Edgar Morin a presque 100 ans…

Edgar Morin (2013)
Edgar Morin (2013) ©Getty -  Eric Fougere
Edgar Morin (2013) ©Getty - Eric Fougere
Edgar Morin (2013) ©Getty - Eric Fougere
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Presque… Le 8 juillet prochain, mais c’est aujourd’hui que le magazine « L’Obs » le célèbre.

C’est vertigineux d’avoir 100 ans, même si l’on a coutume de dire jusqu’à 120 ans. C’est particulièrement vertigineux d’avoir 100 ans, surtout après avoir traversé le XXe siècle, quand on s’appelle Morin, enfin Nahum. Et que l’on a été tour à tour résistant, communiste, post-communiste, sociologue. 

Et comme l’actualité est taquine, Edgar Morin fête ses 100 ans, le jour où Emmanuel Macron va à Saint-Cirq-Lapopie, incroyable village dans l’un des plus beaux coins de France, entre Sarlat et Rocamadour, probablement l’un des endroits rêvés pour comprendre ce que signifie la douceur de la France. Mais Saint-Cirq-Lapopie n’existe plus, je veux dire que ce village que le président a choisi relève désormais plus du décor habilement entretenu que du cadre de vie traditionnel des Français. Et c’est là où je songe à Edgar Morin, et à l’une de ses premières études, celle qui l’a véritablement inscrit parmi les sociologues, l'étude à la commune de Plozévet. 

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769 kilomètres séparent Saint-Cirq-Lapopie de Plozévet, le Lot de la Bretagne. Mais en réalité c’est surtout une poignée de siècles qui sépare le village qu’Edgar Morin a étudié pendant deux ans en 1967 et la commune de Saint-Cirq-Lapopie aujourd’hui, justement appréciée des visiteurs. Qu’est ce qui sépare les deux villages ? La modernité. En 1967, Morin a l’âge de 46 ans, Edgar Morin emmène une équipe de chercheurs du CNRS pour étudier la transition vers la modernité de ce petit village breton, la manière dont les jeunes vivent, dont ils découvrent la mode, la politique. Mais la façon aussi dont les plus âgés découvrent cette terra incognita : les jeunes. Car s’il fallait résumer en un mot ce qu’avait découvert ce très vieil homme, ce serait la jeunesse, les adolescents en transition, pour reprendre le titre de l’un de ses articles paru alors, avec un dilemme : comment suivre la mode quand on habite Plozévet - autrement dit une petite commune bretonne pratiquement aussi éloignée de Paris que de San Francisco - ? Morin signa un article intitulé les « Yéyés du Finistère », un article qui fit polémique, comme s’il avait intitulé son papier « les débauchés du petit séminaire ». 

Et voilà la différence. Plus d’un demi-siècle après Plozévet, une telle question n'existe plus, ni à Saint-Cirq-Lapopie ni ailleurs en France. Tous sont branchés sur la mode comme on est branché sur le secteur. Le village mondial a remplacé le village tout court, à Saint-Cirq-Lapopie le décor change, pas le contexte.  

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