Prix et pub

Pub et prix
Pub et prix ©Getty - Adshooter
Pub et prix ©Getty - Adshooter
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Les catalogues promotionnels présentent des prix parfois tellement bas que personne ne peut réellement s’imaginer la réalité des modes de production. Mais pourquoi vouloir attirer exclusivement l’attention sur le prix, sans mettre en rapport la qualité nutritionnelle ou gustative des produits ?

Et bien figurez-vous que depuis plusieurs semaines, j’ai décidé de remonter de ma boîte aux lettres l’essentiel de son contenu, qui, depuis l’invention des mails, se compose essentiellement de tous les catalogues de distributeurs destinés à assurer la promotion de leurs promotions. Et pour une fois, je me suis penché sur leur contenu plutôt que de les mettre directement dans la poubelle jaune adéquate, en râlant une fois de plus de devoir subir cette stupide agression écologique. Alors Caroline, il faut dire quand même que la stupidité en question est vertigineuse, accrochez-vous ! Si on ajoute brochures et prospectus publicitaires, tous les acteurs s’accordent à peu près sur le chiffre de près de vingt milliards de documents imprimés chaque année pour garnir nos boîtes aux lettres. Alors, pourquoi tant d’assassins d’arbres dans nos grandes enseignes de supermarchés ? La réponse tient dans quelques autres chiffres que nous offrent les meilleurs Instituts de sondage. Selon Nielsen par exemple, 50% des Français disent consulter ces catalogues et 30 % s’en serviraient pour faire leurs courses. Et selon une autre étude, Ipsos, cette fois-ci, 71% des consommateurs disent choisir un magasin selon les rabais ou autres promotions proposés. Et c’est vrai que la plongée dans les offres promotionnelles de ces catalogues est édifiante. 

Et premier constat : la pandémie et la crise économique qui va avec sont bien passés par là. Plus questions désormais des campagnes de 2019 intitulées, souvenez-vous, « Act for food, des actions pour mieux manger » ou « Manger local et de saison », nous voilà désormais revenus à la doxa sémantique du monde d’avant où « vos courses vraiment moins chères » rivalise avec le « 2+1 offert », ou « Encore plus d’économies sur vos courses au quotidien » et le merveilleux, les auteurs se reconnîtront, « le troisième, avec une réduction de 100% ».

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Alors, évidemment, loin de moi l’idée de porter le moindre jugement sur les millions de français qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts et qui doivent faire des économies sur tout, y compris l’alimentation. Mais pourquoi ne vouloir attirer exclusivement l’attention que sur le prix, sans mettre en rapport la qualité nutritionnelle des produits, voire même, leurs qualités gustatives. Non, ces catalogues vous présentent des prix parfois tellement bas que personne ne peut réellement s’imaginer la réalité des modes de production. J’ai ainsi trouvé des poulets à moins de 4 € le kilo et des crevettes qui viennent d’Équateur ou d’Iran à moins de 7,50€ le kilo et dont on sait pertinemment qu’elles ne peuvent être vendues à un tel prix sans le travail peu ou pas rémunéré de mineurs. On ne peut pas à la fois faire de grands discours sur la préservation de la planète et bousiller les forêts pour faire du commerce de sauvages sous prétexte qu’il y a un marché de la pauvreté.

Alors Caroline, il y a quand même une bonne nouvelle : l’Élysée a retenu parmi les 146 propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, l’interdiction de ces catalogues d’ici 2021, c’est à dire demain et je dirais malheureusement, plutôt après-demain, si j’en juge par l’état d’avancement de ce projet pourtant essentiel pour imposer un minimum de considération humaine des distributeurs entre leur obsession du chiffre d’affaires et leur cynisme le plus froid.

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