L'économie sociale et solidaire face à la crise

Les associations culturelles et sportives sont particulièrement touchées par la crise
Les associations culturelles et sportives sont particulièrement touchées par la crise ©AFP - Loïc Venance
Les associations culturelles et sportives sont particulièrement touchées par la crise ©AFP - Loïc Venance
Les associations culturelles et sportives sont particulièrement touchées par la crise ©AFP - Loïc Venance
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Avec le Covid-19, l'économie sociale et solidaire apparaît à la fois comme une réponse à la crise et comme un secteur fragilisé.

Leurs activités se sont d’emblée montrées cruciales. Dès le début de la pandémie, les structures de l’économie sociale et solidaire (ESS), ont rappelé leur importance. Et la nécessité de leurs actions, tournées vers les besoins sociaux, sanitaires, sportifs ou culturels.  “L’économie sociale et solidaire peut et doit incarner la norme d’une économie d'après-crise”, soutient l’Observatoire de l’ESS. Tout en constatant, dans un récent rapport, combien le secteur est fragilisé par cette crise.  

Avec plus de 2,4 millions de salariés, il représente 14% de l’emploi privé. Réparti dans plus de 220 000 établissements, en l'occurrence des associations, coopératives, mutuelles et fondations. Si leurs principes semblent répondre à de nombreuses attentes et besoins exprimés depuis le début de la crise, les structures de l’ESS seront-elles en mesure de constituer une alternative ?
En 2008, l’économie sociale et solidaire avait bien résisté à la crise financière, grâce à son modèle éloigné de la financiarisation. Cette fois, il n’en va pas de même :  le secteur connaît d’importantes difficultés.
Premier constat, 52 000 emplois ont disparu au second trimestre 2020 Cela représente 6,5 % d’établissement en moins, soit 11 000 fermetures. Essentiellement des associations. Cette baisse correspond souvent au non-renouvellement des emplois précaires ou saisonniers. Des contrats sur-représentés dans les secteurs les plus touchés par la crise, à savoir  la culture, le sport, la restauration..La mise à l'arrêt de certaines activités menace de nombreuses associations d’une disparition irréversible. 30 000 pourraient fermer définitivement, estime le Mouvement associatif. 

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Or dans le privé hors ESS, ces fermetures sont bien moins importantes : elles représentent environ 1% des établissements.Alors pourquoi une telle différence entre ces champs de l’économie? D’abord parce que l’effet des dispositifs d’aides y ont été très différents, analyse ESS France. Par exemple, fin novembre le fonds de solidarité mis en place par le gouvernement n’avait été utilisé que par 15 000 associations, pour 1%  des crédits distribués.
Une enquête du Mouvement associatif montre  que si globalement les associations ont peu activé les aides, c’est soit parce qu’elles n’en avaient pas connaissance, soit parce que cela ne répondait pas à leurs besoins. Par exemple, le prêt garanti par l’Etat, le PGE, correspond peu au modèle économique non lucratif des associations.
Il y a quelques semaines, la secrétaire d’Etat Olivia Grégoire a lancé un fonds urgence ESS de 30 millions d’euros pour les petites associations, qui emploient moins de 10 salariés. Elle a aussi reconnu que le non - recours aux aides reste une grande difficulté dans le secteur.

Autre différence entre l'économie sociale et solidaire, et le reste de l’économie : l’évolution de la masse salariale. Elle baisse beaucoup moins dans le champ de l’ESS (-10,6%) qu’ailleurs (-17,4%). Ce que raconte ce chiffre, c’est que les entreprises de l’économie sociale ont eu proportionnellement moins recours au chômage partiel. Cela s’explique notamment par les secteurs d'activité : 55% des emplois de l’ESS sont consacrés à l'action sociale, médico-sociale et la santé. Des métiers particulièrement sollicités depuis le début de la pandémie. 

Enfin, l'impact est très différent au sein de l'économie sociale. L'ampleur du choc dépend du type de structures - ce sont les associations pour qui c’est le plus difficile. Et aussi beaucoup des secteurs. Sans surprise, c’est dans le domaine des arts et du spectacle, complètement à l'arrêt que les disparitions d’emploi sont les plus importantes : 20 % d'emplois en moins au second trimestre 2020.  Même si  les intermittents bénéficient d’une "année blanche" jusqu’à l’été prochain, la moitié des structures culturelles estiment leur existence menacée à court ou moyen terme.  C’est aussi particulièrement difficile pour les clubs de sports; ils ont connu une baisse massive de leur nombre d’adhérents, c’est autant de recettes en moins. Et 12% d'emplois perdus en un an. La crise a donc un “impact non seulement sur un marché économique, mais sur la société toute entière, au plus profond des interactions qui la constituent” estime ESS France 

Le secteur est au coeur d’une situation paradoxale. Alors même que la pandémie remet en lumière les limites sociales et écologiques de nos modèles de production, l’ESS pourrait constituer une alternative puissante. Mais ses structures rencontrent elles-mêmes des difficultés importantes. C’est en partie du soutien de la puissance publique et de l’évolution des modèles économiques du secteur que dépend aujourd’hui sa capacité à constituer durablement une réponse aux crises.

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