Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des grands parents communistes

Les présidents Vladimir Poutine et Donald Trump au sommet de l'APEC en novembre 2017.
Les présidents Vladimir Poutine et Donald Trump au sommet de l'APEC en novembre 2017. ©AFP - JORGE SILVA / POOL
Les présidents Vladimir Poutine et Donald Trump au sommet de l'APEC en novembre 2017. ©AFP - JORGE SILVA / POOL
Les présidents Vladimir Poutine et Donald Trump au sommet de l'APEC en novembre 2017. ©AFP - JORGE SILVA / POOL
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Moi oui, j’ai eu cette chance, celle d’avoir un grand-père qui était communiste, et même ultra-communiste, disons même communiste stalinien mais stalinien pragmatique, pas au point d’aller vivre en URSS, et surtout stalinien dollarisé...

Ayant dévissé un jour le meuble poste de radio qu’il avait dans son salon, déjà une passion pour l’intérieur de la radio, je me suis rendu compte qu’il contenait ses économies en dollars. En somme, mon grand-père était un communiste responsable, il avait bien compris que ses économies en roubles ça n’était pas une bonne idée, que s’il devait prendre la fuite une fois de plus, la devise américaine serait plus utile que la russe.

Mais si je vous raconte cette histoire c’est parce que cet homme, au-delà de ses idiosyncrasies, récapitulait les deux passions du XXe siècle : les États-Unis et l’URSS, l’Amérique et la Russie comme il disait dans un français approximatif. Deux pays, deux passions de l’époque, deux passions dévorantes, pour deux pays qui incarnaient chacun une utopie, le communisme réel versus la liberté réelle, le marxisme et son contraire.

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Un demi-siècle plus tard, la situation est aux antipodes, États-Unis et Russie constituent deux repoussoirs convenables, deux pays pratiquement dystopiques, l’un ayant déclenché l’un des conflits les plus injustes du XXIe siècle, la Russie tentant de recoloniser l’Ukraine, l’autre étant menacé par une dégradation de la politique nommée faute de mieux « populisme ». Poutine et Trump, deux versions du cauchemar contemporain, l’un n’est pas équivalent à l’autre, mais l’un et l’autre ont deux bonnes raisons de faire peur.

Tout le monde n’a pas la chance d’avoir des grands-parents staliniens, et cependant je connais un communiste qui avait prévu le cauchemar contemporain, qui stigmatisait d’un même geste URSS et États-Unis, il s’appelait Charles Levinson, auteur d’un livre au titre évocateur, Vodka Cola. Dans Vodka Cola, ce syndicaliste canadien renvoyait dos à dos les deux systèmes, estimant qu’une convergence vers le pire allait réunir États-Unis et Union Soviétique, que l’hybridation des deux systèmes allait les transformer en deux terres cauchemardesques, portant au pinacle l’injustice et la répression. Vodka Cola, quel que soit le résultat des élections de mi-mandat, on est pratiquement sûr d’avoir la gueule de bois.