Georges Vigarello : "La fatigue naît de la résistance de soi"

"Histoire de la fatigue. Du Moyen-Age à nos jours" paraît aux éditions du Seuil.
"Histoire de la fatigue. Du Moyen-Age à nos jours" paraît aux éditions du Seuil.  - Seuil
"Histoire de la fatigue. Du Moyen-Age à nos jours" paraît aux éditions du Seuil. - Seuil
"Histoire de la fatigue. Du Moyen-Age à nos jours" paraît aux éditions du Seuil. - Seuil
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En cette éprouvante fin d'année 2020 et alors que la crise sanitaire s'intensifie, nous sommes nombreux à être pris d'une grande fatigue. L'occasion de se pencher sur son histoire, avec l'historien Georges Vigarello qui fait paraître "Histoire de la fatigue. Du Moyen-Age à nos jours" (Seuil).

Avec
  • Georges Vigarello Historien, philosophe, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales

"La fatigue, faiblesse diffuse, insatisfaction obscure, insuffisance obstinée, est devenue l’une des manières d’être de notre temps", écrit l'historien Georges Vigarello dans son Histoire de la fatigue. Du Moyen Age à nos jours, publié aux éditions du Seuil. Un parcours qui croise histoire du corps et de sensibilités, des structures sociales et du travail, de la guerre et du sport, jusqu’à celle de notre intimité.

En cette éprouvante fin d'année 2020 et alors que la crise sanitaire s'intensifie, nous sommes nombreux à être pris d'une grande fatigue. L'occasion de se pencher sur son histoire, avec Georges Vigarello. Au fil du temps, les symptômes de la fatigue ont évolué, les mots pour l'exprimer, aussi : "langueur", "dépérissement", "pénibilité"… Alors se déploient des explications, des degrés de fatigue se précisent et des revendications se font jour.

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Directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, Georges Vigarello a publié de nombreux ouvrages et dirigé avec Alain Corbin et Jean-Jacques Courtine une Histoire du corps (Seuil, 2005-2006), une Histoire de la virilité (Seuil, 2011) et une Histoire des émotions (Seuil, 2016-2017). 

On a le sentiment que la fatigue a toujours existé. En réalité, elle est passée par énormément de changements. Aux époques antérieures, la fatigue est physique : elle est celle du voyageur, du combattant ou du clerc. Puis, insensiblement, quelque chose de l'ordre de l'interrogation sur soi s'est accentué, quelque chose de l'ordre du psychologique s'est amorcé, lié à une conscience accrue de nous mêmes. Cela a créé une nouvelle forme de fatigue. 

La fatigue psychologique a grandi en importance. Les raisons sont multiples et révèlent différents versants de notre société : le travail a changé, il est centré sur les sociétés ternaires, sur la relation aux autres, ce qui conduit à une fatigue purement psychologique. Un deuxième exemple, ce sont les micro ordinateurs : le travail consiste en l'assimilation des informations que l'ordinateur vous donne. (...) L'interrogation sur la fatigue met en scène, à chaque époque, ce qui est important : faire l'histoire de la fatigue, c'est faire l'histoire des sociétés, de ses enjeux. 

Le burn-out est cette rupture totale qui fait que vous êtes déconnecté. Les premières études ont d'ailleurs porté sur les soignants, car ils sont exposés à des facteurs de fatigue multiples : des facteurs physiques, mais aussi psychologique, traversés de ces questions : "Comment réagir face à la mort ? Comment ne pas douter de nos outils lorsque, parfois, ceux-ci échouent ? De ce point de vue, leur fatigue est considérable.

Pour aller plus loin : 

À réécouter : 2020 : grosse fatigue ?
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À réécouter : Ode à la fatigue
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