Arancha Gonzalez : "Renforcer la culture politique de l'Union européenne"

L'ancienne ministre des Affaires étrangères de l'Espagne, Arancha Gonzalez.
L'ancienne ministre des Affaires étrangères de l'Espagne, Arancha Gonzalez. - JAVIER SORIANO / AFP
L'ancienne ministre des Affaires étrangères de l'Espagne, Arancha Gonzalez. - JAVIER SORIANO / AFP
L'ancienne ministre des Affaires étrangères de l'Espagne, Arancha Gonzalez. - JAVIER SORIANO / AFP
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L’entrée de l’Ukraine dans l’UE et ses conséquences, au lendemain du sommet européen. Avec Arancha Gonzales, ancienne ministre espagnole des Affaires étrangères et de l'Union européenne de janvier 2020 à juillet 2021, doyenne de l'école des affaires internationales de Science-Po Paris

Avec
  • Arancha Gonzáles Laya Doyenne de la Paris School of international Affairs (PSIA), ancienne ministre espagnole des Affaires étrangères
  • Romain Huret Historien, spécialiste des États-Unis

Une deuxième heure en deux temps : l’ancienne ministre des affaires étrangères et de l’Union européenne espagnole, Arancha Gonzalez, vient commenter la décision du Conseil européen d’acter la candidature de l’Ukraine et de la Moldavie dans l’Union européenne.

Mais avant cela, l’analyse de l’historien des Etats-Unis Romain Huret, directeur d'études à l'EHESS, sur la décision de la Cour suprême américaine qui enterre l’arrêt Roe vs Wade sur l’avortement.

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L'arrêt Roe v. Wade enterré

"On estime entre 23 et 24 le nombre d'Etats qui pourraient soit interdire, soit limiter de manière drastique l'avortement. Suite à cette décision, nous allons donc avoir une Amérique divisée en deux, avec d'un côté les États où l'avortement sera légal et de l'autre, ceux où l'avortement sera interdit et considéré comme un crime : les médecins qui le pratiqueront pourront encourir des peines de prison extrêmement longues", explique Romain Huret, historien des Etats-Unis, directeur d'études à l'EHESS.

" Des études ont montré qu'il n'y avait pas forcément de changements quantitatifs entre le moment où l'avortement est légal et le moment où il est illégal. Ce qui change, en revanche, ce sont les conditions de sécurité. Les femmes les plus pauvres auront beaucoup de mal se déplacer pour aller dans d'autres États, car on sait qu'il est très coûteux de se déplacer, surtout aux Etats-Unis. Donc nous allons voir apparaître à nouveau une médecine de classe, avec les plus pauvres qui feront avec les moyens du bord et qui mettront en danger leur corps de femme ", poursuit-il.

"Je crois que c'est le moment d'être fier d'être européenne et d'être européen. La santé est un droit; ce n'est pas une marchandise. La santé ne doit pas non plus être l'objet d'une guerre culturelle, comme on voit aux Etats-Unis. Donc, soyons fiers des démocraties européennes fortes, qui protègent les droits des femmes à décider. (...) C'est une régression pour la démocratie, majeure aux Etats-Unis, qui est quand même un pays qui a été notre flambeau en matière de démocratie", réagit Arancha Gonzalez.

L'Ukraine candidate auprès de l'UE

Quatre mois après l'entrée en guerre de la Russie contre l'Ukraine, un pas a été franchi cette semaine: les 27 chefs de gouvernement réunis jeudi ont accordé le statut de candidat à l'Union européenne, de l'Ukraine et de la Moldavie, une décision naturellement saluée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

"C'est un long processus qui commence. La première étape est de commencer en disant à ces pays : "vous êtes candidats à devenir membre à l'Union européenne". La deuxième étape sera d'ouvrir les négociations, ce qu'attendent l'Albanie et la Macédoine. L'étape trois sera la déclaration d'intérêts de l'Ukraine et de la Moldavie dans l'Union européenne. C'est donc un long chemin encore à parcourir, parce que les décisions qui concernent l'entrée d'un pays dans l'Union sont des décisions de droit : ce sont des décisions qui ont à voir avec les efforts entrepris par les pays pour s'aligner sur les normes et les règles des institutions communautaires, et cela prend beaucoup de temps", explique Arancha Gonzalez.

D'autres en pays sont en attente d'une telle décision : la Macédoine du Nord, depuis 2005, l'Albanie depuis 2014, le Monténégro depuis 2010 et la Serbie depuis 2012.  "On peut très bien comprendre leur impatience", commente l'ancienne ministre des Affaires étrangères et de l'Europe espagnole. "D'autant plus que certains d'entre eux ont  fait des pas importants vers l'Union européenne. Le cas ukrainien et moldave est donc le bon moment pour prendre ses responsabilités et faire avancer ceux qui sont déjà dans le peloton. Les Balkans sont des territoire essentiel dans ces moments géopolitiques que l'on vit. Il faut donc que les Etats membres de l'Union se responsabilisent en faisant vers eux des pas supplémentaires", poursuit-elle.

Construire la communauté européenne

"Il faut insister sur la culture de construction d'un consensus européen. Surmonter les désaccords ne relève pas que de l'institutionnel : c'est aussi culturel. Lorsqu'on regarde l'Union européenne de l'extérieur, les pays tiers observateurs pensent que l'on passe beaucoup de temps à parler entre nous pour arriver à des conclusions. Et c'est vrai. Mais c'est comme ça que l'on construit, non pas une simple décision, mais une communauté : il nous faut continuer à construire cette communauté", affirme enfin Arancha Gonzalez.

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