté à choisir la meilleure manière de sortir d’une situation inextricable. En effet, huit ans après le début de l’intervention militaire française au Mali – déclenchée par François Hollande en janvier 2013 pour éviter que la capitale, Bamako, tombe aux mains de groupes djihadistes – le moins qu’on puisse dire est que le bilan est problématique.
En dépit des moyens engagés (5100 militaires sont actuellement sur le terrain), les deux objectifs de cette intervention sont très loin d’être atteints. Le premier était de décapiter les groupes djihadistes pour pacifier la région. Tout démontre que ce n’est pas le cas. Loin de refluer, le djihadisme a plutôt métastasé tous azimuts. Le second objectif était de renforcer les Etats concernés avant de leur passer la main. Or les autorités et les forces armées locales se sont montrées, jusqu’à présent, globalement défaillantes.
Le dilemme est donc le suivant, et il paraît impossible à trancher : faut-il rester au risque de s’enliser pour des années, comme les américains en Afghanistan ? Ou faut-il se retirer, au risque de laisser le champ libre au djihadistes ?
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