

L’IEP de Grenoble connaît de vives tensions autour de la suspension d’un enseignant et la Sorbonne organise un colloque de deux jours, « Après la déconstruction : reconstruire les sciences et la culture ». Dans les deux cas sont invoqués liberté académique et liberté d’expression. Qu’en est-il ?
- Olivier Beaud Professeur de droit public à l'Université Paris 2
Alors que depuis quelques semaines, l’IEP de Grenoble est en proie à de vives confrontations autour de la suspension d’un enseignant, la Sorbonne organise à Paris un colloque de deux jours intitulé « Après la déconstruction : reconstruire les sciences et la culture » que le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer a inauguré hier… Dans les deux cas sont invoqués la liberté académique et la liberté d’expression. Qu’en est-il ?
Réponses avec notre invité Olivier Beaud, professeur de droit public à l’université Paris II Panthéon-Assas, président d’honneur de l’association Qualité de la science française et directeur adjoint de l’institut Michel-Villey, ancien membre de l’Institut universitaire de France, ancien directeur adjoint du Centre Marc Bloch de Berlin Le Savoir en danger. Menaces sur la liberté académique (Puf).
Les mouvements minoritaires qui revendiquent cette idéologie que l'on dit "woke" peuvent être un vrai danger pour la liberté d'enseignement. Ils sont très vivaces aux Etats-Unis ou en Angleterre, mais sont encore très marginaux en France. Donc je pense qu'il y a une exagération de part et d'autre du phénomène .Je ne dis pas que le problème n'existe pas : il est simplement très marginal par rapport à l'ensemble des menaces qui pèsent sur la liberté académique en France.
La science consiste à poser une hypothèse que l'on va ensuite vérifier et éventuellement modifier si les résultats obtenus invalident l'hypothèse initiale. Le problème est lorsque vous défendez une argumentation qui ne prend pas la réfutation. C'est évidemment très difficile de déterminer le moment où l'on franchit cette frontière. Ce n'est en tout cas surtout pas le ministère qui doit dire ce qui relève, ou non, de la libre recherche scientifique. C'est entre pairs que l'on doit contrôler doit s'exercer.
L'autonomie des universités n'a jamais existé parce que les universités en France dépendent de l'Etat, du ministère. Certaines thèses présentent l'université française comme étant soumise à l'empire du néo-libéralisme. Mais ce qui menace principalement l'université française n'est pas le capitalisme : c'est le pouvoir de l'administration. L'université n'est pas libre, parce qu'elle est sous la contrainte constante du ministère, qui multiplie les réformes qui sont à mon avis inadéquates.
Pour aller plus loin :
- Le savoir en danger. Menaces sur la liberté académique est paru aux éditions PUF
- Le lien vers le colloque « Après la déconstruction : reconstruire les sciences et la culture »
- Olivier Beaud : "L'université française est à l'agonie, comme l'hôpital public", L'express
- Sciences Po Grenoble : on vous résume l'affaire de la suspension d'un professeur en cinq actes, France info
- En savoir plus sur l'association pour la Qualité de la science française
- À propos de l’autonomie des universités, un usage dévoyé de la langue, AOC
- Université : « L’universalisme républicain ne se décrète pas, il se construit », la tribune de 74 universitaires parue dans Le Monde
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Entre “woke” et “antiwoke”, une troisième voie est possible, Courrier International
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