Guerre en Ukraine, faillites et risques de famine au menu du FMI

Manifestation à Colombo (Sri Lanka) contre l’augmentation des prix des denrées essentielles une semaine avant la faillite du pays le 12 avril. Elles continuent.
Manifestation à Colombo (Sri Lanka) contre l’augmentation des prix des denrées essentielles une semaine avant la faillite du pays le 12 avril. Elles continuent. ©AFP - Ishara S. KODIKARA
Manifestation à Colombo (Sri Lanka) contre l’augmentation des prix des denrées essentielles une semaine avant la faillite du pays le 12 avril. Elles continuent. ©AFP - Ishara S. KODIKARA
Manifestation à Colombo (Sri Lanka) contre l’augmentation des prix des denrées essentielles une semaine avant la faillite du pays le 12 avril. Elles continuent. ©AFP - Ishara S. KODIKARA
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Le FMI craint l’effondrement économique de plusieurs pays étranglés par leur dette et l’inflation des prix alimentaires et énergétiques et auparavant le Covid-19, au moment où l’aide internationale s’oriente vers l’Ukraine.

"Une guerre en plus d'une pandémie, c'est comme être frappé par une tempête avant de s'être remis de la précédente." Kristalina Georgieva, directrice du FMI à l'ouverture de la session de printemps, le 20 avril 2022.

Sombre constat du Fonds monétaire international et de sa directrice générale au début de la réunion de printemps de l’institution. Le FMI craint l’effondrement économique dans plusieurs pays.

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Ce n’est pas la première fois qu’il sonne l’alerte. Déjà en décembre, le FMI parlait d’effondrement possible pour 60% des pays à faible revenu, les plus vulnérables, les plus endettés, les plus démunis face à la pandémie de Covid.

La guerre en Ukraine, c’est la crise sur la crise.

Augmentation des prix des matières premières agricoles, augmentation du prix du pétrole, inflation. Inflation qui pousse les banques centrales à resserrer leur condition monétaire, dit autrement fini bientôt la planche à billet. Resserrement monétaire qui pousse les taux d’intérêt vers le haut, emprunter devient donc plus cher.

Pour les pays les plus pauvres de la planète, rembourser leur dette leur coûte dorénavant autant que 50% de leur PIB constate le FMI.

Pour se rendre compte, c’est comme si la France devait en un an sortir 1 100 milliards d’euros pour ses créanciers, sans pour autant éponger sa dette, l’essentiel de ces remboursements étant des intérêts.  Les 450 milliards de recettes annuelles de l’Etat français n’y suffiraient pas.

Imaginez les marges de manœuvre des pays dans lesquels la majorité des gens vit avec moins de deux dollars par jour : elles sont nulles.

Quel choix leur reste-t-il ? Ne plus rembourser, faire défaut, se déclarer en faillite.

Aider leur population à faire à face à des prix du pain, du riz, et de l’essence qui montent en flèche… n’est en revanche pas une option.

"Pour le dire très simplement, une guerre en Europe, en Ukraine, se traduit par la faim en Afrique."  Kristalina Georgieva, directrice du FMI.

Là encore, la guerre aggrave une situation déjà dramatique.

Il y a deux ans, l’ONU mettait déjà en garde sur le risque de famine aux proportions "bibliques". Aujourd’hui, les fonds fournis par les pays riches totalisent seulement 5% des 8 milliards de dollars demandés par le Programme Alimentaire Mondial pour lutter contre la faim selon OXFAM.

L ’ONG s’inquiète de voir une partie de l’aide au développement potentiellement réorientée vers l’Ukraine. Pour le moment seuls le Danemark et la Suède ont joué franc jeu à ce propos.

Le Danemark pour dire que son soutien financier à l’Ukraine ne serait pas en plus, mais pris sur son aide bilatérale. Quant à la Suède, elle projette dans son prochain budget de réduire son aide au développement de 10 milliards de couronnes, un milliards d’euros, pour financer l’accueil des réfugiés ukrainiens sur son sol.

L’aide à l’Ukraine devrait être additionnelle, plaide OXFAM, et le plus possible, ce devrait être des dons, et non des prêts a exhorté la directrice générale du FMI lors d’une table ronde consacrée à l’Ukraine sinon Kiev sortirait de la guerre avec une dette considérable.

Guerre, faim, faim guerre, covid, dette, risques financiers… tel fut le menu des réunions du FMI, la banque mondiale et le G20 à Washington.

Un Ministre s’y est néanmoins rendu avec espoir, le ministre des finances de Zambie, Situmbeko Musokotwane. Voir ici son intervention.

La Zambie fut le premier pays à faire défaut sur sa dette à cause de la pandémie en novembre 2020. Novembre 2020, c’est aussi le moment où les pays du G20 ont créé un cadre commun destiné à restructurer, voire annuler la dette des pays en feraient la demande. La chronique ci-dessous en décelait déjà les limites.

La Bulle économique
4 min

La Zambie, comme l’Ethiopie et le Tchad ont fait cette demande mais depuis, rien ne s’est passé a regretté le ministre Zambien depuis Washington.

En cause : le cadre lui-même, sans procédure, ni contrainte. Mais aussi les réticences de la Chine, l’un des premiers créanciers des pays africains les plus endettés.

Or, selon le FMI, la Chine s’est engagée lors de ces réunions de printemps à être plus coopérative.

Ce serait la seule bonne nouvelle venue de Washington cette semaine. Le temps presse. 20 pays sont au bord du défaut a prévenu le FMI sans vouloir citer leurs noms. Des émeutes de la faim couvent dans plusieurs pays.

Au Sri Lanka, les manifestations sont quotidiennes depuis que le pays s'est officiellement déclaré en faillite il y a deux semaines. Avant cela déjà, des dizaines de milliers de Sri Lankais campaient devant la résidence du Président pour réclamer sa démission. Médicament, nourriture, essence, les pénuries s’aggravent de jour en jour.

La Revue de presse internationale
5 min

Appelé à l’aide, le FMI exige que le Sri Lanka négocie d’abord avec ses créanciers pour réduire sa dette. La Chine est justement l’un de ces créanciers.

Là encore, le FMI se dit très préoccupé. Lui qu’on surnomme le pompier de la finance mondiale semble démuni pour faire face à tant d’incendie.

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