

Washington va augmenter son assistance à l’Ukraine, notamment sur le plan militaire. Jusqu’où peut aller le face-à-face avec Moscou, et avec quelles conséquences ?
Annick Cizel (Enseignante-chercheuse spécialiste de politique étrangère américaine à l’Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3.), Bertrand Badie (Politiste, spécialiste des relations internationales, professeur émérite des universités à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et enseignant-chercheur associé au Centre d’études et de recherches internationales (CERI)).
"Nous voulons maintenant voir la Russie affaiblie à un point tel qu’elle ne puisse pas recommencer ce genre de choses, comme envahir l’Ukraine." Les propos tenus par le secrétaire d’État à la défense américain Lloyd Austin ne manquent pas d'ambiguïté.
Ils éclairent aussi sur la décision du président Joe Biden de voir l’aide militaire américaine à l’Ukraine augmenter considérablement.
Pour beaucoup, la guerre en Ukraine est en partie un échec de la diplomatie occidentale et son incapacité à établir un dialogue stratégique avec Moscou. Place alors aux solutions bellicistes ? Si oui, avec quels risques ?
Du côté russe, le discours officiel ne faiblit pas. Le ton demeure martial. Dans ce cadre, quelles peuvent être les conséquences de la décision américaine de hausser le ton ?
Pour nos invités, c’est tout “l’ordre mondial” qui pourrait être bouleversé à la faveur d’un réel regain de tensions entre Washington et Moscou.
Nos invités :
- Bertrand Badie, politiste, spécialiste des relations internationales, professeur émérite des universités à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et enseignant-chercheur associé au Centre d’études et de recherches internationales (CERI).
- Annick Cizel, enseignante chercheuse spécialiste des politiques étrangères des Etats-Unis à l’Université Sorbonne Nouvelle.
La contradiction de la politique étrangère américaine
Pour Bertrand Badie, il est clair que Joe Biden, qui a triomphé en novembre 2020, se trouve aujourd'hui prisonnier d’un dilemme. "Le trumpisme, avec 75 millions d’électeurs menés par une classe moyenne conservatrice, est replié sur ses valeurs et hostile à la mondialisation, donc à toute opération militaire extérieure. En même temps, le président des Etats-Unis essaie de construire sa marque autour de la défense de la démocratie et de la politique étrangère". Ce dilemme limite ses efforts de reconstruction. "Il doit à la fois satisfaire un noyau dur de la société américaine de plus en plus isolationniste et identitarisme, et, pour imprimer sa marque, brandir l’étendard de la démocratie". Pour le politiste cependant, une contradiction ne peut pas faire l’objet d’une politique étrangère
Entre politique extérieure et intérieure
"La Russie pour les Etats-Unis est un ennemi de l’intérieur. Pour l’administration de Joe Biden, c’est le trumpisme", estime Annick Cizel. La politique étrangère de l’administration Biden, qui est selon ses mots, à la fois extérieure et intérieure, est inséparable de la logique qui préside à la Maison Blanche. "Pour le Parti démocrate et les anciens de l’administration Obama actuellement au pouvoir, c’est le combat du sauvetage de la démocratie américaine et d’une certaine lecture de l’État fédéral comme État de droit, protecteur de la Constitution des Etats-Unis".
L'équipe
