Après la crise : l’espérance de vie. Avec Jean-David Zeitoun et Philippe Ravaud

La vie d'après est-elle enfin arrivée ?
La vie d'après est-elle enfin arrivée ? ©Getty - Kohei Hara
La vie d'après est-elle enfin arrivée ? ©Getty - Kohei Hara
La vie d'après est-elle enfin arrivée ? ©Getty - Kohei Hara
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À quelques jours du 19 mai, date de la prochaine étape des réouvertures, la vaccination s'accélère, la circulation du virus ralentit encore. Faut-il y voir une sortie de crise ?

Avec
  • Jean-David Zeitoun Médecin, consultant pour plusieurs cabinets de conseil et industriels en lien avec l’industrie pharmaceutique
  • Philippe Ravaud Chef de service du Centre d’épidémiologie clinique de l’Hôtel-Dieu à Paris

A quelques jours du 19 mai, date de la prochaine étape des réouvertures, nous revenons ce matin sur la question de l’évolution de la santé humaine, qui n’a cessé de s’améliorer depuis le 18è siècle. L’épidémie de covid-19 a en effet marqué un tournant : elle a mis au premier plan la santé des citoyens et en particulier celle des plus âgés. Néanmoins, les formes persistantes du covid-19 dévoilent un autre visage du virus. Les personnes concernées, beaucoup plus jeunes ne présentent pas de comorbidités particulières.

Peut-on réellement parler de sortie de crise, en dépit de cette forme longue de la maladie qui s’installe ? Que reste-t-il à découvrir du virus ? Comment cette épidémie fait-elle événement dans l’histoire de la santé ? 

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Jean-David Zeitoun : docteur en médecine consultant pour plusieurs cabinets de conseil et industriels en lien avec l’industrie pharmaceutique, auteur de “La Grande Extension. Histoire de la santé humaine” (Denoël, 2021).

Philippe Ravaud,  chef de service du Centre d’épidémiologie clinique de l’Hôtel-Dieu à Paris

Les définitions du Covid long

Pour Philippe Ravaud, le Covid long se définit par la persistance de symptômes après un délai de un à six mois. 

C’est un amalgame de beaucoup de formes différentes qui n’ont pas les mêmes explications. Passer un mois et demi en réanimation, amène un syndrome post-réanimation classique et connu. Il y a aussi un syndrome post-infection virale de maladie chronique qui est aussi classique. Philippe Ravaud

Avec le Covid en particulier, il y a des signes qui arrivent plus fréquemment dans certaines études comme des difficultés respiratoires, de la fatigue musculaire ou cérébrale, comme un brouillard mental avec des troubles cognitifs, et des troubles type thrombose avec une attaque des vaisseaux. Philippe Ravaud

Le Covid long va peut être devenir une maladie chronique de plus. C’est difficile à savoir, voire impossible. C’est très spéculatif aujourd’hui, on ne sait pas quels sont les mécanismes du Covid long. Jean-David Zeitoun

Les maladies au XXIe siècle

Jean-David Zeitoun écrit dans son livre que si l'espérance de vie des hommes a beaucoup augmenté en un siècle, de nouvelles formes de maladie se sont imposées.

Depuis le milieu du XXe siècle, en même temps que les humains augmentaient leur espérance de vie, ils ont fait augmenter les risques environnementaux et comportementaux qui ont fait s’élever les chances de maladies chroniques : maladies respiratoires, cancer, maladies cardiovasculaires chroniques. Jean-David Zeitoun

La multimorbidité est en train d‘exploser dans le monde. Toutes les maladies sont associées : cardiovasculaire, pulmonaire, etc. et peuvent avoir un déterminant commun comme le tabac. Philippe Ravaud

Il y a des facteurs qui ont régressé, d’autres qui ont progressé. Le tabac a beaucoup reculé dans les pays industrialisé comme les États-Unis. En revanche l’obésité et le diabète y ont augmenté, ce sont des maladies qui se répandent et se développent. C’est un sujet politique : si on veut supprimer des pans de l’industrie agro-alimentaire, on peut le faire. New York l’a fait brutalement il y a une dizaine d’années en interdisant un certain taux d’acide gras saturé dans les restaurants. Un mix de graisse et de sucre n’était plus autorisé, et l’obésité a baissé à New York. Jean-David Zeitoun

Les derniers enjeux du Covid-19

Alors que la fin de la crise se fait sentir, les tensions se cristallisent désormais autour des questions de la vaccination et du pass sanitaire. 

La méfiance vis-à-vis de la vaccination est ancienne en France. Dans la vaccination il y a un geste altruiste et un bénéfice collectif. Le risque est souvent individuel. Avec le Covid-19, pour une fois, la vaccination a réellement un bénéfice individuel, en réduisant le risque d’être hospitalisé. Philippe Ravaud

La résistance vaccinale existe depuis que le vaccin existe. Il faut dire qu’à ses débuts c’était moins efficace et moins sûr. C’était quand même moins dangereux que le virus lui même. C’est la règle en médecine : tant que les inconvénients sont inférieurs aux bénéfices que vous pouvez en attendre, le traitement est légitime. Jean-David Zeitoun

Le passe sanitaire est un sujet plus politique que scientifique. Il y a déjà des vaccinations obligatoires pour les enfants ou pour les soignants comme l’hépatite B. Aujourd’hui la vaccination contre le Covid-19 n’est pas obligatoire pour les soignants et je ne pense pas qu'il serait scandaleux que ça le devienne. Jean-David Zeitoun

Si on veut rétablir une circulation entre les pays et avoir une vie qui se rapproche de la normale, on sera obligé de demander un pass sanitaire. Pour voyager, ce sera plus facile pour les gens que de faire des tests PCR à l’aller et au retour. Philippe Ravaud

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