

Encore une peinture qui incite au racisme… Selon des militants autoproclamés de l’antiracisme, ici il s’agit d’une fresque d’Hervé Di Rosa présentée à l’Assemblée Nationale.
Cette fresque est taxée de banaliser le racisme, de refléter une esthétique, je cite, « située entre Tintin au Congo et Banania », selon ses détracteurs, alors qu’il s’agit d’une fresque destinée à commémorer l’abolition de l’esclavage. Les noirs y sont représentés avec le style satirique habituel de Di Rosa, avec de grosses lèvres, lesquelles sont aussi utilisées chez lui — précisons-le — avec les blancs.
Des accusations absurdes donc, où il est encore une fois question de soupçonner l’existence d’un racisme inconscient, et qui abîment le combat antiraciste véritable. Mais une fois que l’on a dit cela, on voit bien que ce type d’affaire est en train de se multiplier et il n’est donc pas inutile de comprendre pourquoi.
Un philosophe, Justin Smith, donne une tribune dans le New York Times qui éclaire les raisons de cette prolifération d’accusations absurdes de racisme. Ce que dit ce philosophe en substance, c’est qu’une forme de satire est désormais incompréhensible — et de situer l’un des jalons dramatique de cette incompréhension en 2015, avec l’attentat contre Charlie Hebdo. Pour Smith, la satire n’est plus possible à l’heure des réseaux sociaux. La satire fonctionne souvent en empruntant le regard de l’autre, parfois le regard de l’autre raciste, en utilisant des propos rapportés. Quand on dit d’une satire qu’elle va trop loin, ajoute ce philosophe, c’est qu’il fait seulement son métier.
C’est un problème classique, vieux comme le texte de Montesquieu sur l’esclavage, un texte où Montesquieu résume les arguments des défenseurs de l’esclavage, il le fait si bien qu’on a pu parfois le classer parmi les défenseurs de la traite des noirs, alors qu’il les présente en réalité pour les ridiculiser.
En fait ce qui est en train de se perdre, c’est le sens de l’ironie, la capacité de décrypter l’ironie, l’ironie qui consiste bien souvent à résumer certains propos pour mieux les ridiculiser, avec une frontière qui sépare la satire, la caricature, et l’objet de la satire ou de la caricature. La satire, en l’occurrence du racisme, avec une frontière est de plus en plus impossible à distinguer pour les yeux de nos contemporains. L’habitude des réseaux sociaux nous coupe paradoxalement du contexte social, c’est cela le paradoxe, nous étions finalement plus connectés, avant la connexion.
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