Confinement, numérique et neurosciences : les apprentissages face à la pandémie. Avec Stanislas Dehaene

Élèves d'une école à Bischwiller, le 2 novembre 2020.
Élèves d'une école à Bischwiller, le 2 novembre 2020. ©AFP - PATRICK HERTZOG
Élèves d'une école à Bischwiller, le 2 novembre 2020. ©AFP - PATRICK HERTZOG
Élèves d'une école à Bischwiller, le 2 novembre 2020. ©AFP - PATRICK HERTZOG
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Alors que la fermeture des écoles menace les régions les plus touchées par la pandémie, nous recevons ce matin le neuroscientifique Stanislas Dehaene, Président du Conseil scientifique de l’éducation nationale pour nous parler des nouveaux défis de l’apprentissage face à la pandémie.

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Il y a un an, toutes les écoles fermaient avec le confinement. Depuis, les conséquences ont été dénoncées, entre décrochage scolaire et accroissement des inégalités. À la veille d’une potentielle nouvelle fermeture des écoles dans certains départements, nous recevons Stanislas Dehaene, neuroscientifique et Président du Conseil scientifique de l’éducation nationale. Un enfant peut-il apprendre à distance face à un écran ? Quelle place pour le numérique dans les écoles ? Comment la neuroscience peut-elle répondre à la croissance des inégalités ?

Le Conseil scientifique de l’éducation nationale est une instance créée par Jean-Michel Blanquer début 2018, composée de scientifiques qui émettent des avis et prodiguent des conseils dans le domaine de l'éducation.

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Enfance et cerveau

Dès la naissance, le cerveau de l’enfant possède une grande plasticité faisant de cet âge une période particulièrement sensible pour l’apprentissage.

Dans le domaine du langage, ces périodes sont très précoces, il faut apprendre rapidement dans les premières années de la vie. À 3 ans les enfants vont être exposés à des différences allant jusqu’à 30 millions de mots. Cela a un impact dans l’organisation du cerveau de l’enfant et dans l’apprentissage de la lecture par exemple. Le cerveau ne fera pas les mêmes connexions.

Dès l’enfance le cerveau commence par surproduire des synapses. Il y en a deux fois plus chez les enfants qu’à l’âge adulte dans certaines régions du cerveau. Mais il est évident qu’à l’âge adulte, on puisse pouvoir apprendre un certain nombre de chose.

C'est parce que l'enfance est si importante dans l'apprentissage que Stanislas Dehaene soutient l'ouverture des écoles.

On a raison de discuter et d’insister sur la possibilité d’ouvrir les écoles au maximum en dépit de l’épidémie sévère que l’on connaît en ce moment.

Quel processus d’apprentissage à distance ?

On n’a pas énormément de données mais celles dont on dispose suggère que ça ne marche pas aussi bien qu’on l’espérait. D’abord, il est difficile pour les parents d’organiser la même qualité d’enseignement. 

Il faut aussi savoir que le cerveau de l’enfant est éminemment social, il a besoin d’un enseignant. Notre cerveau est probablement le seul à avoir une éducation explicite c’est à dire qu’un cerveau A écoute attentivement un cerveau B qui lui fournit les éléments pour progresser. Les autres espèces imitent mais ne transmettent pas le savoir.

Stanislas Dehaene rappelle également que les études ont prouvé qu’à travers un écran, l’interaction n’est pas la même pour un enfant. 

On peut penser à beaucoup de facteurs mais la question n’est pas encore résolue. L'un des facteurs est certainement l’attente. Très tôt le cerveau de l’enfant est très attentif et comprend que quelqu’un sait plus que lui. On n’applique pas forcément ce critère à un ordinateur.

Il ne faut pas négliger les interactions entre les enfants eux-mêmes. Avec le tutorat entre enfants, tous les enfants en bénéficient. Ça fait progresser l’enfant le moins avancé. L'enfant le plus avancé peut synthétiser dans sa tête les connaissances et va également progresser. 

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