Qui a écrit le message à la nation que vient d’adresser le président Bouteflika aux algériens ?

Le Président Abdelaziz Bouteflika le 23/11/2017 à Alger.
Le Président Abdelaziz Bouteflika le 23/11/2017 à Alger. ©AFP - RYAD KRAMDI
Le Président Abdelaziz Bouteflika le 23/11/2017 à Alger. ©AFP - RYAD KRAMDI
Le Président Abdelaziz Bouteflika le 23/11/2017 à Alger. ©AFP - RYAD KRAMDI
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C’est une vraie bonne question, et je me la pose d’ailleurs à chaque fois que je reçois un texte de plus de deux lignes en provenance d’un homme politique : je me demande quel khâgneux a bien pu écrire cela.

D’ailleurs ça n’est pas pour me vanter mais je connais suffisamment d’intellectuels prolétaroides pour être désormais capable de deviner qui est le prof de lettre ou l’agrégé d’histoire qui a écrit cette inoubliable biographie que notre cher ministre vient opportunément de publier juste avant les élections. 

Oui, mais voilà le message d’Abdelaziz Bouteflika pose un problème supplémentaire : non seulement il ne l’a probablement pas écrit ce message, mais on peut même imaginer qu’il ne l’a pas relu. Alors, vous allez me dire que cela ne fait pas de différence fondamentale vis-à-vis d’autres hommes politiques, français, belges ou algériens, cela crée uniquement une différence en ce sens que l’on se demande évidemment si Abdelaziz Bouteflika est capable de relire un message. 

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Du coup on se surprend à relire plusieurs fois cette longue lettre — j’imagine que la plume de Bouteflika était payée au feuillet – pour y voir le clin d’œil justement d’une plume un peu malicieuse, notamment au travers des répétitions insistantes du « Je comprends, je comprends, je comprends aussi, je comprends enfin » — manière de clouter, comme on dit dans le métier, que Bouteflika n’a rien perdu de sa légendaire alacrité : il comprend tout c’est juste que l’expression est un peu étrange. En outre les plumes algériennes n’ont rien à envier aux plumes françaises, je veux dire par là qu’elles aussi pourraient écrire plus lourd, mais elles devraient se forcer. 

Dans son dernier message Bouteflika concourt ainsi plusieurs fois au Nobel de la langue de bois et du style de plomb, en voici un exemple : « Je comprends — écrit Bouteflika, enfin sa plume, vous m’avez compris — aussi le décalage qui a pu être source de préoccupation entre, d’un côté, la tenue de l’élection présidentielle à une date techniquement appropriée en tant que jalon de gouvernance dans la vie institutionnelle et politique et, de l’autre, l’ouverture, sans délai indu, du vaste chantier, politiquement hautement prioritaire, de conception et de conduite de réformes profondes dans les domaines politique, institutionnel, économique et social, avec la participation la plus large possible et la plus représentative de la société algérienne » – et là je peux respirer, j’arrête là parce qu’il reste encore quelques feuillets. Comme aurait pu ajouter Bouteflika, si vous m’avez compris c’est que je n’ai pas été assez clair…