- Lionel Zinsou banquier d'affaires franco-béninois, ex Premier ministre du Bénin
Le développement économique de l'Afrique, avec Lionel Zinsou
Lionel Zinsou, vous êtes franco-béninois. Vous êtes normalien et agrégé, et vous avez enseigné l’économie à l’Ecole Normale Supérieure de la rue d’Ulm. Vous avez été l’un des principaux conseillers de Laurent Fabius à Matignon de 1984 à 1986. Vous avez par la suite rejoint la Banque Rothschild dont vous avez développé les activités financières en Afrique et au Moyen-Orient. Depuis 2008, vous dirigez PAI Partners, l’un des principaux fonds d’investissements européens. Avec vous, nous allons nous intéresser au développement économique de l’Afrique.
En 2014, d’après le FMI, le taux de croissance de l’Afrique subsaharienne devrait atteindre 5,4%. C’est une croissance équivalente à celle de l’Inde et deux fois supérieure à celle des Etats-Unis. Ces bons résultats sont le fruit d’une dynamique engagée au début des années 2000. Les investissements étrangers en Afrique ont massivement augmenté. Ils devraient atteindre un montant historique de 80 milliards de dollars en 2014. La Chine représente à elle seule la moitié de ces investissements. D’après l’OCDE et la Banque africaine de développement, ces fonds contribuent à diversifier les sources de la croissance africaine. Celle-ci ne repose plus uniquement sur les secteurs pétrolier et minier. Le continent voit se développer une industrie manufacturière et de services, favorable à l’émergence d’une classe moyenne. L’agriculture n’en reste pas moins l’un des piliers de l’économie africaine. Ce secteur représente un quart du PIB africain et 60% de l’emploi.
Ce développement général du continent est tiré par un petit nombre de pays dont les performances sont remarquables. En Ethiopie, où l’Etat finance massivement des grands chantiers d’infrastructure, la croissance a atteint 9.7% en 2013. Le pays est en passe de devenir un champion régional en matière d’électricité, notamment grâce à ses investissements dans les énergies renouvelables. L’industrie manufacturière, qui profite des délocalisations, est florissante. Au Ghana, où le taux de croissance à culminé à 13,4% en 2011, la récente découverte de gisements de pétrole a soutenu le développement du pays. Avec l’or et le cacao, l’or noir fait du Ghana une grande puissance exportatrice. Le Parlement ghanéen a strictement encadré l’exploitation du pétrole afin de prévenir la corruption. Cette mesure fait figure d’exception dans une région où la présence d’hydrocarbures nuit souvent au bien être matériel des populations et à l’état de la démocratie. Au nord du continent, le Maroc ambitionne de devenir une grande puissance régionale et se présente comme un modèle de développement. Cet hiver, le roi Mohammed VI a effectué une longue tournée diplomatique en Afrique subsaharienne. Il a conclu de nombreux partenariats bilatéraux qui renforcent l’influence de son pays. En concurrence avec l’Afrique du Sud et l’Algérie, plus riches, le Maroc offre l’image d’un Etat stable. Le pays se modernise et se démocratise petit à petit. Il est l’un des principaux nœuds commerciaux du continent. Les liens forts que le Maroc entretient avec l’Europe contribuent à le rendre attrayant. Les échanges commerciaux à l’intérieur du continent sont encore faibles et devraient exploser dans les années à venir.
Les bonnes performances économiques de l’Afrique sont cependant relatives. L’indice de développement humain reste très faible dans la plupart des pays africains. La situation politique de la région est un autre sujet d’inquiétude. Les régimes autoritaires sont nombreux. Les guerres civiles se sont multipliées ces dernières années, en République démocratique du Congo, au Sud-Soudan, au Mali, en Centrafrique. La Somalie est partiellement aux mains des pirates ou des milices islamistes. En Côte d’Ivoire, après les troubles qui ont suivi l’élection présidentielle de 2011, on redoute une remontée de la violence pour le prochain scrutin, prévu en 2015.
Lionel Zinsou, d’après vous, quelle est la place que l’Afrique est appelée à jouer dans la mondialisation ? Va-t-elle suivre le modèle de développement asiatique ou bien peut-elle trouver sa propre voie ? La stabilité politique a-t-elle vraiment progressé ?
Invités
Jean-Louis BOURLANGES, professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris
Eric LE BOUCHER, éditorialiste aux Echos et co-fondateur de Slate
Thierry PECH, directeuur général de la fondation Terra Nova
Lionel ZINSOU, banquier d'affaires franco-béninois, normalien et agrégé
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