ORPEA : parmi les 1ers de la classe selon les notations ESG 

Orpea (photo prise pour l’inauguration d’un Ehpad à Toulon en nov 2021) est très bien classée par les agences de notation extra-financière
Orpea (photo prise pour l’inauguration d’un Ehpad à Toulon en nov 2021) est très bien classée par les agences de notation extra-financière ©Maxppp - Frank Muller
Orpea (photo prise pour l’inauguration d’un Ehpad à Toulon en nov 2021) est très bien classée par les agences de notation extra-financière ©Maxppp - Frank Muller
Orpea (photo prise pour l’inauguration d’un Ehpad à Toulon en nov 2021) est très bien classée par les agences de notation extra-financière ©Maxppp - Frank Muller
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Responsabiliser les entreprises, prendre en compte leur résultats extra-financiers, c'est le but des critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance). Les bonnes notes d'ORPEA illustrent une fois de plus les lacunes de ce système. 

ISR ESG, ça vous dit quelque chose ???

Vous êtes un investisseur, un épargnant, une épargnante, vous voulez placer votre argent dans des entreprises qui certes réalisent du profit, mais s’engagent en plus à respecter l’environnement, leurs salariés, et des règles de bonne conduite… 

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Les critères ESG (E pour Environnement, S pour social, G pour Gouvernance) sont là pour vous aider. 

En attribuant des notes (ratings) aux entreprises sur leur performance extra-financière, les critères ESG  permettent de créer des fonds, qu’on peut faire labelliser ISR, investissement socialement responsable, ce qui vous permet annonce le site du label ISR, de  "contribuer via votre investissement à l’élaboration d’une économie plus vertueuse, plus responsable". 

Responsabiliser les entreprises au-delà de leurs résultats financiers, on en parle beaucoup de nos jours, mais ce n’est pas une idée nouvelle. Depuis 2001, les entreprises cotées en bourse ont l’obligation de publier un rapport sur leur Responsabilité Sociétale et Environnementale, on dit RSE. 

Il y a de nos jours un responsable RSE et une stratégie RSE dans quasi toutes les grandes entreprises, et c’est le cas aussi chez ORPEA

Or à la lecture du dernier rapport RSE publié par le groupe privé de maison de retraite en 2021, qu’apprend-on ? 

Qu’ORPEA est l’une des entreprises les mieux classées de son secteur.  

Rating (notation) extra financière d'Orpea tel que présenté dans ses résultats semestriels 2021.
Rating (notation) extra financière d'Orpea tel que présenté dans ses résultats semestriels 2021.
- Orpea

5ème sur 113, 14 places de plus en un an selon Sustainanalytics.   Vigeo Eiris (société créée à la base par Nicole Notat, l'ancienne dirigeante de la CFDT, et rachetée par Moodys) autre classe ORPEA 4ème sur une liste de 47 entreprises spécialisées dans l’accueil des personnes âgées. Degré de transparence 80% assure un troisième évaluateur. 

Que valent ces notes aujourd’hui, alors que le livre Les Fossoyeurs décrit le rationnement des fournitures médicales, de la nourriture, la maltraitance chronique des résidents, et la pression du siège sur les objectifs financiers ? 

Pas grand-chose… mais ce discrédit n’est pas nouveau. Volkswagen avait aussi de très bonnes notes en 2015 quand fut révélé le Diesel Gate. Le constructeur allemand sous déclarait sciemment ses émissions polluantes, leur valeur réelle pouvant parfois dépasser 40 fois les normes autorisées. 

Comment ces agences, censées juger les entreprises, peuvent-elles manquer à ce point de flair ? 

En vérité, on ne peut même pas leur faire ce reproche car les failles de leurs évaluations sont inhérentes à leur méthode qui consiste, sauf rares exceptions,  à ne jamais se rendre dans l’entreprise notée. 

Faire des enquêtes de terrain cela serait trop cher, trop précis, trop long, les investisseurs réclament surtout des données quantitatives, en masse, ainsi ils peuvent comparer, classer (faire du benchmark) sélectionner les valeurs à mettre dans leurs fonds ISR, vert, climat, à impact etc.. 

Cette quête de respectabilité a tellement le vent en poupe que pour les agences de notation extra-financière, la concurrence est acharnée, et mondiale. Et pour être considérée comme une référence, il faut avoir pu noter le plus d’entreprises possibles. 

La masse de données à traiter est donc considérable. Imaginez, toutes les entreprises cotées du monde, combien cela fait de notes à donner....

Pas d'enquête de terrain, mais du Big Data

Pour la plupart, les agences de notation extra-financières ne font donc pas dans la dentelle, elles font dans le "BIG DATA. 

Sur le fond, elles s’appuient sur les données publiées par l'entreprise elle-même, souvent un catalogue de bons exemples, et leur parole vaut acte. 

Les médias sont eux aussi sondés via des algorithmes, mais selon de récents travaux menés par Christophe Revelli (voir ci-dessous), les recherches se concentrent sur quelques médias hégémoniques économiques et financiers en langue anglaise, ce qui ne permet pas d’identifier correctement les controverses touchant les entreprises. Ainsi, la mobilisation européenne des salariés d'ORPEA pour dénoncer des conditions de travail désastreuses, rapportée notamment par Mediapart en 2018 aura pu passer sous les radars. 

La langue anglaise est la langue hégémonique pour permettre la standardisation et l’échange de données. Or, si l’information et la source média utilisée est issue d’un média local, en langue étrangère (du type un média russe au Kazakhstan mieux ancré et plus proche de l’information dans son pays), alors vous avez entre 4 à 12 fois de plus de chances d’identifier des controverses graves en lien avec l’entreprise (Arcelor Mittal dans notre étude), en comparaison des controverses identifiées par les agences de notation. La conclusion est que les outils utilisés ne sont pas les bons, car ils s’ancrent dans une perspective de gestion des coûts qui est centrale et inhérente aux marchés financiers. Christophe Revelli, professeur de finance durable et d'investissement d'impact à la Kedge Business School.

L'affaire Orpea de ces derniers jours en revanche, même le Financial Times en a parlé, ce qui va conduire Moodys ESG solution, la branche extra financière de l’agence de notation, à..  baisser sa note ? Non, pour le moment, Moodys (en réponse à une demande de ma part) va ajouter cette controverse dans sa base de données.

La financiarisation des agences de notation extra-financière

Si ESG était le nom d’un groupe du Bronx des années 80, aujourd’hui ESG rime le plus souvent avec travail bâclé. Travail, il y a,  les centaines de pages des rapports RSE en attestent, mais l'impact réel des entreprises sur leurs parties prenantes (salariés, environnement, clients, résidents, voisins etc....) reste inconnu. 

Pour qui donne le LA de la tendance éthique, verte et durable du capitalisme, c’est fâcheux. "Ces agences sont-elles mêmes soumises à des contraintes de profits très fortes" explique Christophe Revelli, or aucun cadre normatif contraignant ne leur impose de méthode ou une surveillance.

Bonne nouvelle, après bien des alertes ( ici article en anglais qui en répertorie quelques unes) les régulateurs se réveillent. L'Europe est en train de durcir les conditions pour se dire finance responsable et le label ISR  français est en pleine refonte

Aux Etats Unis, des enquêtes sont en cours sur les abus. 

Quant à l’action ORPEA, elle a été sortie de plusieurs fonds responsables, mais elle est restée dans d'autres, qui attendent le résultat des enquêtes lancées par la puissance publique et Orpea. Pour le moment donc encore, le flou encore demeure, et comprenne, qui pourra ! 

Ci dessous, le groupe ESG (créée dans les années 70...), et le titre qu'on entend dans la bulle audio. 

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