Annie Lulu : "Ce roman m'a moi-même prise au dépourvu"

L'écrivaine Annie Lulu.
L'écrivaine Annie Lulu.  - © Francesco Gattoni
L'écrivaine Annie Lulu. - © Francesco Gattoni
L'écrivaine Annie Lulu. - © Francesco Gattoni
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L'écrivaine Annie Lulu, dont le remarqué premier roman "La Mer noire dans les Grands lacs" est publié chez Julliard.

Avec
  • Annie Lulu Ecrivaine

Qualifié de "brillant", "ambitieux", "flamboyant" dans la presse francophone, le premier roman d'Annie Lulu, La Mer noire dans les Grands lacs (Julliard), est le récit d'une jeune femme, Nili, enceinte, qui raconte son histoire à son enfant à naître. Elle-même est née d'une mère roumaine et d'un père congolais, on pourrait dire "métisse", à Bucarest, on dit plutôt alors "mulâtresse". Ceausescu vient de tomber, pays meurtri, père parti, mère honteuse, qui met du coton dans les oreilles de sa fille non désirée qu'elle n'entende pas les insultes dehors et qui nourrit son enfant de livres pour lui trouver une raison d'exister. Puis vient la préparation de la thèse, en France, et l'envie irrépressible d'aller sur la terre du père. Nili dit : "Je n'ai pas su grand-chose de lui jusqu'à ce que l'Afrique vienne en moi et que je vienne ici, au Congo, à l'est du cœur du monde."

Ce premier roman n'est pas une autobiographie, mais la rencontre entre deux géographies qui sont celles de l'auteure : la Roumanie et le Congo. 

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Au départ Nili est née dans des vers de poésie. C'est un personnage qui a émergé à travers des images et qui, petit à petit, a pris chaire, a pris corps, sous forme d'une sorte de rencontre vocale entre elle et moi. Elle a eu envie de m'accompagner, j'ai eu envie de lui donner naissance, mais je ne m'attendais pas à cette vie-là. Ce qui était possible avec la voix de Nili, la figure qu'elle représentait, c'était de pouvoir faire un voyage intérieur. 

Cet être, qui n'arrive pas à se situer, qui ne trouve de place nulle part, va tenter de se dire que ce "nulle part" lui appartient, qu'elle va le dominer. Cela passe chez elle par les études, la lecture, et cela lui confère une image d'elle-même qui lui permet d'avancer. Mais elle a cette lucidité, de se dire que, quelque part, elle est aussi analphabète : il y a une rencontre contradictoire entre le désir de sa mère de la pousser vers son cerveau, loin de son corps, et le besoin très sensuel, épidermique, de se connaître et de se reconnaître dans l'autre. 

Il y a cette idée d'un voyage de mélancolie en mélancolie, de blessures en blessures, que Nili porte des générations qui l'ont précédées. C'est ce poids, que l'on entend chez elle, cette sorte de lourdeur, de pesanteur. Et en même temps, il y a en elle ce mouvement émancipateur. Il y a quelque chose de cela dans le blues, qui est la musique de la blessure et qui est en même temps une parole extrêmement libérée. 

Pour aller plus loin : 

Le Choix musical d'Annie Lulu : 

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