

L’écrivain Yannick Haenel et du dessinateur François Boucq présentent dans "Janvier 2015, le Procès", (Editions Charlie Hebdo les Echappés) 54 jours d'audience exceptionnels. Invités des Matins, ils racontent ce procès historique et dressent le constat de la liberté d'expression cinq ans après.
- François Boucq Dessinateur de BD
- Yannick Haenel Ecrivain
Pendant plus de deux mois et demi, l’écrivain Yannick Haenel et le dessinateur François Boucq ont suivi pour Charlie Hebdo chaque minute du procès des attentats de Janvier 2015. 54 jours d’audience parfois chaotiques mais nécessaires pour tenter de comprendre et de raconter un traumatisme qui dure toujours cinq ans après. Grâce aux mots et aux dessins, les auteurs de Janvier 2015, le Procès (Editions Charlie Hebdo et Les Echappés) nous parlent de justice, d’art et de liberté d’expression.
Dans les yeux des accusés
François Boucq : J'ai décidé d'être le plus respectueux possible, parce qu'il y a une tradition dans le procès qui est d'aller vers la voie caricaturale. Et je me disais que dans ce procès, il fallait être respectueux de ce que j'allais voir, y compris pour les accusés. Parce que, bien sûr, on a tendance à charger les accusés graphiquement. [...] L'autre aspect, c'était de me retrouver face à des gens avec des masques et donc de comment j'allais me débrouiller avec des gens dont je verrais que la moitié du visage.
François Boucq : Mais au fond, mon travail, c'est de parler du corps. Dans ma conception du dessin, le fond et la forme, c'est une seule et même chose. Quand je travaille la forme, je dis le fond. [...] Les regards sont essentiels parce que énormément de choses passent par le regard. On pourrait dire les accents de vérité sont dans le regard.
Rire de tout
François Boucq : Il y a des types d'humour différents. Il y a un humour qui fait de mal à personne. Il y a quelques dessinateurs comme ça qui font rigoler doucement. Et il y a un humour, celui que je trouve le plus intéressant, qui est l'humour qui permet de prendre conscience et qui permet d'avoir de la distance avec la tragédie. Si on ne veut pas être avalé par la tragédie, il faut suivre les dessinateurs.
Yannick Haenel en réaction au dessin de Xavier Gorce : Je pense que l'ironie est devenue incompréhensible. C'est très grave et il est possible que ce soit un dessin un peu trop intelligent. Je veux dire par là que, si j'ai bien compris, le dessin ironisait sur le fait que Finkielkraut avait demandé des précisions pour savoir quand il y avait un crime de pédophilie. Et Xavier Gorce ironise sur un pingouin qui fait un surcroît de précision. Mais du coup, il y a tellement d'étapes pour qu'on comprenne.
La politique des offensés
Yannick Haenel : Pour moi, un dessin, ou même un texte de littérature, ne relève pas de l'information et de la communication, mais de la résistance à tous les autres discours. Ça fait un peu mal la littérature. Ça fait un peu mal la philosophie, peut-être le dessin aussi. Le problème, c'est l'orchestration des offensés. Il y a une orchestration de gens qui se sentent offensés et qui vont l'exprimer parce que c'est leur intérêt. [...] La politique des offensés, ça devient quelque chose qui relève pour moi du mensonge.
Un panorama de l'humanité
François Boucq : Un des aspects qui m'ont semblé être le plus essentiel, c'est de me retrouver avec une espèce de panorama de tout ce que l'humanité peut avoir en elle, c'est-à-dire la pire des cruautés, les tragédies les plus noires, et en même temps aussi des réactions les plus sublimes. Des gens qui ont secouru d'autres personnes, des gens qui ont risqué leur vie, des choses héroïques. Sur la durée de ce procès, il y a eu tout un panel de représentations de ce que l'être humain est capable et qui était magnifique à voir.
À l'origine du mal
Yannick Haenel : Quand je dis que le mal est sans pourquoi, ce n'est pas pour excuser les crimes. Bien au contraire. C'est pour dire que ces gens là, qui se réclament d'un islam qu'ils falsifient totalement, sont de purs tueurs sanguinaires. C'est pour assouvir une pulsion de mort.
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