

Pandémie, dette publique et positionnement de la France dans la guerre économique avec les géants américains et chinois... Bruno Le Maire répond aux questions de Guillaume Erner et nous présente son récit, "L'Ange et la Bête. Mémoires provisoires" paru chez Gallimard.
- Bruno Le Maire Ministre de l'Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Un nouveau conseil de défense est prévu à l'Elysée aujourd'hui à 9 heures, avant le Conseil des ministres auquel assistera Bruno Le Maire. Dans une actualité marquée par la menace d'un troisième confinement et la toute puissance chinoise mise en avant pendant le sommet de Davos, le ministre de l'Economie et des Finances répond à nos questions et nous présente son récit L'Ange et la Bête. Mémoires provisoires (éd. Gallimard).
Bruno Le Maire :
La période actuelle est exaltante quand on fait de la politique, parce que la politique retrouve du sens. Vous avez prise sur la réalité, pouvez changer les choses, améliorer la vie des gens... C’est aussi une période où vous vous demandez si vous prenez les bonnes décisions.
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Le cynisme est l’un des maux qui rongent la politique aujourd’hui. Le cynique prend la réalité et la transforme à son avantage, avec l’objectif de gagner en force et en puissance. Son aboutissement ultime, c’est le mélange de la vérité et du mensonge. Et cela conduit à la violence, aux évènements du Capitole, et à la remise en cause de la possibilité de la politique.
Trump refusait systématiquement de rentrer dans la discussion avec ses homologues. Il ne voulait pas de raisonnement, il voulait du rapport de force.
"C’est l’honneur de la France et du continent européen de défendre la raison en politique"
Emmanuel, Macron, Angela Merkel, Christine Lagarde… Ces personnalités ont un point commun : quand vous négociez avec elles, vous le faites en raison, sur des principes de réalité ou des vérités scientifiques. A l’inverse, avec d’autres comme Vladimir Poutine, le président Chinois ou Trump, vous fonctionnez sur de la déstabilisation de l’adversaire et le rapport de force. C’est l’honneur de la France et du continent européen de défendre la raison en politique.
C’est une bonne chose et une nécessité de s’endetter aujourd’hui. Il vaut mieux emprunter pour protéger les emplois et les entreprises plutôt que d’avoir un tsunami de faillites. Ce choix durera tant que la crise sanitaire sera là.
Nous rembourserons le moment venu, quand la croissance sera revenue. Rien ne serait pire que de vouloir rétablir les finances publiques au moment où la crise économique et la crise sanitaire sont encore là. Il faudra aussi, le moment venu, éviter les dépenses de fonctionnement qui seraient trop élevées et engager un certain nombre de réformes de structure. Nous aurons besoin d’une réforme des retraites qui rétablisse les équilibres financiers du régime de répartition qui est aujourd’hui déficitaire.
La privatisation d’ADP ne se fera pas dans les mois qui viennent pour une raison simple : aujourd’hui le transport aérien s’est effondré. Je suis aussi le gardien des intérêts patrimoniaux de l’Etat, et cela n’aurait pas de sens de céder une participation au moment où elle vaut très peu.
"Le Ministère de l’Economie et des Finances n’a pas vocation à écarter toute mesure qui coûterait cher. L’aspect sanitaire n’est pas à dissocier de l’aspect économique"
On doit se demander si notre système de recherche est adapté, si les financements sont les bons. Je pense que nous avons commencé à prendre des décisions qui vont dans la bonne direction. Mais les géants de la pharma ou les startups ont besoin de milliards d’euros pour se développer. Il faut que nous créions un marché unique des capitaux européens. Nous avons besoin de cette articulation entre grandes entreprises, startups, financement et recherche.
Gestionnaire rigoureux ne veut pas dire austérité. Aujourd’hui, il faut protéger notre économie et nos emplois. Le moment venu il faudra rétablir nos finances publiques : ce n’est pas bon d’avoir un tel écart d’endettement entre les plus grandes économies d’une zone qui a la même monnaie. Je pense qu’on est capables de réduire de la dépense publique sans réduire l’emploi, notamment avec la digitalisation.
L’autre raison de rembourser la dette, c’est d’avoir des réserves pour le jour où nous aurons une nouvelle pandémie. C’est l’une des nouvelles réalités du XXIe siècle. Et la responsabilité politique nous engage à voir plus loin que le bout de notre nez.
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