Et si on franchissait le point Godwin avant 7 heures du matin ? Oui, franchir le point Godwin sur un bateau, un bateau plein de réfugiés qu’on ne laisserait débarquer nulle part, un bateau qui s’échouerait sur l’intransigeance des nations, malgré la détresse des passagers à bord.
Alors, peut-être y a-t-il une histoire semblable dans l’actualité d’aujourd’hui. On trouve cela en tout cas dans l’actualité d’hier. L’histoire est notamment racontée dans un livre de Daniel Schneidermann, « Berlin 1933 ». Cette histoire, c’est celle du Saint-Louis.
En Mai 1939, le navire Saint-Louis embarque 938 juifs pour fuir l’Allemagne nazie, quelques mois après la nuit de Cristal. Destination : Cuba pour obtenir un visa d’entrée aux Etats-Unis. Les passagers ont tous payé un visa pour débarquer à Cuba, mais effrayé par une telle invasion, le président cubain Federico Bru promulgue le décret 937, au terme duquel il faut une autorisation supplémentaire pour débarquer sur l’île et, surtout, il faut payer une somme faramineuse, 500 dollars par passager débarqué.
Le navire arrive à Cuba, mais aucun passager n’est autorisé à débarquer. Il faut croire que le lobby juif américain n’est pas suffisamment puissant, puisque seule une poignée de réfugiés est autorisée à débarquer sur l’île. Ni les Etats-Unis, ni le Canada ne veulent être submergés par ces 938 réfugiés venus d’Europe fuyant un certain Hitler. Retour vers l’Europe ou bien entendu personne ne sait que faire de ces 938 migrants.
Toutes les solutions sont envisagées, aucune n’aboutit. Le capitaine songe même un instant à mettre le feu au navire pour obliger les nations à recueillir les réfugiés. Après de nombreuses heures de négociations, le Saint-Louis est autorisé à accoster en Europe, et après 40 jours d’errance, ces réfugiés allemands débarquent à Anvers, et sont accueillis en Hollande, en France et en Grande-Bretagne.
Nous sommes alors en Juin 1939, à l’époque personne ne sait bien sûr que le tiers des passagers du Saint Louis finira dans les camps de la mort. Le problème, c’est qu’aujourd’hui nous le savons. Et pourtant cela ne change rien ou si peu de choses.
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