Les "new atheists" accusés d'islamophobie

France Culture
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Le débat, lancé par les « new atheists » , les nouveaux athées, qui combattent la croyance religieuse au nom de l’état des connaissances scientifiques, est en train de rebondir sur la Toile. Dans un long article, très documenté, sur Salon, Nathan Lean les accuse d’islamophobie.

Les « nouveaux athées », c’est ce groupe de scientifiques et de philosophes anglo-saxons, qui ont publié, contre la religion, contre Dieu, des essais qui se sont classés, pendant des mois, dans la listes des best-sellers. « Pour en finir avec Dieu », du célèbre biologiste britannique Richard Dawkins, a été traduit en 31 langues et s’est vendu à un million et demi d’exemplaires. Les livres de Sam Harris, un spécialiste américain des neurosciences ont tous été de très grands succès dans le monde anglo-saxon, à commencer par le premier intitulé The End of Faith (La fin de la foi), qui n’a pas plus que les suivants bénéficié d’une traduction française. « Dieu n’est pas grand » du regretté polémiste Christopher Hitchens, qui lui a été édité en français chez Belfond, a été classé premier dans les ventes de livres par le New York Times, lors de sa parution en anglais, en 2007. Breaking the Spell (Rompre le charme) de Daniel Dennett, célèbre philosophe américain, spécialiste des sciences cognitives, n’a pas connu un tel succès, mais son livre passe pour l’un des meilleurs de la série.

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Plusieurs éditorialistes les accusent donc, ces temps-ci, d’en avoir contre l’islam plus que contre les autres religions monothéistes. Sam Harris a écrit, en effet : « L’islam, plus qu’aucune autre religion jamais inventée par des humains, a tous les traits d’un culte de la mort », « l’idée selon laquelle l’islam est une religion de paix, détournée par des extrémistes, est une dangereuse illusion. » Dawkins, lui aussi, critique de l’islam, a récemment admis qu’il n’avait jamais ouvert le Coran. Ces intellectuels, issus de la gauche rationaliste, vont-ils faire cause commune avec la droite bigote, demande Nathan Lean ?

C’est dans ce contexte qu’il convient de lire le dossier que publie la revue de gauche britannique The NewStatesman, cette semaine. Il publie des extraits d’essayistes qui, tout en proclamant leur propre athéisme, estiment que les religions peuvent présenter une utilité sociale et qu’elles n’ont pas à renoncer à leurs croyances pour être admises dans le débat public.

Alain de Botton estime ainsi que nous avons besoin de nouveaux prêtres, car le souci de son âme au quotidien ne saurait être abandonné aux seuls psychothérapeutes de nouveaux évangiles, que nous pourrions trouver dans les chefs-d’œuvre de la grande littérature, si seulement les professeurs acceptaient de les considérer à nouveau comme des réservoirs de sagesse.

Francis Spufford estime que les « new atheists » sont des protestants qui s’ignorent. Comme leurs ancêtre puritains, ils croient qu’un rideau de superstitions dérobe la vérité ultime aux pauvres victimes du « papisme ». Mais leur vérité à eux, c’est la science, et elle n’a pas de réponse à offrir aux questions fondamentales.

Jim Al-Khalili estime que, dans la Grande-Bretagne d’aujourd’hui, les non-croyants ont gagné la partie et qu’il ne leur coûterait rien de respecter un peu plus les convictions de ceux qui croient en Dieu. « Si c’est important pour vous, cela ne me dérange pas », écrit-il, sauf si vous prétendez qu’il ne saurait y avoir de morale sans religion – ce qui n’est pas acceptable.

Enfin, dans la revue Prospect de ce mois, le célèbre philosophe Anthony Grayling (inconnu chez nous), critique les « New Atheists », leur reprochant notamment d’avoir adopté les positions messianiques et intolérantes, qu’ils reprochent tant aux croyants… Dans le même article, il juge cependant inacceptable que 26 évêques anglicans siègent à la Chambre des Lords, dans un pays où seulement 3% de la population va régulièrement entendre l’office, le dimanche…

Toutes les références sont à retrouver sur le site de La vie des idées. A lundi, aux Matins !