Jean-Marc Adolphe est le témoin et le dépositaire d’une histoire foisonnante. Depuis ses débuts de journaliste à Montpellier en 1981, jusqu’à cette rencontre dans un village de Picardie en 2021, 40 ans ont passé, pendant lesquels il a aiguisé son regard sur la danse, ou plutôt avec la danse.
Une Expérience signée Inès Dupeyron, réalisée par Gilles Mardirossian
Au service du travail des artistes qui la font autant qu’au service des publics qui la reçoivent, Jean-Marc Adolphe est un passeur. En tant qu’auteur, critique, conseiller artistique, et pour avoir fondé en 1993 la revue Mouvement, pour avoir noué la danse à l’écriture qu’il a toutes les deux chevillées au corps, il occupe une place singulière dans cette histoire-là, qu’il a traversée en électron libre, farouchement passionné.
Dans sa maison, en lisière de forêt, reposent 40 ans d'archives de danse. C’est une visite à Jean-Marc dans un été qui ressemble à un automne, si bien que certains trésors sont exhumés au son d'un feu de cheminée… Inès a 30 ans, Jean-Marc a plus du double. C'est l'expérience d'une transmission qui n'a rien de poussiéreux, et tout de joyeux : c'est une conversation en mouvement, qui suit les méandres d'une maison qu'on habite comme on habite un corps. Ça circule dans un décor de bric et de broc qui craque, ça respire au gré des archives avec lesquelles Jean-Marc vit comme avec des vivants qu'on aime : tranquillement. En bon "conservateur anarchiste" comme il se définit dans un sourire, Jean-Marc garde tout : coupures de presse de confrères et consœurs, affiches, dossiers de presse jusqu'aux doubles exemplaires, dessins, cassettes, disquettes, bouquins, photographies, correspondances manuscrites, notes griffonnées en marge de programmes dans le noir des salles de spectacle… On tire au hasard de l'archive, on ouvre des cartons, on improvise. On se promène librement dans les souvenirs de Jean-Marc, guidés par sa voix et sa malice généreuses, à l’appui des poètes qui habitent son cœur et sa maison, autant que la danse.
Avec pour fil rouge une image qui est la sienne, apparue d'emblée pour qualifier son travail de passeur :
Je ne suis qu'un corps conducteur de la danse.
C'est ce fil que tire cette Expérience pour défricher la forêt de l'archive sauvage, vivante, magnétique, avec laquelle vit Jean-Marc, aujourd'hui retiré loin des lieux où la danse se fabrique, se transmet, se donne à voir. Certains fragments d’histoires survivent dans sa mémoire, matérielle et immatérielle. Car l’imaginaire enregistre autant que l’image. Venue chez lui pour questionner l'archive, c'est finalement ces matières-là, arpentées ensemble, au hasard ou presque, qui questionnent Inès. L'occasion de faire entendre ce que la trace a à nous raconter de brut et de vivant, à travers des histoires de danse dont Jean-Marc est l'un des témoins, l'un des dépositaires, l'une des mémoires vives. L’un des corps conducteurs, à travers lequel des histoires passent.
Pour en savoir plus
Bibliographie
- Nuit debout et culture assoupie, Jean-Marc Adolphe, L’Entretemps, 2016, préface de Bernard Noël
- Crise de la représentation, fable de politique-fiction, Jean-Marc Adophe, L’Entretemps, 2003
- Qu’ils crèvent les critiques !, Jean-Pierre Léonardini, Les Solitaires Intempestifs, 2018. Journaliste et critique de théâtre, Jean-Pierre Léonardini a effectué l’essentiel de sa carrière au journal L’Humanité, où il était responsable du service culturel et critique attitré. Jean-Marc Adolphe y a été responsable de la rubrique "danse" de 1985 à 1991.
Ressources complémentaires
- Mouvement, magazine culturel interdisciplinaire est disponible en kiosques, librairies, abonnements et sur mouvement.net. En 1993, Jean-Marc fonde la revue qu’il dirige jusqu’en 2014.
- Les humanités, média alter-actif. Ce journal en ligne est un média réellement alternatif, dans sa conception éditoriale comme dans la philosophie participative qui l’anime. Produit et développé par l’association In Corpore en affinités avec le collectif "Festival des humanités", il cherche à faire récits d’expériences, comme relais d’initiatives, gisement de ressources. Jean-Marc Adolphe, cofondateur de l’aventure, travaille activement au journal et au festival.
- La médiathèque du CND, portail documentaire du Centre National de la Danse, où plus de 60 000 documents imprimés et audiovisuels sont référencés dans le catalogue, et où plus de 50 000 documents numériques sont consultables en ligne. Plusieurs ouvrages et contributions de Jean-Marc Adolphe à l’histoire de la danse y sont consultables.
- Le théâtre de la Bastille, un "théâtre aux aguets" dont Jean-Marc Adolphe a assuré la programmation danse de 1994 à 2002.
... des mots du Roberto Juarroz, un poète cher à Jean-Marc, nous accompagnent dans cette promenade buissonière :
Tout chemin est une déviation.
Musiques
- Cantate BWV26, JS Bach (aria basse So schnell dans "Ach wie flüchtig, ach wie nichtig")
- Suite pour violoncelle N°5, JS Bach, interprétation Pablo Casals
- Dance with me, Adam Green
Générique
Archives : Jean-Marc Adolphe. La voix de Pina Baush sur K7 audio est traduite par Michel Bataillon, qui a accompagné Jean-Marc dans ce voyage jusqu'à la chorégraphe au Tanztheater de Wuppertal, en 2006, pour l'entretien qu'elle lui a accordé à l'occasion d' un livre de photographies de Guy Delahaye (Actes Sud), sobrement intitulé Pina Baush. Des textes de Jean-Marc Adolphe y dialoguent avec les photographies de Guy Delahaye.
Prise de son : Hélène Langlois
Mixage : Pierric Charles
Réalisation : Gilles Mardirossian
Une création sonore d'Inès Dupeyron
Remerciements
Merci à la médiathèque du Centre National de la Danse ; merci à Lyse Seguin ; merci à Lou Quevauvillers, Thibaut Michel et au théâtre de la Bastille pour avoir accueilli leur danse aux côtés d’Inès Dupeyron sur le plateau de la salle du bas.
Et surtout, merci à Jean-Marc Adolphe, dont on espère lire un jour des mémoires de danse, chantier en cours qui a inspiré cette rencontre radiophonique.
L'équipe
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