La SNCF et l'opinion

Gare de Lyon, le 3 avril 2018
Gare de Lyon, le 3 avril 2018 ©AFP - LUDOVIC MARIN
Gare de Lyon, le 3 avril 2018 ©AFP - LUDOVIC MARIN
Gare de Lyon, le 3 avril 2018 ©AFP - LUDOVIC MARIN
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Pour bien faire, il faudrait réaliser un sondage pour savoir si c’est l’opinion qui doit trancher la légitimité des conflits sociaux ou des réformes.

Avec
  • Guillaume Erner Docteur en sociologie et producteur des Matins de France Culture

La grève des cheminots est-elle justifiée ?

Je vais vous le dire nettement : cette grève est injustifiée.Tout simplement parce qu’une nette majorité de Français désapprouve le mouvement des cheminots. Allez non, c’est une blague, je lisais juste le titre du Figaro qui publie un sondage expliquant que 57 % des Français rencontrés par l’institut Odoxa sont contre le mouvement. 

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Ce qui est rigolo, c’est que ces 57 % des Français s’opposent à l’autre majorité des Français, qui sont eux favorables au mouvement, interrogés par l’institut Elabe : 44 % seraient favorables à ce mouvement. Cette grève a donc au moins un mérite, mobiliser 101 % des français, et par ailleurs, permettre aux instituts de sondage de se refaire une petite santé.

Car ce qui est mené, c’est la bataille de l’opinion, et j’aimerais m’arrêter un instant sur cette expression "bataille de l’opinion". Pour bien faire, il faudrait réaliser un sondage pour savoir si c’est l’opinion qui doit trancher la légitimité des conflits sociaux ou des réformes. 

Car il y a une différence entre le peuple et l’opinion : la démocratie est du ressort du vote, l’opinion est du ressort de la doxa, de l’avis éclairé ou éteint, qui ne peut être convoqué pour trancher dans un sens comme dans un autre la légitimité d’une mesure. Enrôler ce pseudo concept qu’est l’opinion dans la question de la légitimité de la grève est aussi pertinent que de dire qu’une mesure serait juridiquement fondée parce qu’elle est politiquement majoritaire. 

En d’autres termes, il y a des domaines ou le jugement de la majorité n’entretient aucun rapport avec la question de la vérité, si tant est, ce qui n’est pas une mince question, qu’un sondage puisse jauger de ce quelque chose que l’on appelle l’opinion. Mais cette évocation de l’opinion a au moins un mérite : plus on parle de l’opinion des personnes sur la réforme de la SNCF, moins on parle de la réforme de la SNCF.

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