De 2014 à 2018, à la tête de la Réserve Fédérale américaine, elle passait pour une "colombe", et parlait aux marchés financiers régulièrement. Nouvelle secrétaire au Trésor, Janet Yellen a répondu aux sénateurs lors de son audition "on ne s’intéresse pas assez à Main Street". C’est-à-dire ??
Nous sommes au Sénat américain, d’un côté, en visio de l’autre. La commission des finances auditionne Janet Yellen, avant sa confirmation comme secrétaire au Trésor.
Ici, le lien pour revoir cette audition, et lire la déclaration préalable de Janet Yellen.
Première femme à ce poste, Janet Yellen n'a pas fait carrière dans la finance privée, contrairement à beaucoup de ses prédécesseurs. Elle est universitaire, économiste, spécialiste des liens entre monnaie et emploi, elle conseilla Bill Clinton, et fut aussi la première femme à présider la Banque centrale américaine, la Fed. Elle dit ceci en préambule aux sénateurs.
L'économie est un sujet aride, mais je l'aborde en me disant que cela peut aider les gens. Janet Yellen.
Nommée à la tête de la Fed par Barack Obama en 2014 , Yanet Yellen fut celle qui parlait aux marchés financiers du monde entier quasi chaque mois avant que Donald Trump ne l’évince en 2018.
A lire/ écouter : Les dilemmes de Janet Yellen (billet économique de 2016)
Depuis deux ans, Janet Yellen donnait des conférences, notamment pour des banques de Wall Street. Elle s’est engagée à se déporter si les cas d’entreprises qui l’ont rémunérée sont traités par le Trésor américain.
Dans les formulaires de divulgation financière déposés auprès du comité, Yellen a répertorié plus de 7 millions de dollars en frais de parole qu'elle a reçus d'un certain nombre de grandes entreprises de Wall Street telles que Goldman Sachs et Citigroup depuis son départ de la Fed. Yellen a accepté de se récuser des affaires de trésorerie impliquant certaines entreprises qui l'ont indemnisée pour ses entretiens. Lu dans News & Observer.
Nul doute : Janet Yellen sait parler à Wall Street, et elle sait aussi parler aux sénateurs qui l'ont auditionné régulièrement. Dorénavant, c'est le peuple de Main Street qu'elle cherche à toucher.
A la sénatrice démocrate qui lui demande, question qui rappelle de mauvais souvenirs : "Ferez-vous en sorte que plus jamais les contribuables ne sauvent des banques de la déroute ? ". Janet Yellen répond.
Je ne puis être plus en accord avec ce que vous dites. Notre préoccupation principale doit être Main street, pas Wall street. Janet Yellen, lors de son audition.
Ça ne répond pas directement à la question, mais Janet Yellen explique ensuite comment ne pas en arriver là. Il faut, dit-elle confirmer les régulations financières mises en place après la crise financière de 2008, la loi Dodd Franck, que Donald Trump avait commencé à assouplir. Et surtout il faut continuer de verser des milliers de milliards de dollars dans l’économie américaine pour qu’elle se relève de la pandémie. Janet Yellen est une keynésienne.
Une colombe au Trésor
A la Banque centrale américaine, on la disait Colombe, c’est-à-dire plus préoccupée par l’emploi et le chômage, que par l’inflation. Au Trésor, elle sera dépensière.
Joe Biden veut ajouter 1900 milliards de dollars aux 2900 milliards dépensés depuis mars par Donald Trump pour sauver l'économie américaine, elle veut convaincre les Républicains de ne pas s’y opposer, elle qui promet de travailler dans un esprit « bipartisan ».
Mais les Républicains s’alarment du déficit budgétaire qui dépasse en 2020 les 3200 milliards, deux fois plus que le précédent record de 2009 !
Ce déficit, ils l’ont eux même creusé avant la pandémie, sous la Présidence de Donald Trump, quand ils ont voté un « paquet fiscal » réduisant la fiscalité pour les entreprises et les plus riches, mais Janet Yellen n’est pas du genre à le leur rappeler. Elle expose ses arguments économiques de son flot lent et haché.
Il faut rappeler que les taux d’intérêts sont en ce moment très bas. Ne pas agir à nouveau, c’est risquer une récession bien plus longue et douloureuse. Janet Yellen.
Dépenser, et dépenser fort, d'abord pour Main Street qui se débat avec la pandémie, cela coûtera moins à long terme que de creuser la dette, argumente-t-elle.
Comme ceux de Donald Trump, le plan de soutien à l’économie de Joe Biden prévoit d’envoyer des chèques directement aux ménages les plus modestes, 1400 dollars, et de prolonger les aides additionnelles pour les chômeurs et chômeuses, 400 dollars par semaine.
A lire/ écouter : Où vont les milliers de milliards de dollars du plan américain ?
Là, où il diffère fortement, c’est sur le soutien financier aux collectivités locales villes, comtés, Etats (notamment New York et la Californie), qui sont parfois dans un tel stress financier, qu’ils licencient leurs employés municipaux à tour de bras : professeur, pompiers…
Recue plan de Biden, quelle différence avec ceux de Trump ?
Un million 400 000 emplois publics ont été détruits en quelques mois aux Etats Unis. Pour ces états en difficultés, le plan Biden veut verser 350 milliards, un cinquième du total.
Les États et les villes ont licencié près de 1,4 million de travailleurs, bien au-dessus des quelque 750000 personnes qui ont perdu leur emploi pendant la crise financière mondiale, selon le Center on Budget and Policy Priorities. L'État de Géorgie a réduit le financement de l'enseignement primaire d'environ 1 milliard de dollars, rapporte le Financial Times.
L’autre grande différence, c’est cette promesse de doubler le salaire minimum fédéral, qui n’a pas changé depuis 2009 ans, pour le porter à 15 dollars, contre 7,25 aujourd’hui (corrigé de l’inflation, ces 7,25 valent aujourd’hui 5 dollars 95).
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Plus de la moitié des Etats américains ont déjà relevé ce seuil, mais les Républicains pourraient en faire un casus belli. L’un d’eux a brandi la menace de voir un à trois millions d’emplois détruits si la nouvelle administration américaine maintenait sa promesse lors de l’audition au Sénat ; des projections qui font débat entre économistes. Voir ici pour une revue du débat (en anglais) très exhaustive, et ci-dessous, le tweet de la Gouverneure de Caroline du Sud (Républicaine), qui a fait un tabac.
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Pour le moment, ce projet d’augmenter le minimum fédéral n’a pas été précisé notamment pour le rythme de ce passage à 15$. Si la nouvelle secrétaire au Trésor transige à ce sujet, elle mécontentera l’aile gauche du parti démocrate. Ce sera un mauvais signe envoyé aux Américains et Américaines de Main Street qui manifestent régulièrement pour ce minimum fédéral à 15$ depuis les années Obama.
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A plus long terme, l’un des plus grands défis de la ministre de l’économie de la première puissance économique mondiale sera de réduire les inégalités, qui se sont encore creusés avec la pandémie aux Etats Unis. Economiste juqu’au bout des ongles, elle a parlé lors de son audition au Sénat, d’une économie en K. K comme la courbe qui voit les plus riches s’enrichir, et les plus pauvres s’appauvrir.
Les gens s'inquiètent d'une reprise en forme de K, mais bien avant que le COVID-19 n'infecte un seul Américain, nous vivions dans une économie en forme de K, une économie où la richesse reposait sur la richesse tandis que les familles de travailleurs tombaient de plus en plus dans la pauvreté. Cela est particulièrement vrai pour les personnes de couleur. Janet Yellen, décaration préalable à son audition.
Une année 2020 fantastique pour les financiers de Wall Street, 10 millions de nouveaux chômeurs et chômeuses, c’est la situation dont hérite Janet Yellen.
Si elle a su parler aux premiers par le passé, saura-t-elle maintenant comme elle s’y est engagé, améliorer et vite, le sort des seconds ?
Le département du Trésor doit être une institution qui se réveille chaque matin en pensant au peuple américain. Vos emplois, vos chèques de paie. Vos luttes, vos espoirs. Votre dignité. Et votre potentiel illimité. Nous travaillerons pour restaurer cette confiance et cette promesse. Janet Yellen.
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Marie Viennot
L'équipe
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